A quelques semaines des vacances d'été, les patrons d'hôtels et de restaurants français ne sont pas les seuls à écumer internet et les agences de recrutements pour trouver des saisonniers à embaucher. L'association des hôteliers valdôtains lance un cri d'alarme et cherche une parade en se tournant vers des travailleurs étrangers italophones ou même francophone.
"Moi, il me manque environ 10 % du personnel dont j'ai besoin pour la saison d'été. Mais j'ai des collègues qui en sont à moins 40 ou 50% et se posent de sérieuses questions quant à l'ouverture de leurs établissements pendant l'été", explique Filippo Gérard, propriétaire de deux hôtels et trois restaurants à Cogne, en vallée d'Aoste.
C'est qu'en ce moment, ses quelque 400 collègues hôteliers et restaurateurs de la petite région francophone disent toutes la même chose : recruter en cuisine ou en salle est quasi mission impossible. "Les gens n'ont plus envie de travailler les soirs et les week-ends. Depuis le Covid, ils préfèrent trouver des emplois dans les grandes villes, même payés moins."
Même avec le logement compris, le travail de saisonnier dans la restauration n'attire plus les jeunes. "Une serveuse que j'avais l'habitude d'embaucher m'a dit au téléphone qu'après avoir posté sa demande de travail sur les réseaux sociaux, elle avait reçu 60 propositions en seulement 2 heures", ajoute Filippo Gérard.
L'Albanie pour l'italien, l'Afrique pour le français
Pour trouver des solutions à la pénurie, l'Adava (Association des hôteliers valdôtains) en est donc réduite à tourner son regard vers d'autres horizons. Et pas forcément vers ses voisins des Alpes.
La France ou la Suisse sont confrontés aux mêmes difficultés, malgré des salaires souvent supérieurs aux 1500 à 2100 euros proposés en Italie.
"On est en train de réfléchir à des conventions de partenariat que l'on pourrait signer avec des écoles hôtelières albanaises ou encore de Tunisie, du Maroc ou du Sénégal", explique encore Filippo Gérard. "L'Albanie parce que les Albanais bossent dur et qu'ils sont culturellement et historiquement proches de nous. Ils apprennent souvent l'italien en un temps record par exemple".
Quant aux pays africains, la prospection se limitera aux ex-colonies françaises. Le statut particulier de la plus petite région italienne et francophone lui facilitant l'intégration du personnel parlant le français.
S'il faut payer des cours de langue à nos serveurs, on le fera"
Filippo Gérard
"Notre problème de main-d'œuvre en est à un tel point qu'il n'est plus possible de renvoyer les solutions à demain. Car dès cet été, certains restaurants risquent de ne pas pouvoir ouvrir leur cuisine. Alors, même s'il faut payer des cours de langue à nos serveurs, on le fera".
Réinstaurer un pourboire obligatoire ?
Autre solution à l'étude : réinstaurer le pourboire obligatoire, par exemple 10% du montant de la note comme dans beaucoup de pays anglo-saxons. "Mais il y a une barrière culturelle dans nos pays européens qu'il faudra franchir", craint-on à l'association des hôteliers.
"On est un moment historique, conclut Filippo Gérard. Il ne suffit plus de clamer comme un parti populiste le fait chez nous : 'les Italiens d'abord'. Encore faut-il que les italiens aient envie de travailler dans nos métiers. Alors, soit on trouve le moyen d'attirer de nouveaux professionnels, soit il faudra que le client accepte de payer le prix fort pour venir au restaurant ou avoir un service digne de ce nom à l'hôtel".