Il y a 50 ans, le ligérien Lucien Neuwirth se battait pour la légalisation de la contraception

Le Sénat rendra hommage jeudi 9 février à Lucien Neuwirth, ancien élu gaulliste surnommé "le père de la pilule". Le député de la Loire, disparu en 2013, contribua fortement à l'émancipation des femmes en faisant voter il y a 50 ans la légalisation de la contraception.

La chambre haute du Parlement célèbre cet anniversaire avec quelques mois d'avance, puisque la loi "sur la régulation des naissances" fut promulguée le 28 décembre 1967. Un timbre commémoratif, en vente dans le réseau postal à partir de ce vendredi 10 février, sera dévoilé à cette occasion. En avant-première à Saint-Etienne...


"Lucien Neuwirth a pris beaucoup de risques pour défendre une position qui était extrêmement novatrice à l'époque: ne pas considérer les femmes uniquement par leur fécondité. C'est le principe fondateur de l'égalité entre les femmes et les hommes", a estimé Chantal Jouanno (UDI-UC), présidente de la Délégation aux droits des femmes du Sénat.



C'est le jour de son 42ème anniversaire, le 18 mai 1966, que Lucien Neuwirth, alors député UNR (ancêtre du RPR) de la Loire, déposa sa proposition de loi, dans la France très conservatrice d'avant mai 68.

Il avait su convaincre le général de Gaulle, pourtant choqué lorsque le candidat de gauche à la présidentielle de 1965, François Mitterrand, avait proposé d'abroger la loi nataliste de 1920 qui interdisait la contraception, l'avortement et toute "propagande anticonceptionnelle".
Pour emporter l'aval du chef de l'Etat, Lucien Neuwirth, ancien élu municipal de Saint-Etienne, lui exposa les ravages des grossesses non désirées et des avortements clandestins. "C'est vrai, transmettre la vie, c'est important! Il faut que ce soit un acte lucide, continuez", lui dit le général.

"Malfaiteur public", "fossoyeur de la France" ou "assassin d'enfants": Lucien Neuwirth, ancien résistant qui s'était engagé à 19 ans dans les forces de la France libre, fut l'objet de violentes attaques, y compris au sein de son camp politique. C'est à Londres qu'il avait découvert la "gynomine", un contraceptif en vente libre.

- Education à la sexualité -

Sa proposition de loi finit par être discutée au Parlement à partir de juillet 1967, et fut adoptée en décembre. Le général de Gaulle promulgua la loi le 28 décembre 1967, depuis Colombey-les-deux-Eglises où il passait les fêtes en famille. Il faudra cependant attendre plus d'un an pour les premiers décrets d'application, qui s'échelonneront jusqu'en 1972.

Au-delà de la légalisation de la contraception, Lucien Neuwirth "s'est bagarré, avec le Planning familial, pour l'accès à l'information", a souligné Véronique Séhier, co-présidente du Planning.

Ci-dessous voir ou revoir un reportage de novembre 1972 (INA)


La loi de 1967 a en effet institué les établissements d'information, de consultation et de conseil familial (EICCF) et les centres de planification ou d'éducation familiale (CPEF), pour accompagner la diffusion des méthodes contraceptives. Elle a également "préparé le terrain" à la loi Veil du 17 janvier 1975, qui a légalisé l'avortement.

Lucien Neuwirth, qui devint sénateur de 1983 à 2001, a par ailleurs défendu "avec détermination" le droit à l'éducation à la sexualité pour les jeunes, par exemple lors des débats sur la loi Aubry de 2001, a ajouté Mme Séhier. Il est important de rappeler son combat, à l'heure où "il y a des volontés extrêmement fortes de régression", a estimé Chantal Jouanno. "On entend de plus en plus, avec le mouvement Sens Commun et la Manif pour tous, qu'il y aurait une place naturelle des femmes et des hommes dans la société. Si on considère qu'il y a un ordre biologique qui s'impose à la loi, il n'y a pas d'égalité possible".

Lucien Neuwirth est décédé en 2013, à l'âge de 89 ans.

Lire aussi sur FRANCE INFO : la pilule n'a plus la cote  
Sur le site de l'INA, les reportages consacrés à Lucien Neuwirth.
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