Sur les hauteurs de l'Alpe d'Huez, en Isère, l'histoire de la mine de l'Herpie s'efface peu à peu. Plus haute et plus petite mine d'Europe, elle fit pourtant travailler pendant longtemps des dizaines de paysans à la mauvaise saison, jusqu'en février 1950 où une avalanche dramatique fit 12 morts.
Elle fait partie des lieux quasiement oubliés qui ont pourtant marqué l'histoire de l'Oisans, en Isère. La mine de l'Herpie, à l'Alpe d'Huez, fit travailler pendant la première moitié du 20e siècle des dizaines de paysans de la région transformés en mineurs le temps de l'hiver. C'est un drame, une avalanche meurtrière, qui mettra fin à son exploitation. L'une de nos équipes est retournée sur place et a retrouvé des témoins de l'époque. Voici son reportage.
A 2.300 mètres d'altitude, il ne reste guère plus qu'un amas de pierres et de poutres... vestiges de l'une des plus hautes mines d'Europe. Les pentes sont aujourd'hui dévalées par les skieurs en hiver. Hors saison, on voit encore affleurer quelques monticules de charbon."C'était les résidus qui n'étaient pas évacués" explique Gilbert Orcel, ancien élu de l'Alpe d'Huez et membre de l'association Coutumes et traditions de l'Oisans. "Sur plusieurs étages, il y avait des galeries... ça s'est tout écroulé, on ne peut plus rentrer".
"Gueules noires au pays blanc"
Les Actualités Françaises projetées en 1941 dans les salles de cinéma narrent avec emphase l'activité de la mine de l'Herpie : "Gueules noires au pays blanc. Grâce à leur travail, grâce à leur vie solitaire et loborieuse, des milliers de foyers ont un peu plus de chaleur, un peu plus de bien-être".
La présence d'anthracite sur les hauteurs de l'Alpe d'Huez est connue depuis la nuit des temps, mais son exploitation est restée longtemps familiale. En 1880, une concession voit le jour... suivie en 1904 par la construction d'un téléphérique. A l'aube du XXème siècle, entre 30 et 50 personnes travaillent à la mine essentiellement l'hiver, dans des conditions difficiles. Ce sont surtout des paysans des villages alentours quand il n'y a pas de travaux aux champs.
Tout cela continue jusqu'au terrible drame qui frappe les mineurs dans la nuit du 9 février 1950. En pleine nuit une avalanche balaie un des deux bâtiments dans lequel dorment 14 mineurs, tous originaires de Besse, un village de la vallée. Six hommes sont tués sur le coup, six autres périssent carbonisés par l'incendie provoqué par un braséro renversé. "On a attendu le jour et que le feu s'arrête pour approcher le bâtiment" raconte Gilbert Battani, ancien mineur de l'Herpie. Approcher pour tenter de sauver les collègues coincés sous les décombre était impossible se souvient-il : "On ne pouvait pas tellement le feu était fort, c'était pas tenable".
Ce drame sonnera le glas de plus haute et la plus petite mine d'Europe, qui cesse son activité quelques mois plus tard. La ligne du téléphérique sera démantelée.
Sur les pentes de cette montagne de l'Oisans autrefois endeuillée, subsistent ici et là quelques pièces rouillées ou débris de wagonnets. Autant de stigmates d'une histoire qui aujourd'hui s'efface.