Sentiment d'incompréhension, accroissement des contraintes, manifestations, beaucoup d'agriculteurs réclament une meilleure valorisation de leurs produits. Dans la Loire, un groupe de producteurs de lait a décidé de prendre en main son destin et la maîtrise des prix de ses produits.
Perchées sur les hauteurs du Pilat dans les communes de Burdignes et de Saint-Sauveur, leurs fermes sont voisines et leurs idées communes. Bien décidés à vendre leur lait au juste prix, quatre producteurs ont investi un million trois cent mille euros dans une fromagerie collective.
Chaque matin après la traite, Damien, Alban, et Laurent fabriquent leurs propres recettes de fromages, tandis que Julien est sur les routes pour les vendre aux grandes surfaces et aux collectivités alentour. Un moyen d’éviter les intermédiaires trop gourmands.
Lactalis a fabriqué une usine avec des millions d'euros, ils fabriquent 500.000 camemberts par jour. Et il ne veut pas payer le prix du lait en face correctement. C'est malhonnête !
Alban Vallat , agriculteur du GAEC de Montchal dans la Loire
Voir son produit transformé et dégusté
En 2019, les trois associés lancent une étude de marché, empruntent, se forment et construisent le bâtiment. Depuis juin dernier, ils font des fromages.
"On a la mainmise sur nos produits, il n'y a pas d'intermédiaire. Tu vois évoluer ton lait, tu fais des fromages, tu le fais affiner et tu le fais goûter. C'est magnifique !", se réjouit Alban Vallat. Une satisfaction qui a un prix. Celui de journées très denses qui débutent avec une première traite à 05h du matin, puis direction la laiterie pour faire les fromages, et retour à la ferme à 13h30 pour le travail de soin et d'entretien, suivi d'une autre traite à 17h30.
Leur fromage est très demandé sur un bassin de consommation étendu entre Valence, Saint-Etienne et Lyon. Pour y répondre, il faudra vite embaucher cinq salariés. Pour le moment, la laiterie transforme 3500 litres de lait par semaine et espère doubler sa production. Alors quand ils voient monter la colère, le mal-être des agriculteurs, les fromagers des 4 Fermes ont l’impression que leur solution pourrait bien être la bonne.
"Le paysan, on lui dit : tu nous fais ça et on te paye tant. Et après, tu te débrouilles avec ce qu'il reste, parce que s'il ne reste rien, on part dans le trou et on ferme les fermes", explique Laurent Galipaud, un des quatre associés.
Se réunir, pour la survie des villages
Cette idée est née du même ras-le-bol que celui qui s'exprime sur les blocages organisés depuis une semaine partout en France. C'est aussi une histoire de copains qui ont grandi ensemble et restent attachés à la vie de leur territoire. Burdignes, ce sont 250 habitants, dont une cinquantaine dans le joli hameau perché en altitude, à la limite de l'Ardèche.
Au-delà de la survie des agriculteurs, pour Laurent Galipaud, il s'agit aussi de la survie du monde rural. "Car il faut que les jeunes restent, si on ramène des jeunes et des jeunes, on garde notre école, nos associations... C'est la vie du village, il faut travailler pour ça".
Affinés sur des planches d’épicéas du Pilat, dans le hangar de 700m² construit à l'entrée du village, les fromages se bonifient, l’avenir de ces fromagers aussi, en bonne voie pour gagner la guerre des prix.