Le 17 mai 2022, une quinquagénaire atteinte de Trisomie 21 est agressée sexuellement dans le centre spécialisé de Saint-Marcel-de-Félines (Loire) dans lequel elle réside. L'absence de réactivité de l'établissement et la responsabilité du prévenu, un autre résident du centre, ont posé question lors du procès. Le tribunal l'a condamné à un suivi socio-judicaire pendant 5 ans.
Après 15 jours de délibéré, la décision est tombée. L'homme qui avait agressé sexuellement en mai dernier une résidente du centre pour handicapés de Saint-Marcel-de-Félines (Loire) est reconnu coupable. Il est condamné à un suivi socio judiciaire de cinq ans avec deux ans de sursis, assorti d'une obligation de soins et d'une interdiction d’entrer en contact avec la victime.
Il s'engage également à indemniser les parties civiles à hauteur de 15 000 euros. Une peine minime par rapport aux réquisitions du parquet qui avait demandé deux ans de prison, "dont au moins dix-huit mois pourraient être assortis d'un sursis probatoire".
"La victime a tout à fait conscience qu’elle a été victime"
Les faits s'étaient déroulés le 17 mai 2022, alors que la fête battait son plein dans l’établissement spécialisé. Veronique (*), la quinquagénaire atteinte de Trisomie 21 aurait accepté l’invitation d’un résident à le rejoindre dans sa chambre. Ce dernier aurait alors verrouillé la porte avant de caresser Véronique à la poitrine, ses fesses mais aussi ses parties génitales. L’homme alors âgé de 54 ans aurait d’ailleurs été plus loin en tentant une pénétration que la victime aurait repoussée avant de s’enfuir. La piste du viol est toutefois écartée par les examens gynécologiques.
"Elle est complètement traumatisée", explique Me Florence Caillies, avocate du barreau de Lyon, portant la voix de Véronique lors de l'audience devant le tribunal de Roanne. "La victime a tout à fait conscience qu’elle a été victime. Elle est dans tous ses états, anéantie. Elle a complètement perdu sa joie de vivre", souligne l’avocate précisant que sa cliente a immédiatement dénoncé les agissements du résident au personnel du foyer.
Une absence de réactivité venant du centre
Voyant que rien n’est fait dans le centre, ni pour sanctionner ces faits, ni pour lui venir en aide, la quinquagénaire alerte alors sa famille le 30 mai. "Ma cliente a dû se rendre au commissariat et porter plainte, assistée de sa mère", explique l’avocate avant d’ajouter : "Heureusement que ses proches étaient là". Ce jour-là, le centre prévoyait également d’avertir les services de police.
Une manifestation bien trop tardive selon l’avocate qui "demande des explications". Elle prévoit de s’associer au parquet de Roanne si des poursuites étaient engagées. Le procureur de la république Adbelkrim Grini a également fait savoir son mécontentement.
"Il a fallu attendre que ce soit la victime qui aille porter plainte. Personne n'a alerté les autorités, comme l'article 40 du code de procédure pénale l'impose. Le traitement de cette affaire est scandaleux et j'y donnerai suite. On ne peut pas passer sous silence des agressions sexuelles", a-t-il déclaré au cours de l’audience le 21 mars dernier.
Deux enquêtes ouvertes
Le parquet de Roanne a également annoncé le 31 mars l'ouverture d'enquêtes préliminaires contre cet établissement et un autre établissement de soins n'ayant pas effectué de signalement après un décès suspect.
"J'ai saisi la brigade de recherches de la gendarmerie de deux enquêtes pour non-respect des dispositions de l'article 40 du Code de procédure pénale qui impose à toute autorité constituée de signaler sans délai au procureur de la République tout fait susceptibles de revêtir une qualification pénale", a déclaré à l'AFP le procureur de Roanne, Abdelkrim Grini.
C'est la première fois que j'engage une telle démarche", confie le magistrat, "car j'observe une tendance de certains établissements de soins à vouloir traiter en interne de faits de violence, d'agression sexuelle, ou de décès suspect. C'est un message de rappel à leurs obligations que j'adresse à l'ensemble d'entre eux
Abdelkrim Grini, procureur de la république de Roanne
La question de la responsabilité pénale
Quant à l’agresseur, un quinquagénaire à l’âge mental de 5 ans placé en garde à vue le 2 juin, il ne se souvient pas des faits. "Il ne sait ni lire, ni écrire, ni compter. Il a reconnu les faits mais il a répondu à une pulsion. Il n’y a aucun discernement de sa part et il est à mille lieues de tout ce qui a été dit lors de cette audience", a mis en avant l’avocat du prévenu Me Raphaël Salzmann.
Le prévenu était déjà sous le coup d'une inculpation similaire pour des faits en février 2019 et condamné à 4 mois de prison avec sursis. "Reste qu’il ne doit pas recommencer. On se pose la question de la responsabilité pénale, qui pour moi ne fait pas de doutes", explique Me Caillies qui insiste sur la gravité des actes du prévenu, ayant entrainé, en plus du traumatisme moral, 9 jours d’ITT. La victime a aujourd’hui retrouvé une nouvelle structure d’accueil après avoir vécu plusieurs mois chez ses parents.
(*)Prénom d'emprunt
Avec AFP