Basse, baryton ou ténor : chaque hippopotame possède sa propre signature vocale. Une découverte que l'on doit aux chercheurs du laboratoire d'éthologie de l'Université de St-Etienne, spécialisé dans la communication animale.
On peut dire du professeur Nicolas Mathevon qu'il a un hippopotame dans l'oreille... Ce spécialiste des langages et comportements animaux connaît parfaitement le cri de l'hippopotame. A tel point qu'il est capable de l'imiter sans jamais perdre son sérieux. Il est de retour dans son laboratoire d'éthologie de l'Université de Saint Etienne, après un séjour studieux au cœur du parc national Maputo au Mozambique. Objectif de ce voyage d'études : démontrer que les hippopotames se reconnaissent entre eux grâce à leur voix.
Pour mieux comprendre la façon de communiquer de ces énormes herbivores, les chercheurs envoient un cri d’hippo enregistré… puis ils observent la réponse du groupe.
La ventilation de bouse comme arme dissuasive...
Le professeur et son équipe ont établi que moins la voix est familière, plus la réponse est agressive. Au paroxysme de l'énervement, l'hippopotame sort de l'eau et tente de terroriser l'hippo intrus avec force claquements de mâchoires et ventilation de bouse pour marquer son territoire… Olfactivement désagréable mais puissamment dissuasif, lorsque l'on sait qu'un mâle peut atteindre 3 tonnes et qu'il charge à 40 km/h, ce qui en fait l’animal le plus dangereux d’Afrique.
«Les hippos ont des mâchoires colossales, extrêmement puissantes, des dents qui sont très grandes, qui sont très affûtées, qui sont aiguisées et qui sont capables de tuer des humains très facilement» rappelle le professeur Mathevon, dont les recherches fondamentales sur des animaux difficiles à approcher font l’objet d’une publication dans une revue scientifique prestigieuse, Current Biology.
«Ce que nous avons montré, c’est d’abord que chaque hippo a sa propre voix. Et les individus se reconnaissent entre eux. Ils auront des réactions différentes selon qu’ils connaissent ou non les individus qu’ils entendent».
Un outil de sauvegarde de l'espèce ?
Les travaux des chercheurs du laboratoire stéphanois pour comprendre les relations sociales des hippopotames pourraient contribuer à la sauvegarde d'une espèce dont la population décroit régulièrement en Afrique. En permettant par exemple d'exfiltrer des spécimens dangereux au lieu de les abattre, en les attirant par des cris d'hippo enregistrés avant de les euthanasier ou de les déplacer vers un autre lac.