Depuis septembre 2014, l'accueil de jour de Clermont-Ferrand propose à ses bénéficiaires un atelier d'écriture hebdomadaire. Il permet aux gens de la rue de raconter leur vie au jour le jour, en publiant leurs écrits sur le blog "La Rue au quotidien", hébergé par le site internet du journal Politis.
"Trois heures du matin... moi le froid, il me réveille. J'suis dans le duvet, le mec il arrive devant moi, il me regarde, il sort un couteau comme ça !", décrit Moshein. Pour cet homme de 46 ans, sans domicile fixe, raconter la rue au quotidien n'est pas un exercice des plus évidents, mais il est salutaire ! Il participe à l'atelier d'écriture de l'accueil de jour du Collectif pauvreté précarité, à Clermont-Ferrand, "pour se libérer, pour s'exprimer, pour changer, pour évoluer". "Ça te permet de pas penser à la misère", explique-t-il.
Interview de Moshein, sans domicile fixe, réalisée apr Valérie Riffard et Bruno Lebret
Les galères de la rue, mais aussi des anecdotes plus légères... ici tout se raconte. "C'est une histoire d'humains, tout simplement, avec des peines, des joies, des chagrins, des moments compliqués des moments un petit peu moins compliqués, c'est clair, et on essaie de pas rentrer dans le misérabilisme non plus !", observe la journaliste Eloïse Lebourg.
C'est pas facile de se saisir de la parole, de parler de soi, de se raconter... donc ça prend du temps, mais c'est aussi une question de confiance ! Et je crois qu'on travaille en confiance ici... (Sybille Massault, assistante sociale)
Témoigner d'un parcours difficile
Rupture familiale, dépression, abandon, perte d'emploi ou divorce, dès leur plus jeune âge ou à cinquante ans, ce n'est jamais par hasard qu'il et elles se sont retrouvés à la rue... Et du jour au lendemain pas le choix, il faut faire face. Véronique, 60 ans, se souvient : "Moi au début, j'avais des problèmes... C'est que pour dormir dehors, c'est difficile, on est pas en sécurité".Par leurs mots ou par leurs dessins, tous ont un espoir, faire changer le regard de ceux qu'ils croisent dans la rue tous les jours, comme Chris, 34 ans : "C'est difficile pour nous d'être jugés alors qu'on connaît notre parcours et on se dit : non, je ne mérite pas ça, pas d'être vu comme ça du moins!"
durée de la vidéo : 00h00mn20s
Intervenant : Chris, 34 ans, sans domicile fixe
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©INA
Écrire pour avancer
Chaque semaine, une poignée de SDF se posent un instant, ici, à l'atelier. Un répit nécessaire pour trouver la force d'avancer. "Psychologiquement, physiquement, t'es obligé de faire un travail sur toi-même, sinon tu tiens pas... Faut être fort à l'intérieur, sinon tu craques!", confie Moshein.Faut jamais baisser les bras... quand tu tombes, faut te relever! De toute façon, tu peux pas aller plus bas que terre... (Moshein, sans domicile fixe)
Publiés sur le blog La Rue au quotidien, les textes écrits lors de l'atelier et leurs illustrations ont été repérés par un éditeur et vont se transformer en livre. Un film documentaire est aussi en cours de réalisation.
Reportage : V. Riffard, B. Lebret, D. Salmon, B. Ordas.
Intervenants : Moshein (46 ans), Eloise Lebourg (Journaliste), Sybille Massault (Assistante sociale à l'accueil de jour du "Collectif pauvreté et précarité"), Véronique (60 ans), Chris (34 ans).