À Bruxelles et à Paris, devant l'Assemblée nationale, les agriculteurs bios étaient réunis mercredi 7 février pour protester contre la mise en pause du plan Ecophyto. Une vraie régression pour ces paysans qui affirment que la transition écologique n'est plus une option, mais désormais une nécessité. L'un d'entre eux, maraîcher depuis 35 ans en Isère, témoigne.
"Est-ce ce dont on a envie pour nos enfants demain ? Il faudrait qu’on se pose vraiment la question." Maraîcher depuis 35 ans, Vincent Gay cultive une dizaine d’hectares en bio, à Saint-Chef (Isère), et vend tout en circuit court. Ce mercredi 7 février, il pousse un cri d’alarme contre la suspension du plan Ecophyto : une panoplie de mesures lancées par le gouvernement et visant à réduire l’usage de produits phytopharmaceutiques par deux, d’ici à 2030.
Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a assuré dimanche qu'il ne s'agissait pas d'un "retour en arrière" mais d'une simple "pause". Le maraîcher, membre de la Confédération Paysanne, dénonce une véritable régression.
Boucs-émissaires des négociations
"Il faut peut-être, lorsque l’on utilise un produit, que l’on se demande si on le fait bien. Est-ce qu’on n'a pas peur de la dérive d’un produit ? Par exemple, sur un voisin en train d’étendre son linge à l’extérieur, sur un enfant en train de courir dans son jardin qui va avaler du désherbant…"
Les agriculteurs bio se sentent les grands laissés-pour-compte et même les boucs émissaires de la négociation entre le gouvernement et la FNSEA. Selon le maraîcher, ce syndicat majoritaire est dirigé par de grands céréaliers, les plus subventionnés par la Politique agricole commune (PAC). Des agro-industriels aux antipodes du maraîchage bio.
Même son de cloche pour Baptiste Barral, agriculteur et coprésident de l’association ADABio Isère, chargée du développement de l'agriculture biologique dans le département. "On marche sur la tête parce que l'on demande à l'agriculture biologique de se rémunérer par elle-même, par le marché. C’est-à-dire des consommateurs qui vont payer les produits bios plus cher que les produits conventionnels", s'insurge le paysan.
"Alors que ces mêmes consommateurs paient des impôts qui servent à la dépollution de l’eau, aux frais de santé engendrés par les problèmes posés par les pesticides de synthèse, tout ce qui est engrais chimique ou issu de l’agriculture industrielle."
Baptiste Barral, Vincent Gay et tous ces agriculteurs posent une double question : la transition écologique est-elle négociable ? Le modèle intensif a-t-il un avenir alors même qu’il ne profite qu’à quelques-uns ?
Outre les agriculteurs, qui manifestaient à Bruxelles et devant l'Assemblée nationale ce mercredi, six associations de riverains d'exploitations agro-industrielles ont fait part de leur colère, mardi 6 février, dans une tribune adressée à l'AFP. "Nous, riverains, vivants des campagnes, voulons que chaque agriculteur et agricultrice puisse vivre dignement de son travail tout en garantissant la protection de la biodiversité et de la santé de tous."