Une année noire dans la longue histoire de Casino : le distributeur qui a fêté ses 125 ans en 2023 a publié ce mercredi 28 février des résultats financiers catastrophiques sur cet exercice, avec une perte nette spectaculaire de 5,7 milliards d'euros.
Casino affiche des pertes importantes pour 2023 : le chiffre d'affaires est tombé à moins de 9 milliards d'euros malgré un contexte d'inflation qui gonfle les ventes. Le groupe s'est enfoncé dans la crise avec une plongée par rapport à 2022. Sa perte nette était alors de 316 millions d'euros.
Ventes des grandes surfaces
Respectivement en recul de 1,3% et en hausse de 3%, le groupe insiste sur les ventes qui résistent des deux enseignes phares : Monoprix et Franprix. Mais ces variations sont bien loin des concurrents français comme Intermarché, qui revendique 8,8% de hausse de ses ventes, Système U ou E.Leclerc. Casino a d'ailleurs réduit dans ses comptes la valeur de la plupart de ses actifs, dont Monoprix et Franprix. C'est l'un des éléments d'explication de sa perte impressionnante, l'autre étant le recul de la rentabilité de son activité sur tous les formats, ainsi que les grandes difficultés de ses hypermarchés et supermarchés en France.
Depuis, la plupart d'entre eux ont été cédés aux concurrents Intermarché, Auchan et Carrefour. Les Mousquetaires/Intermarché en ont acheté 61 en 2023, et 288 autres doivent changer de main courant 2024. Une trentaine d'entre eux va devenir des Carrefour, une centaine Auchan et le reste Intermarché. Au total, Casino indique avoir cédé pour 1,4 milliard d'euros d'actifs en 2023, dont la part encore détenue dans l'enseigne brésilienne Assai, et 1,7 milliard depuis début 2024, dont ces 288 magasins.
Changement de contrôle
Le groupe n'a pas communiqué le nombre de salariés employés à fin 2023. Fin 2022, il en comptait 200 000 dans le monde, dont 50.000 en France, mais s'est séparé de l'ensemble de ses activités à l'international ces derniers mois.
Le tribunal de commerce avait validé lundi 26 février le plan de sauvegarde accélérée du distributeur, âprement négocié pendant des mois et permis par des candidats à sa reprise, les milliardaires Daniel Kretinsky et Marc Ladreit de Lacharrière ainsi que le fonds d'investissement Attestor. Ensemble, ils doivent apporter plus de 900 millions d'euros sur les 1,2 milliard attendus par le distributeur dans les semaines à venir. Ces augmentations de capital vont massivement diluer les actionnaires actuels de Casino, à commencer par le premier d'entre eux, Jean-Charles Naouri, PDG depuis 2005.
Vers un appel ?
À la condition qu'administrateurs et mandataires judiciaires, CSE de Distribution Casino France, représentants du personnel ou ministère public ne contestent pas la décision de justice.
Le délégué syndical central CGT du groupe Jean Pastor avait indiqué lundi se "réserver le droit de faire appel de la décision du tribunal dans le délai de 10 jours".
Une réunion a lieu ce mercredi matin pour faire le point sur la suite du dossier. L'intersyndicale de Casino réunie en ce moment. Elle étudie la possibilité de faire appel du plan de sauvegarde du groupe validé par le tribunal de commerce de Paris. Si elle renonce, il n'y aura plus d'obstacle à la reprise par le consortium des milliardaires Marc Ladreit de Lacharrière et Daniel Kretinsky.
Redonner "du souffle"
À défaut, avait précisé Casino lundi, la restructuration de la dette du groupe est attendue le 27 mars et les repreneurs emmenés par le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky prendront dans la foulée les commandes du groupe.
"À partir du mois d'avril, l'équipe de direction, avec son directeur général Philippe Palazzi", un ancien de Metro et de l'agro-industriel Lactalis, "mettra en œuvre un plan ambitieux de réorganisation, d'investissement et de modernisation" de ce qui restera du groupe après le départ des magasins vendus entre fin avril et début juillet, indiquaient les repreneurs en début de semaine, après l'annonce de la validation du plan de sauvegarde par le tribunal de commerce de Paris.
Daniel Kretinsky s'était alors satisfait de bientôt tourner la page de "semaines si incertaines, où la menace était de disparaître", pour "redonner des moyens et par là même du souffle" à un groupe "redimensionné, réorganisé et désendetté". Il avait toutefois averti que "le chemin sera encore long, avec des moments difficiles et requerra beaucoup d'efforts de tous".
Casino a laissé à la nouvelle équipe le soin de dessiner les perspectives financières pour l'avenir. "Compte tenu du changement de contrôle à venir, le groupe ne publie pas de nouvelles perspectives 2024", a-t-il indiqué ce mercredi.