Héros des JO-2018 avec trois titres, le quintuple champion olympique de biathlon Martin Fourcade s'est dit "fier d'avoir embarqué beaucoup de Français" avec ses exploits.
Héros des JO-2018 avec trois titres, le quintuple champion olympique de biathlon Martin Fourcade s'est dit "fier d'avoir embarqué beaucoup de Français" avec ses exploits.
Quel bilan tirez-vous de ces Jeux?
"Le bilan est excellent. Il y a eu une petite déception sur le relais hommes (5e, NDLR), comme il y en a en sport et forcément dans une olympiade. Mais j'étais venu pour un titre, je repars avec trois, donc c'est forcément beaucoup de plaisir. Ce qui est frustrant, c'est de finir les Jeux sur le relais. Il y a un sentiment d'inachevé, surtout parce que c'est la dernière course. Mais mine de rien, arriver à attraper l'or par équipes, ça a été une énorme satisfaction sur le relais mixte. C'était aussi un de mes objectifs principaux sur ces Jeux et je suis très fier de l'avoir fait."
Avez-vous des regrets sur les deux courses individuelles qui se jouent à quelques millimètres (le sprint et l'Individuel)?
"Il y a forcément des regrets, de la frustration, qui sont cependant bien différents. Sur le sprint, c'est la sensation de n'avoir pas bénéficié des conditions optimales. C'est bien sûr une déception de ne pas avoir réussi à en jouer. J'ai malgré cela réussi à hisser mon niveau et à réaliser une course magnifique, mais qui n'est pas payante, parce qu'il y a ces trois erreurs au tir couché pour quelques millimètres.
Il reste encore beaucoup de colère sur l'Individuel, parce que j'avais fait le travail, j'étais le seul athlète à décider du résultat de la course. Sur une faute d'inattention et d'énergie, je ne parviens pas à terminer le travail. Après, on ne va pas réécrire l'histoire. Bien sûr qu'en regardant en arrière, je me dis que pour quelques millimètres, j'étais cinq fois champion olympique sur ces Jeux, c'était de l'inédit. Mais pour quelques millimètres aussi, j'aurais pu rentrer bredouille, comme de nombreux athlètes l'ont fait."
Avez-vous eu conscience de l'impact de vos résultats en France et d'avoir marqué l'Histoire du sport tricolore?
"On m'en parle beaucoup, donc c'est quelque chose que je prends en considération. Pour moi, c'est une très grande fierté de le faire, parce que beaucoup ont eu cette chance avant moi et personne n'y était arrivé. Mais il y a certains athlètes qui n'ont pas cette chance de pouvoir concourir pour cinq titres olympiques parce que leur discipline ne le permet pas. Il y en a d'autres pour lesquels c'est facile d'en conquérir encore plus et qui ne l'ont pas fait. Chaque sport a ses forces et ses faiblesses, ses facilités et ses difficultés. J'ai conscience de la chance que j'ai de pouvoir rebondir et d'avoir plusieurs chances sur une même olympiade."
Appartenir désormais à un cercle très fermé de sportifs de légende comme Killy, Estanguet, Riner, Pérec, qu'est-ce que cela représente pour vous?
"C'est une immense fierté. Au-delà des qualités sportives et des carrières exceptionnelles, ce sont des personnes qui ont une aura, qui n'est pas seulement due à un résultat. Je suis très heureux que l'on me compare à eux dans ce sens-là. J'essaie de prendre ça avec beaucoup de recul et d'humilité. Je sens que ça a changé beaucoup de choses, ne serait-ce que dans ma perception du sportif. Même sur une échelle internationale, jusqu'à l'an dernier, j'étais un double champion olympique comme il y en a beaucoup. Aujourd'hui, je suis l'athlète le plus titré du sport français et à l'international, c'est quelque chose qui est reconnu par le CIO."
Vos performances ont suscité un engouement extraordinaire en France avec de fortes audiences à la télévision (plus de 6 millions de téléspectateurs sur la mass start). Qu'est-ce que cela vous inspire?
"J'en suis extrêmement heureux, d'autant plus que ce n'était pas un créneau horaire idéal. Je suis fier d'avoir embarqué beaucoup de Français dans cette aventure. Je n'ai jamais été en manque de reconnaissance. Au début, j'étais frustré d'avoir l'impression que le biathlon et mes résultats n'étaient pas reconnus à leur juste valeur, jusqu'en 2012-2013. Et puis je crois que le moment où j'ai commencé à me moquer un peu de ça, c'est là où ça a un peu explosé avec les Jeux olympiques de Sotchi.
Ensuite, j'ai toujours fait les efforts pour que beaucoup de monde embarque dans cette aventure. C'est un sport que j'adore, et je trouve qu'il y a une belle histoire à écrire. Je trouvais que l'on ne nous donnait pas notre chance. Mais le fait d'avoir plus de médailles que Tony Estanguet ou Jean-Claude Killy, ce n'est pas un moteur chez moi, et ce n'est pas quelque chose que je mets en avant. Je ne mets pas une carte de visite avec marqué +Martin Fourcade cinq fois champion olympique+. J'ai la légion d'honneur, et je ne l'ai jamais affichée. Je n'ai pas envie d'être connu, mais j'ai envie d'être reconnu pour le travail que je fais.
Finalement, que l'on fasse du biathlon ou que ce soit la balle de match en tennis à Roland-Garros, c'est le même schéma. Je pense que le fait que les Français se penchent sur le biathlon, ça va au-delà du fait que je gagne des médailles."
Après autant d'efforts, craignez-vous l'impact sur la fin de saison et votre duel avec Johannes Boe pour le gain d'une 7e Coupe du monde d'affilée?
"Si ça devait être demain, je serais un peu inquiet. Mais il me reste dix jours pour me remettre dans une démarche de très haute performance après un petit break. J'ai réussi à élever mon niveau sur ces Jeux par rapport au début de saison, à faire un écart assez important par rapport à Johannes. J'ai bon espoir d'arriver à le refaire et à rééditer ces performances sur la fin de saison, même si je sais que ce sera très difficile".