Jazz à Vienne (Isère) devait célébrer ses 40 ans du 25 juin au 11 juillet. Il est annulé. Impossible de priver de musique tous les amoureux de ce festival généreux. Aussi l’équipe du festival en lien avec les producteurs et les médias ont organisé une édition limitée. On vous raconte.
Dès l’annonce de l‘annulation du festival, nous nous sommes dit à France 3 qu’il fallait faire exister autrement ce grand rendez-vous annuel du jazz en France. Tous les jeudis soirs des mois de juillet et d’août, nous vous donnons rendez-vous sur l'antenne pour une rediffusion de grands concerts des festivals de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Le 9 juillet, c’est au tour de Jazz à Vienne. Mais comme l’a annoncé Benjamin Tanguy, le directeur artistique du festival, cette année est une édition limitée. Et qui dit limité, dit rare et donc précieux. C’est le cas de ce que nous vous offrons.
Non seulement nous vous proposons de voir ou revoir de larges extraits de trois concerts : Jamie Cullum (2017), Omar Sosa et Yilian Canizarez (2019), Deluxe (2017), mais nous vous offrons aussi des moments uniques d’une soirée inespérée. Ils ont été enregistrés le 23 juin dernier dans le théâtre antique vide ou presque. Et pour y avoir assisté, je peux vous dire que l’émotion était là.
Benjamin Tanguy, le directeur artistique de Jazz à Vienne explique : "On était un peu triste de cette annulation. On n’imaginait pas un été sans festival. Avec Pierre Carron de Séquence, on a imaginé un programme musical. C’est une création qu’on a commandée à ces artistes qui font partie de la famille de Jazz à Vienne" . Pour la première fois depuis le confinement, des musiciens avaient repris la route et se sont retrouvés pour "faire leur métier" comme ils disent, jouer ensemble.
Eric Legnini, le pianiste à la tête de son trio composé de Thomas Bramerie à la contrebasse et Rocky Gresset à la guitare, a invité deux chanteurs et quelles voix ! Hugh Colmann, le plus frenchy des chanteurs anglais et Thomas Dutronc, bien frenchy qui plonge dans les standards de la chanson internationale pour un album au titre et à l’accent tout naturellement assumé… "Frenchy" !
Ils sont arrivés dans l’après-midi pour les balances. Le piano et les micros installés au milieu du proscenium dos aux gradins. Les vieilles pierres où s’installe habituellement le public, comme merveilleux décor accrochant la lumière du soleil couchant. Face à eux, les techniciens de captation audiovisuelle de Séquence et les membres de l’équipe de Jazz à Vienne installés façon camping sur le béton de la scène désertée de toute installation de concert. La consigne est de ne pas applaudir entre les morceaux. Il s’agit d’une captation vidéo. Mais à la fin après un silence et un temps suspendu, la petite trentaine de personnes présente n’a pu retenir ses applaudissements. Presque surprise de retrouver les enthousiasmes des fins de concerts qui résonnent habituellement en juillet dans les lieux.
Impressions de musiciens
Eric Legnini : "C’est très émouvant parce qu’on rejoue, très émouvant de faire de la musique avec les potes. C’est émouvant de rejouer ici dans ce grand théâtre complètement vide. Je crois que j’ai joué ici 9 ou 10 fois. A chaque fois avec un public de Ouf, plein à craquer, avec une ambiance de folie. C’est très particulier de jouer dans un endroit que j’avais à peine reconnu parce qu’il n’y a pas la scène." A la question, est-ce qu’on joue de la même façon après la crise du covid-19, la réponse est : "la musique reste une expression de ce que l’on vit. Forcément il y a une force et une concentration différentes. Il y a une grande motivation, ça fait du bien à ton corps et à ton cœur. Oui il y a un après".(Dernier album d’Eric Legnini "Six strings under" dont sont extraits les morceaux joués dans ce concert)
Thomas Dutronc : "Mon nouveau disque Frenchy vient tout juste de sortir. C’est le trio d’Eric Legnini qui m’accompagne. Il m’a invité pour ce concert. On retrouve ici un avant-goût d’une tournée. Juste avant le covid, on mettait en place un spectacle ensemble... Alors aujourd’hui avec ce concert (sans public) on essaie de voir la bouteille à moitié pleine, de toute façon, nous, les bouteilles, on les boit ! On espère retrouver les concerts assez vite. C’est grâce aux vibrations, aux applaudissements qu’on joue. C’est sûr"
(L’album de Thomas Dutronc « Frenchy » chez Universal.)