La guerre en Ukraine n’en finit plus de bousculer l’Europe. Et voilà que l’Allemagne, et même la France, se remettent à parler "charbon". Un mot qui résonne tout particulièrement à Saint-Etienne. Le photographe stéphanois - Cédric Daya - lui-même petit-fils de mineur- est parti à la rencontre des dernières gueules noires en Europe. Nous l'avons suivi.
Cédric Daya est fils et petit-fils de mineur. Photographe, il consacre une partie de son temps et se son art aux gueules noires. Une manière pour lui de continuer à faire vivre ce patrimoine ligérien fortement ancré dans l'histoire des habitants et de sa famille.
Début juin, il est parti en Bosnie où les mines sont toujours exploitées pour figer cette page d'histoire toute aussi locale sur sa pellicule qui fait écho à la crise énergétique que nous traversons en raison de la guerre en Ukraine.
A la rencontre des gueules noires de Bosnie
Saint-Etienne ferme sa dernière mine en 1983. Le début des années 2000 marque l’arrêt complet de la production de charbon en France, mais pas en Europe. L’extraction de cet or noir continue sur le continent. C’est le cas en Bosnie-Herzégovine.
Par ses voyages et son art, Cédric donne une voix aux milliers de mineurs du pays. «C’est quand même impressionnant, on a beau se préparer, le vivre c’est quand même très particulier» explique Cédric. Chaleur infernale, manque d’oxygène et poumons carbonisés sont encore le quotidien de ces travailleurs. Alors que la guerre fait rage en Ukraine, la production d’énergie se tourne vers le charbon. L’activité augmente d’un cran. «Je veux montrer que tous ces gens-là ne sont pas oubliés» promet Cédric.
Des visages noircis, des casques de protections et des tunnels sombres. Cédric a immortalisé les mineurs bosniaques en pleine action. «C’est quelque chose qui me touche et j’ai envie de le partager. C’est vrai que ça parle aux gens et ils ont des choses à dire» déclare Cédric. Les réactions des visiteurs ne manquent pas dans les allées de son exposition. Les anciens se souviennent, du bruit, des odeurs, des sensations...
A Saint-Etienne, 17 000 ouvriers arpentaient chaque jour les entrailles profondes des puits. «Je rends hommage à mes grands-parents, mais au-delà de mes grands-parents, à tout une communauté, il y avait toute une communauté de mineurs, alors quand je vais faire des photos là-bas, c’est pour eux» témoigne le photographe.
Au cœur de son passé familial
En descendant dans les mines, Cédric plonge dans la vie de ses ancêtres. Son passé minier coule dans ses veines «Mon père quand il rentrait avait du charbon sur les yeux, et mon grand-père était mineur de fond au puits du Couriot ici, à Saint-Etienne». Le souvenir de son grand-père le pousse à mener son projet. «Je suis venu une fois avec lui, c’était vraiment magique, il me parlait de l’endroit, de ce qu’il avait vécu ici naturellement, sans se rendre compte de la richesse de ce qu’il me racontait» se rappelle Cédric avec tendresse. Des souvenirs ancrés dans sa mémoire depuis toujours. «Pour la Sainte-Barbe, mon grand-père accrochait et allumait systématiquement sa vieille lampe de mineur» continue-t-il, un sourie nostalgique sur les lèvres.
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Dans le second épisode de notre série "Au charbon", nous le suivons à Sarajevo et Breza, les mines bosniennes lui ont ouvert leurs portes.