L'Italie réclame Edgardo Greco depuis des mois. L'homme, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour homicides dans son pays d'origine, a été appréhendé à Saint-Etienne, où il travaillait dans une pizzeria. La fin d'une cavale de 16 années. La justice française doit à présent statuer sur son éventuelle extradition. Réponse le 16 janvier 2024.
Le pizzaïolo arrêté à Saint-Etienne sera-t-il extradé ? Ce mardi 5 décembre, la Cour de cassation devait se prononcer sur son sort. Me Metaxas, l'avocat lyonnais d'Edgardo Greco, a soulevé un vice de procédure qui pourrait même lui permettre de recouvrer la liberté. La décision de justice a été mise en délibéré : elle devait être connue ce mercredi 6 décembre.
Finalement, pas de décision avant les fêtes de fin d'année pour Edgardo Greco. Le ressortissant italien, qui fait l'objet d'une demande d'extradition, sera fixé sur son sort le 16 janvier prochain, a annoncé, ce mercredi matin, Me Metaxas. "Nous sommes très confiants", souligne l'avocat.
Vice de procédure
Edgardo Greco sera-t-il extradé et renvoyé en Italie pour purger sa peine ? Le 27 avril dernier, la cour d'appel de Lyon a rendu son arrêt concernant l'extradition du sexagénaire : un arrêt favorable. Son nouvel avocat, Me Metaxas a introduit un pourvoi en cassation contre cette décision et soulevé un point de droit.
Ainsi, la chambre de l’instruction qui a examiné la demande d’extradition du ressortissant italien en avril dernier était composée de trois magistrats. Ces trois magistrats auraient dû être les mêmes que ceux ayant procédé à son audition en mars. Or ce n'est pas le cas de l'un d'eux. C'est ce vice de procédure qui a été mis en avant par l'avocat d'Edgardo Greco.
C'est dur pour mon client : 20 ans après, il est rattrapé par son passé.Aujourd'hui, il est suspendu à la décision de la Cour de cassation.
Me David Metaxasavocat d'Edgardo Greco
Considéré par le parquet général de la Cour de cassation, ce point très technique devrait donc profiter à Edgardo Greco. La justice française estime en effet que dans ces conditions, la demande d’extradition n'a plus lieu d'être et doit être annulée. C'est ce que le parquet général de la Cour de cassation a mis en avant le 29 novembre dans l'avis rendu en vue de l'audience de ce mardi 5 décembre.
L'arrêt autorisant l'extradition du ressortissant italien devrait donc être annulé, selon l'avocat. "En toute logique, Edgardo Greco pourrait même être remis en liberté après la décision. La logique, c'est la remise en liberté. Il ne peut pas rester en détention", déclare Me Metaxas. À moins que la décision de la plus haute juridiction ne soit mise en délibéré. Peut-il purger sa peine en France ? "L'Italie pourrait dénoncer la peine pour qu'il l'exécute en France. Mais elle ne l'a pas fait", précise l'avocat.
En cavale depuis 16 ans
Edgardo Greco vivait tranquillement à Saint-Etienne, sous un nom d'emprunt, dans le quartier Châteaucreux, où il travaillait en soirée dans une pizzeria. Âge de 63 ans, il avait pris une autre identité, celle d'un criminel originaire de la région des Pouilles. Il se faisait appeler Paolo Dimitrio. Mais celui qui se nomme en réalité Edgardo Greco est un membre présumé de la "Ndrangheta", la sanglante organisation criminelle calabraise.
Condamné à perpétuité pour deux homicides commis en Italie en 1991, Edgardo Greco était en cavale depuis 16 ans lorsqu'il a été rattrapé par son passé. Edgardo Greco s'est installé en France en 2006.
Arrestation à Saint-Etienne
À Saint-Etienne, l'homme a travaillé comme pizzaïolo dans plusieurs restaurants italiens. En juin 2021, le discret salarié avait cependant posé un article du Progrès à l'occasion de l'ouverture de l'établissement qui l'employait. Sur une autre photo plus ancienne, parue dans un journal lyonnais, il posait fièrement dans les cuisines d'un restaurant de la capitale des Gaules. Des clichés qui ne seraient pas passés inaperçus.
Après des années d'enquêtes et de recherches, les carabiniers ont fini de l'identifier et demander à leurs homologues français de procéder à son interpellation. C'est grâce à la reconnaissance faciale que le sexagénaire a été repéré par la police italienne en France. Dans la nuit du 1ᵉʳ au 2 février dernier, le Calabrais a été arrêté par la police judiciaire locale, les enquêteurs de l’Office central de lutte contre le crime organisé (OCLCO) et des carabiniers venus spécialement de Cosenza, dans le sud de l’Italie.
Une interpellation a provoqué la stupéfaction dans son quartier et chez ses connaissances stéphanoises. Ces dernières le décrivant comme une personne gentille et serviable.
Double meurtre en Italie
Edgardo Greco a été condamné en Italie à la réclusion criminelle à perpétuité pour deux meurtres et une tentative de meurtre en 1991. Il faisait partie à l'époque du clan Perna-Pranno. "Il est considéré comme coresponsable de l'embuscade du 5 janvier 1991 qui a coûté la vie aux frères Stefano et Giuseppe B. qui voulaient une plus grande autonomie et considération dans le milieu des clans de Cosenza", indiquait un communiqué des carabiniers italiens. Les victimes avaient été tuées "à coups de barres de fer dans un entrepôt de poissons (...) et leurs cadavres n'ont jamais été retrouvés", selon la même source.
Le fugitif a fait l'objet d'un mandant d'arrêt européen en 2014 du parquet de Catanzaro après sa condamnation à perpétuité.
Aujourd'hui, la justice italienne le réclame : les autorités italiennes ont officiellement demandé l'extradition du sexagénaire fin février. Mais avant cela, deux demandes de remise en liberté ont été formulées par son premier avocat, Me Courtin et refusées par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon. " Mon client souhaite rester en France. Il ", a conclu Me Metaxas. Le sexagénaire craint "des représailles" et une "vendetta". En Italie, il pourrait également être soumis à un régime carcéral extrêmement sévère (Article 41bis), réservé aux grands criminels et figures de la mafia.