Clermont-Ferrand : « La cabine vous appelle » ou comment des comédiens jouent des textes au téléphone

Du 6 au 14 juin, dans le cadre des Anatolies, à Clermont-Ferrand, des comédiens vont jouer des textes au téléphone. Une manière inédite de proposer un spectacle mais surtout une réponse à la crise sanitaire liée au coronavirus COVID 19.
 

Le théâtre c’est simple comme un coup de fil. Telle pourrait être la devise de cette opération. Du 6 au 14 juin, à Clermont-Ferrand, dans le cadre des Anatolies, des comédiens vont jouer des textes au téléphone. La prestation s’effectue après avoir pris un rendez-vous parmi les créneaux proposés. « La cabine vous appelle » est une nouvelle forme de théâtre qui s’adapte aux contingences liées à la crise sanitaire du coronavirus COVID 19.

Un projet alternatif

Dominique Freydefont, metteur en scène et directeur artistique, explique : « Avec ce projet alternatif nous continuons à nourrir le lien avec les publics. On a réfléchit à ce que l’on pouvait faire, on ne voulait pas ne rien faire, il y a 50 artistes et techniciens embarqués dans cette affaire. Il y a aussi les publics en attente. On a réfléchi et on a pensé à cela. Le théâtre de la Ville et de la Colline avaient eu des expériences un peu voisines. Ce n’est pas une mince affaire mais c’est tout à fait passionnant ». Les artistes ont planché sur le projet depuis le mois de novembre. Ils se devaient de proposer quelque chose, à l’occasion de la 21e édition des Anatolies. Sophocle, Despentes, Tchekhov, Racine, Molière, Ribes, ou encore Bergman, le répertoire des textes choisis est vaste.

Une cinquantaine d'artistes 

Dominique Freydefont explique le fonctionnement de l’opération : « Concrètement il y a une cinquantaine d’artistes qui ont travaillé sur des textes divers et variés. On avait commencé à travailler pour les Anatolies. On a attribué les textes aux comédiens par téléphone et en présentiel. On s’apprête à faire un super Doodle pour mettre en place l’inscription de nos publics. Ils cliquent sur « La cabine vous appelle », choisissent un jour, un créneau horaire. Un comédien leur lira ensuite un texte ».

De nouvelles contraites pour le comédien

Et le comédien dans tout cela ? Ce projet alternatif l’oblige à revoir profondément sa façon de jouer. Dorian Sauvage est comédien. Il participe depuis 5 ans aux Anatolies. Il souligne : « Ca change pas mal de chose. J’ai toujours travaillé sur scène avec des contraintes physiques et vocales induites par la salle de spectacle, la projection de la voix, l’articulation, la surarticulation si besoin. Par téléphone, on est dans quelque chose de plus intime, avec une diction plus simple. On a forcément beaucoup moins recours à la projection. C’est un exercice plus difficile, il faut que l’on se retrouve avec un quasi dénuement vocal et corporel, il faut être concentré et simple ».

Voici un exemple de texte interprété au téléphone par Dorian Sauvage.

Une très grande concentration requise

Son metteur en scène confirme :  « C’est drôlement dur pour le comédien. Ce n’est pas un exercice pour lequel nous sommes formés. Cela peut s’apparenter à une dramatique de France Culture, sauf que nous sommes en direct. Il y a une relation directe entre l’acteur et le spectateur, il va déverser à son oreille des mots. C’est une chose intime. C’est un ailleurs et maintenant, très troublant. Cela nécessite une très grande concentration. Cette parole doit être presque chargée d’affection. C’est une relation sensible, poétique et spirituelle ». Une relation nouvelle qui laisse imaginer des réactions de la part des spectateurs derrière leur téléphone. Dorian Sauvage précise : « Quand on a travaillé les uns et les autres par téléphone, on a remarqué que l’on n’avait pas le regard, pas de réceptacle. Peut-être que l’on entendra des rires ou des soupirs, des respirations. On va être dans un exercice qui va être proche de la radio ».

Faire face à la crise sanitaire

Cette façon inédite de jouer constitue également un moyen de montrer que le monde culturel peut s’adapter et apporter des réponses face à la crise sanitaire. Dominique Freydefont ajoute : « Les propositions qui nous sont faites sont compliquées : un rang sur deux, un fauteuil sur deux, des masques, c’est complètement fou. On a trouvé ce petit moyen d’être en relation avec le public, pour être dans le maintenant ». Etre dans le maintenant, c’est aussi le souhait de Dorian Sauvage. Le comédien qui s’apprête à jouer au téléphone du Brecht, du Marivaux, du Tchekhov et du Shakespeare, conclut  : « Ce qui est chouette dans cette démarche, au-delà de faire vivre les Anatolies, c’est la volonté des artistes de repenser notre métier et d’essayer de se maintenir hors de l’eau. Au-delà de la déception de ne pas jouer un spectacle, c’est aussi une partie de notre métier qui est en train de foutre le camp. La culture est la dernière roue du carrosse. Ca fait du bien de montrer que l’on est en vie, que l’on fait notre métier. On existe encore ».


 
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