Il est président du Sommet de l’élevage de Clermont-Ferrand et “avant tout agriculteur”. Jacques Chazalet livre son sentiment sur les mobilisations d’agriculteurs en colère qui se multiplient en France ces derniers jours.
Jacques Chazalet préside le Sommet de l’élevage de Clermont-Ferrand. Très impliqué dans la vie du monde agricole, il donne son analyse sur les blocages et manifestations d’agriculteurs en colère.
Soutenez-vous ce mouvement ?
Jacques Chazalet : “On est avant tout agriculteur. On sait bien que ce qui se passe à l'heure actuelle fait suite à des problèmes récurrents depuis des dizaines d'années. Ce qui a beaucoup amplifié le mouvement, c’est l'accumulation des normes, l'incompréhension par rapport à des distorsions de concurrence flagrantes, notamment en élevage, mais aussi en production végétale, notamment dans les fruits et légumes. L’événement qui a déstabilisé beaucoup les marchés, c'est que la guerre en Ukraine a nécessité, de la part de l'Europe, une solidarité. Elle est compréhensible auprès du peuple ukrainien, mais elle profite malheureusement à certains oligarques, ceux qui tiennent l'agriculture et l'agroalimentaire en Ukraine et qui nous envoient notamment des céréales et du poulet via la Pologne. Ça a déstabilise énormément les affaires. L'agroalimentaire ukrainien n’est pas toujours très transparent. Cette colère est normale. C'est incompréhensible ce qui se passe."
Ce mouvement est-il révélateur d'une vraie crise du monde agricole ?
Jacques Chazalet : “Qu'on donne des objectifs aux agriculteurs, qui sont des entrepreneurs et qu’on vérifie que les démarches aient des résultats, c'est tout à fait normal, mais on n'est pas dans cette logique-là. On est dans la logique d'écrire des normes, des règles qui sont dictées depuis Bruxelles ou Paris. Et Paris n'a pas la capacité d’adapter les choses. On a des règles qu'il faut appliquer pour atteindre un objectif qu'on ne peut pas atteindre. Le problème c'est qu'on vous demande des choses, non pas sur les résultats, mais sur les moyens à mettre en œuvre, avec des injonctions contradictoires. Et ça, c'est insupportable. Ça fait longtemps que c'est un problème.”
Quelle pourrait être la porte de sortie pour mettre fin à ce mouvement ?
Jacques Chazalet : “Les organisations syndicales font des propositions au niveau des charges, des démarches administratives... Ce qui peut être fait dans l'immédiat, c'est les charges, les aides à la trésorerie ou aux secteurs en difficulté et la rémunération du produit agricole. Il y a 50 ans, il y avait un slogan, c'était “Mammouth écrase les prix”. Aujourd'hui c'est la grande distribution qui écrase les agriculteurs.”
Des annonces gouvernementales devraient intervenir dès ce vendredi, afin de sortir de cette crise.