Le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand a condamné Michelin Air Services (la compagnie aérienne du groupe) lundi 1er avril pour licenciement abusif, discrimination sexuelle et harcèlement moral et sexuel sur une ex-salariée. La société doit verser près de 630.000 euros à la plaignante.
Discrimination sexuelle, harcèlement moral et sexuel, licenciement abusif : telles sont quelques unes des qualifications pour lesquelles le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand a condamné Michelin Air Services, lundi 1er avril. La filiale de Michelin qui assure les navettes aériennes entre les différents sites du groupe a été condamnée à verser près de 630.000 euros à la plaignante.
Tout commence en 2012. En accédant au cockpit des avions de la compagnie, la jeune femme, alors âgée de 29 ans, vit un rêve. “Elle a été hôtesse de l'air, elle a toujours voulu piloter” raconte Maître Emmanuelle Richard, son avocate. “Ses parents se sont endettés pour ça. Elle a passé sa licence de pilote, elle a travaillé dans plusieurs compagnies aériennes jusqu'à être embauchée par Michelin Air Services."
Seule femme pilote de la société, elle se rend compte qu’elle n’est pas traitée comme ses collègues masculins : “Le même jour, un homme d'expérience similaire a été embauché avec un salaire bien supérieur. Ensuite, à chaque fois qu'il y avait possibilité de progresser, c'était toujours les hommes qui passaient en premier” indique Maître Emmanuelle Richard.
A cela s’ajoutent des faits de harcèlement. “Un représentant de la société faisait énormément de blagues sexistes, se collait dans le dos d'une de ses collègue pour l'embrasser dans le cou. Au bout de quelques temps de provocations sur ses vêtements, il y a eu un incident et il est devenu très agressif à l'égard de ma cliente. Ensuite, ça a été la descente aux enfers. Etant responsable des opérations de vol et de la formation, il a fait tout ce qui était en son pouvoir pour la faire craquer. Des mensonges pour la faire venir, pour lui hurler dessus, l’invention de tests qui n'existent pas … Il a voulu en faire une pleureuse, une pleurnicheuse. Elle a tenu autant qu'elle pouvait jusqu'à ce qu'elle soit arrêtée pour dépression.” En juin 2017, elle est licencié pour inaptitude. “Les délégués du personnel avaient informé la direction. Pourquoi n'a-t-on pas pris la mesure des choses avant ?”Il a fait tout ce qui était en son pouvoir pour la faire craquer
“Elle a également été déclarée inapte par l'aviation civile. Elle ne pourra plus jamais piloter un avion." précise l'avocate, qui a donc plaidé la "perte de chance d'une carrière entière".
Face aux éléments qui lui ont été présentés, le conseil de prud’hommes a condamné Michelin Air Services à verser près de 630.000 euros à la plaignante, dont près de 34.000 pour la perte économique due à la discrimination sexuelle, 50.000 euros pour le harcèlement moral et sexuel, 100.000 pour la perte de sa licence de pilote et 300.000 en réparation de ”la perte de chance d’exercer le métier de pilote”. La juridiction a ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Le groupe Michelin n’a pas souhaité faire de commentaire sur le fond de l'affaire à ce stade. L’entreprise envisage de faire appel sur tout ou partie de la décision.