Après les multiples révélations sur le comportement de l'Abbé Pierre, accusé d'agressions sexuelles et de viol, les communautés Emmaüs sont sous le choc. A Bussières-et-Pruns, dans le Puy-de-Dôme, la grande fresque de l'Abbé Pierre a été effacée mais bénévoles et salariés entendent continuer le combat contre la misère.
À Bussières-et-Pruns, dans le Puy-de-Dôme, l’Abbé Pierre était plus qu’un symbole. Les révélations sur ses agissements ont profondément ébranlé salariés et bénévoles. “Cela a été un drame, pour ne rien vous cacher, par rapport à mon engagement et à l’homme qu’il représentait” précise Eric Mignot, bénévole. “C’est la stupéfaction parce que c’est quelqu’un dont je reprenais les paroles” indique Chantal Charrade, présidente bénévole d'Emmaüs Bussières-et-Pruns. Un bénévole insiste : “Les bras m’en sont tombés. C’était une surprise totale”. Marie-France Mercier, bénévole, rappelle : “J’étais en colère et peinée parce que l’Abbe Pierre c’était une idole”. Fatima Parret, directrice du CADA , insiste : “On avait qu’une envie : arrêter d’être associés à lui”.
Refaire une fresque sans le visage de l'Abbé Pierre
À Bussières-et-Pruns, Emmaüs gère un CADA, centre d’accueil pour demandeurs d’asile, un chantier d’insertion et une épicerie solidaire. Sur le mur d’enceinte le visage de l’Abbé Pierre accueillait les visiteurs depuis janvier 2020. Chantal Charrade, présidente bénévole d'Emmaüs Bussières-et-Pruns, membre du conseil d'administration d'Emmaüs France, explique : “En consultant l’ensemble des bénévoles qui sont ici, on a pris cette décision de refaire une fresque, de continuer et d’imager ce que l’on fait différemment. On voulait que son visage disparaisse. C’est un choix qui a aussi été fait au niveau d’Emmaüs France, notamment sur les logos. À l’intérieur des bâtiments, tous ses portraits ont été retirés très rapidement”. Fatima Parret, directrice du CADA, raconte : “Il y avait vraiment un attachement à cette personne, à sa personnalité et à ce qu’il a fait. Le renier, du jour au lendemain, est un vrai traumatisme. C’est très compliqué pour nous. Décrocher un portrait n’est pas anodin. Je suis allée moi-même décrocher les portraits et cela a été un moment très dur”.
Continuer le combat
Tandis qu’à l’extérieur l’Abbé Pierre disparaît de la fresque, à l’intérieur, bénévoles et salariés en insertion s’affairent. Pour financer ses actions, cette association Emmaüs organise une grande vente caritative le week-end du 12 octobre. Pour tous, hors de question de baisser les bras et de renoncer à leur engagement. Eric Mignot, bénévole, souligne: “On va avoir un paquet de réfugiés climatiques donc de plus en plus de monde sur le territoire. Il faut que l’on se batte sur le terrain pour nous faire entendre et faire comprendre aux gens au-dessus qu’il y a une utilité à ce que l’on fait et surtout un besoin”.
Se rendre utile
Fatima Parret poursuit : “On ne va pas arrêter parce que notre initiateur a failli. Aujourd’hui, Emmaüs ce n’est pas que l’Abbé Pierre. Ce sont aussi 40 000 acteurs qui agissent dans le monde entier. Le combat n’a jamais été aussi important. La lutte contre la précarité et la misère est toujours d’actualité”. Marie-France Mercier, bénévole, conclut : “Je me rends compte du bien que l’on fait partout, partout dans le monde. C’est extraordinaire. J’ai l’impression d’être utile”.
Désormais, à Emmaüs Bussières-et-Pruns, c’est le visage d’un jeune garçon souriant qui nous souhaite à tous la bienvenue.