Mercredi 30 septembre, une cinquantaine de personnes a occupé les locaux de la Direction du Travail à Grenoble. Le bâtiment et la salle d'attente ont été "barrés" des slogans "réinventons nos droits", ou encore "pas de culture sans droits sociaux". Le mouvement est national.
Les intermittents réclament une "indemnisation décente", "un régime juste", et l'arrêt de la baisse du budget alloué par l'Etat à la culture... Cette action s'inscrit dans un mouvement plus vaste, la première journée de grève et de manifestation nationale des intermittents du spectacle.
Des manifestations ont eu lieu dans une quinzaine de villes, à Marseille, à Paris, à Lille... Les intermittents demandent un calendrier précis de discussions sur leur régime d'assurance chômage, à la veille d'une nouvelle réunion de concertation sur la "refonte" de ce régime.
Les images à Grenoble :
"C'est la poursuite du mouvement de cet été, on n'a pas envie de lâcher, on n'a pas envie que le mouvement s'enlise, on veut des réponses", a expliqué à l'AFP Marie-Ange Janulico, comédienne et chanteuse.
Les intermittents, qui ont perturbé pendant l'été plusieurs festivals emblématiques, comme celui d'Avignon, Montpellier Danse, Rio Loco à Toulouse et le Festival de Marseille, contestent la convention d'assurance chômage signée en mars, qui durcit leurs règles d'indemnisation.
Le Premier ministre, Manuel Valls, avait réussi in extrémis à désamorcer la menace d'annulations en chaîne des grands festivals en installant une mission de "concertation", qui a travaillé tout juillet avant de suspendre ses travaux en août.
Date butoir en décembre :
Cette mission menée par trois médiateurs, dont le député PS Jean-Patrick Gille, a convoqué jeudi matin toutes les parties concernées: les signataires de la convention contestée comme le Medef et la CFDT, la CGT, non signataire, la coordination des intermittents et précaires, et les employeurs du spectacle (Syndeac).
"Autant en juillet, nous avions un bon rythme de travail, autant il faut passer maintenant à la vitesse supérieure, avec un calendrier précis et des réponses à toutes nos questions", a déclaré à l'AFP Denis Gravouil, secrétaire général de la CGT Spectacle. Le syndicat a été reçu jeudi dernier par la nouvelle ministre de la Culture, Fleur Pellerin. "Nous accueillons favorablement le fait qu'elle envisage, si la concertation n'aboutit pas, de recourir à la loi", précise M. Gravouil.
Fleur Pellerin, qui a trouvé ce dossier chaud sur la table à son arrivée fin août au ministère de la Culture, a en effet assuré la semaine dernière dans Le Monde qu'elle n'excluait pas, en l'absence de consensus, de recourir à la loi. Avant de préciser dans un second temps qu'il fallait "laisser toute sa chance à la négociation". La mission doit faire ses propositions au gouvernement avant fin décembre.
Le député Jean-Patrick Gille, qui pilote la concertation avec l'ancienne codirectrice du festival d'Avignon Hortense Archambault et l'ex-inspecteur du travail Jean-Denis Combrexelle, doit proposer jeudi "un calendrier de réunion". "On se donne tout le mois d'octobre pour voir si, en discutant, on peut faire bouger les lignes, les choses sont mûres", assure le député.
"L'aboutissement de cette concertation avant la fin de l'année semble irréaliste, le travail d'expertise n'ayant même pas commencé", relève toutefois le "Comité de suivi", regroupant la CGT, les coordinations d'intermittents, les syndicats d'employeurs du spectacle et des parlementaires.
D'un côté, le Medef et la CFDT s'opposent à une renégociation de la convention avant la date prévue de 2016. De l'autre, les intermittents et leurs représentants souhaitent des améliorations de leurs conditions d'indemnisation, comme le retour à une date anniversaire annuelle pour le calcul des droits, une meilleure prise en compte des congés maladies et maternité pour les "maternittantes".
"Il faut passer à une logique de discussion", estime M. Gille. "Soit des points de consensus ont émergé d'ici la fin de l'année, soit nous ferons des propositions", éventuellement pour légiférer.