Le Club alpin français (CAF) célèbre, cette année, ses 150 ans d'existence. Au cours de sa riche histoire, le CAF a révolutionné la pratique de la montagne et son ouverture sur le monde. Retour sur ce glorieux passé.
"Quand on traverse 150 ans d'histoire, il est bien évident que l'on vit forcément des hauts et des bas. C'est pour cela que le cours de notre histoire s'apparente davantage à la descente d'un torrent de montagne qu'à celle d'un long fleuve tranquille".
Vu de ses bureaux de Chambéry, le regard que porte le directeur adjoint de la FFCAM (Fédération française des clubs alpins et de montagne, ndlr), sur la longue saga de 150 ans d'histoire du CAF (Club alpin français, ndlr) ne peut qu'être orienté vers l'optimisme.
À ses origines en 1874, le CAF comptait 137 membres composés presque exclusivement de personnalités de l'élite parisienne, dont l'architecte Eugène Viollet Le Duc ou l'écrivaine Georges Sand... Sa fédération compte désormais plus de 100 000 licenciés, emploie 34 salariés installés essentiellement dans ses deux principaux sièges de Paris et Chambéry, gère plus de 120 refuges de montagne et chalets, mais aussi éduque, forme et soutient un comité scientifique... L'esprit du club alpin des origines s'est désormais étendu à tous les champs de la montagne.
"Propager la connaissance des montagnes"
Cette réussite ne se mesure pas seulement à l'aune de ces données plutôt flatteuses. En 1874, lors de sa création, le club alpin français est loin d'être le premier du genre dans le monde. "C'est même l'un des derniers à naître", explique encore Niels Martin.
"Dans cette époque où l'on commence à affronter les hauts sommets, les Anglais, les Italiens, les Suisses ont créé avant nous leurs clubs alpins. Mais en France, l'une des volontés fortes des pères fondateurs est de faire progresser la connaissance exacte du milieu montagnard en matière de cartographie des massifs par exemple, qui était très mauvaise à l'époque. Mais aussi en matière de connaissance de la faune et de la flore des montagnes..."
Cette foi dans le progrès et cette ouverture d'esprit se traduit aussi par une première. Contrairement aux clubs alpins étrangers, celui de France est le premier à autoriser les femmes à adhérer. De même, pour les jeunes : presque dès sa création, des caravanes scolaires sont organisées.
Le mouvement est lancé. Il pose les bases des quelque 300 écoles "sports et aventures" actuelles proposées par la FFCAM en alpinisme, escalade, ski ou encore parapente... En 150 ans, le CAF a été un acteur central de toutes les nouvelles activités pratiquées en montagne.
Acteur de l'altitude
La pratique de l'alpinisme, pour centrale qu'elle ait été à l'origine du CAF, a rapidement fait évoluer l'arrivée du ski dans l'Hexagone : "En 1890, c'est un membre du CAF, Henri Duhamel, qui lors d'un voyage en Norvège, découvre ces drôles de planches en bois qui permettent de glisser sur la neige, et les ramène en France." Il ne manquera pas de les tester à Chamrousse, au-dessus de Grenoble, avant d'organiser une première compétition en 1907 à Montgenèvre, dans les Hautes-Alpes.
Le Club alpin français accompagnera les premiers pas du ski jusqu'à la création de la Fédération française de ski pour les JO d'hiver de Chamonix en 1924.
Mais le fameux "esprit cafiste" restera fidèle à ses premiers amours, en allant voir toujours plus haut vers ces étendues de neige et de glace. Dès 1890, le CAF participe à la construction de refuges pour y accueillir les alpinistes, notamment dans les Pyrénées à la brèche de Tuquerouye. Il pose ensuite les fondations de l’observatoire Vallot, la même année, près du sommet du mont Blanc ; puis d'un refuge Vallot, deux ans plus tard.
Les refuges de l'Aigle et du Goûter, sur la voie royale d'accès au toit de l'Europe, suivront avec une longue succession de 150 ans de mises aux normes et de rénovations.
"Groupe excellence alpinisme national"
C'est au pied du mont Blanc, que le club, désormais en route vers ses 200 ans, compte le plus de licenciés. Avec ses 14 000 "cafistes", la Haute-Savoie reste, de loin, le premier foyer français de licenciés.
Dans ce contexte et dans la droite ligne du soutien qu'il a toujours fourni aux grandes expéditions françaises de l'histoire, le Club alpin français a mis en place, en 1990, le GEAN pour "Groupe excellence alpinisme national".
"Depuis, tous les grands alpinistes passés ou actuels en sortent", se félicite le directeur adjoint de la FFCAM. Lionel Daudet, ou plus récemment Léo Billon et Benjamin Védrines, qui ont récemment gravi en trois jours les trois voies les plus difficiles du massif du Mont-Blanc, en sont issus.
Depuis sa création, le GEAN a ainsi formé certains des plus grands alpinistes français. Et ses membres ont accompli de nombreuses ascensions et expéditions à travers le monde. Une belle façon de "propager la connaissance exacte de la montagne", volonté première des pères fondateurs du CAF, mais aussi d'explorer les limites extrêmes du montagnard.