Clermont-Ferrand : 150 familles au tribunal dans l’affaire du vaccin Méningitec

Lundi 8 juin, un procès va s’ouvrir au Tribunal de Grande Instance de Clermont-Ferrand, celui du vaccin Méningitec. Pas moins de 150 familles seront représentées afin de demander réparation suite à la vaccination de leurs enfants. Certains ont eu des séquelles après avoir été vaccinés.
 

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C’est un procès sans commune mesure qui doit s’ouvrir lundi 8 juin, au Tribunal de Grande Instance de Clermont-Ferrand. Pas moins de 150 familles seront représentées. Les juges examineront les dossiers de patients se disant victimes du Méningitec, un vaccin contre la méningite distribué par un laboratoire situé à Cournon d’Auvergne, près de Clermont-Ferrand. Parmi ces familles de victimes, Emeline et Benoît Pierret, un couple d’enseignants des Ardennes et parents de 3 enfants espèrent enfin la vérité. Leur cauchemar débute en 2014. Leurs deux filles, Manon 6 ans et Clara 2 ans et demi, se font vacciner.

Des vomissements et des boutons

Emeline raconte : « A partir du moment où ils sont recommandés, on imagine que les vaccins sont fiables. C’est notre médecin généraliste qui a fait l’injection. Au bout d’une quinzaine de jours, Manon s’est mise à vomir. C’était fluctuant et ça a duré un an comme ça, elle vomissait sans que l’on comprenne ce qui n’allait pas. C’était le jour et la nuit. Clara a eu des plaques de boutons ». Elle ajoute : « C’est en voyant un reportage à la télévision fin septembre 2015 que j’ai pu faire le lien avec le vaccin. Je me suis rendue compte que les symptômes décrits par les parents étaient les mêmes de nos deux filles. A la suite de cela, je me suis renseignée. J’ai rejoint leur action en justice. Un interne a soupçonné une intoxication aux métaux lourds. La seule méthode qui nous paraissait raisonnable était le régime sans gluten et sans lactose. Ca a marché. Manon a beaucoup moins vomi et pour Clara les éruptions de boutons se sont atténuées considérablement. Pour l’ainée, après un an et demi de vomissements fréquents, les symptômes ont disparu progressivement. Il a fallu deux ans et demi pour réintroduire le lait par exemple. Mais quand les expertises sont arrivées, on n’était pas restés les bras croisés et forcément nos filles allaient mieux ».

L'étape des responsabilités

Les expertises seront au cœur des débats du procès de Clermont-Ferrand. Maître Emmanuel Ludot, qui représente les 150 demandeurs, rappelle l’importance du procès : « La première audience qui a eu lieu avait pour but de faire désigner des experts pour chaque cas d’enfant malade, afin de vérifier le lien entre la pathologie dont souffraient ces enfants et la vaccination par le Méningitec. C’est un vaccin contre la méningite. Il y eu 3 experts par enfant, un pédiatre, un pharmacologue et un toxicologue. Il y a autant de rapports d’expertise qu’il y a d’enfants. Ces expertises ont été déposées au greffe et nous avons pu préparer la dernière étape, celle des responsabilités. C’est le débat de lundi 8 juin ».

Un scandale sanitaire

Pour l’avocat inscrit au barreau de Reims, il s’agit-là d’un véritable scandale sanitaire. Il indique : « Le scandale commence lorsque l’autorité de santé, l’ANSM, Agence nationale de sécurité du médicament, lance une alerte en demandant aux pharmaciens de retirer de la vente tous les lots des vaccins  Méningitec avec une date du 24 septembre 2014. Les pharmaciens vont respecter plus ou moins bien ce retrait mais ils vont surtout oublier d’avertir les familles qui avaient acheté le vaccin avant le 24 septembre, mais qui n’avaient pas encore injecté le vaccin. Cette alerte vient du laboratoire lui-même, CSP, qui a découvert des anomalies de fabrication, des traces d’oxyde de fer, et qui par précaution, décide de le signaler. A partir de là les familles vont expliquer qu’à l’occasion de ce vaccin, dans les semaines ou les jours qui ont suivi, il y a différents effets secondaires plus ou moins inquiétants, avec des gravités plus ou moins différentes. Ce que je pointe c’est le fait que l’on s’aperçoit que le moindre vaccin en France, est issu de la mondialisation. Pas moins de 5 laboratoires se sont succédés, entre celui qui a le brevet, celui qui le vend à plusieurs reprises, celui qui fabrique, celui qui commercialise. On a plusieurs pays touchés : l’Allemagne, la Suisse et l’Espagne. Les laboratoires se rejettent les responsabilités car il y a des négligences à toutes les étapes. La France et l’ANSM ne contrôlent plus rien, c’est ce qui s’est passé ».

Le rôle des pharmaciens

L’avocat pointe aussi du doigt une série de défaillances, notamment de la part des pharmaciens : « Les pharmaciens n’ont pas été très regardants sur l’alerte donnée. Ils ont reçu des mails, des faxs mais certains d’entre eux, par oubli, ou par négligence, n’ont pas fait leur travail. Certains ont continué à le vendre, et d’autres n’ont pas pris la précaution d’appeler les parents et leur demander de rendre le vaccin. Cette première barrière sanitaire a été poreuse ».

Le procès de ces notices fourre-tout

Désormais les familles attendent enfin des réponses. « Les familles attendent non pas le procès des vaccins mais on est là pour faire le procès d’un manque de vigilance qui doit être de tous les instants. On a des expertises qui ne répondent pas aux questions. Les pathologies sont considérées comme répertoriées dans la notice. On leur dit que ces maux de tête, ces vomissements, ces diarrhées, vous les avez dans la notice, donc il n’y a pas lieu de se plaindre car vous avez été prévenus. Le vaccin est obligatoire. Ce n’est pas parce qu’il y a une notice qu’on n’a pas le droit d’éviter ces effets secondaires. C’est donc le procès de ces notices fourre-tout. Les laboratoires ouvrent le parapluie en disant que les familles ont été prévenues. C’est aussi le procès d’expertises qui n’ont pas donné toutes les réponses. On a le sentiment que les experts veulent être dans le moule pour éviter d’être stigmatisés comme étant des anti-vaccins primaires. On a des expertises décevantes. Ma demande est claire : je demande pour chaque parent un préjudice d’anxiété. On a fichu une peur à ces parents liée au retrait des lots, lancée par le laboratoire. Cette peur-là doit être indemnisée » confie l'avocat. 

Un mea culpa ce serait bien mais on n’est pas très optimiste

Emeline Pierret confirme également qu’elle attend beaucoup de ce procès : « On espère avec le procès obtenir des réponses, essayer de faire bouger le système médical français. Un mea culpa ce serait bien mais on n’est pas très optimiste. C’est un vrai scandale sanitaire et il n’y a aucune clarté ». Maître Emmanuel Ludot précise : « Les familles ne sont pas dans la colère, la revanche, l’anti-vaccin primaire. Elles veulent boucler la boucle et souhaitent terminer leur démarche judiciaire dans les conditions les plus favorables pour leurs enfants ».

Une vertu pédagogique et aussi cathartique

Anne Robert, première vice-présidente du Tribunal de Grande Instance de Clermont-Ferrand, rappelle les attentes des familles : « Une page sera tournée c’est l’intérêt du procès. Cela fait très longtemps que la procédure a commencé. Les expertises ont mis des années à être rendues. Les personnes ont besoin que justice passe enfin ». Elle souligne le caractère hors norme de ce procès : « Ce qui fait le caractère exceptionnel de l’audience c’est déjà le contexte dans lequel elle se tient, un contexte d’urgence sanitaire, et cela n’était pas prévu quand on a fixé la date des plaidoiries. La deuxième difficulté est que c’est un procès civil, non pas pénal, qui compte plus de 150 demandeurs. Il n’y aura pas de condamnation au sens de peine, et éventuellement des condamnations à titre de réparation. Le procès ne sera pas filmé. C’est interdit. Les plaidoiries seront maintenues pour une vertu pédagogique et aussi cathartique. On n’a pas de salle pour accueillir 150 demandeurs en respectant les distanciations sociales. On a fait le choix, de façon concertée avec les avocats, que ce soit uniquement eux qui représenteraient les justiciables et les laboratoires. C’est la première fois que l’on a autant de demandeurs à Clermont-Ferrand ». Le procès doit débuter lundi 8 juin à 9 heures. Le jugement sera ensuite mis en délibéré. Nous avons contacté l’avocat du laboratoire incriminé mais il n’a pas répondu à notre demande d’interview.

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