Coronavirus : au coeur de l'unité COVID-19 du CHU de Clermont-Ferrand

Au CHU de Clermont-Ferrand, les soignants constatent une décrue du nombre de patients hospitalisés pour coronavirus COVID-19. Ils racontent la manière dont ils affrontent cette épidémie.

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Au CHU de Clermont-Ferrand, depuis quelques jours, la tension est un peu retombée. "Ce que l'on peut dire, c'est que on est dans un période un peu plus calme que celle que l'on a connue il y a une quinzaine de jours." explique Henri Laurichesse, chef du service des maladies infectieuses et tropicales. "La deuxième quinzaine de mars et la première quinzaine d'avril, on a eu un pic avec un service qui était plein à 100 % de COVID-19. Là, on a un petit peu moins de patients ..."

90 patients COVID au plus fort de la crise

Pour affronter la crise, trois services ont été dédiés aux patients COVID-19. "On avait notre service, ce qui fait déjà 24 lits. Il doit y avoir une vingtaine de patients au service post-urgences, ça fait 40 plus 10 en cardio, ça fait 50. Il faut compter les réanimations, donc au pic, on a pu monter à 70, 80, voire 90 patients." Dans le service de Claire Dupuis, médecin-anesthésiste, les gardes sont passées de 8 à 12h. Un ancien chef de service jeune retraité est venu prêter main forte. Pour elle, la préparation de l’hôpital a permis d’éviter qu’il soit submergé.  "Il y avait quand même tout un plan en amont dès qu'il y a eu les premiers cas COVID au mois de mars. Il y avait une cellule de crise et un plan d'accueil des patients qui prévoyait largement plus de 60 lits de réanimation." Le pic a eu lieu le week-end du 23 et 24 mars, avec l’arrivée de patients transférés d’autres régions. "Ils sont arrivés tous en même temps : 10 patients un week-end. Ça a donné beaucoup de travail à tout le monde !"
 
Lorsque les patients sont arrivés, ce ne sont pas les symptômes qui ont surpris Claire Dupuis. "Ce ne sont pas des choses qu'on n'avait jamais vues. Des patients qui ont des grippes graves ont les mêmes tableaux de détresse respiratoire. Là, ce qui surprend, c'est le nombre de patients qui sont très graves, intubés, ventilés à 50 ans sans comorbidité."

Dans le service du professeur Laurichesse, quelques personnes jeunes ont été hospitalisées "mais ça n'est pas la règle. Ce sont plutôt des adultes avec un profil "retraité", entre 60 et 80 ans. Les facteurs de risque ne sont pas spécifiques : on a l'âge, le poids, les maladies cardiovasculaires ... Quelles que soient les maladies, on retrouve toujours ces facteurs-là. Ça correspond aussi à la population. Et puis il y a un biais de notre côté : les gens qui sont hospitalisés sont ceux qui ont déjà une forme grave."

Le confinement nous a pleinement profité

Pour le professeur Laurichesse, l’Auvergne s’est est bien sortie jusqu’ici avec une épidémie de faible ampleur. "On a eu des circonstances favorables et le confinement nous a pleinement profité car lorsqu'il a été décrété, on avait encore peu de cas et c'était tous des cas importés. On s'était aussi organisés. On avait des réanimations dédiées, des services dédiés, un travail de tri important aux urgences, un centre de prélèvements. Du coup, il y a eu un peu de fluidité ce qui fait que ça a pu contribuer au fait que l'hôpital ne soit pas trop en difficulté."

Autre élément qui a aidé le CHU à passer le cap : l’absence subite des patients habituels avec une fréquentation des urgences divisée par trois. Alors qu'elles géraient jusque là entre 150 et 170 passages par jour, le chiffre est tombé à 50. "Il y a eu une sorte de sidération de la population qui est assez étonnante soit par peur de se rendre sur un lieu de soin, soit parce qu'ils étaient obsédés par le virus. C’est assez curieux et ça continue : les radiologues en ville ne voient personne, les médecins ne voient personne. Nous on reprend les consultations. On a incité par voie de presse les patients suivis par les différentes filières à revenir parce qu'on est inquiets de savoir ce qu'ils deviennent." Cette réduction d’activité a en tout cas permis à l’hôpital clermontois de délocaliser du personnel et de renforcer les unités dédiées.

C'est un stress pour les soignants

Ces renforts se sont révélés précieux, car travailler au chevet des patients COVID-19 demande un investissement physique et psychologique plus important que d’habitude. "On a renforcé l'équipe soignante, ce qui fait qu'il y a plus d'infirmières par patients. Elle s'entraident pour appliquer les consignes d'habillage et de déshabillage après le passage dans chaque chambre, avec la surblouse, la casaque, les lunettes voire les double lunettes, voire une visière, des gants ... Il y a beaucoup de temps passé à se préparer à rentrer dans la chambre et après quand on en sort. C'est quand même un stress pour les soignants, une lourdeur de soins assez importante et une forme de tension, même si ce sont des professionnels. On a l'habitude en maladies infectieuses d'isoler des patients avec la grippe, la tuberculose, une varicelle, mais là, c'est un isolement plus strict encore car on sait que le virus est très contagieux."

Malgré ces précautions, une vingtaine de membres du personnel du CHU ont été infectés, mais il est difficile de retracer l’origine de la contamination qui a pu intervenir à l’extérieur de l’établissement.
 

Pas de tensions sur le matériel, mais des alertes sur les médicaments

Dans l’hôpital clermontois, le matériel de protection, indispensable, semble avoir été suffisant. "Pour tout ce qui est masques, visières, lunettes, les collectivités locales nous ont fourni très rapidement." raconte Claire Dupuis "On n’a pas eu de souci non plus avec les respirateurs, ou la dialyse." Pour elle, les seules tensions rencontrées ont concerné les médicaments : "on a eu des alertes de la part de la pharmacie disant que les dotations étaient rationnées avec des recommandations pour essayer de minimiser les utilisations des différents produits, mais on ne l'a pas ressenti au lit du malade."

Aujourd’hui, au CHU de Clermont-Ferrand, l’heure est à l’amélioration. "Il y a à la fois moins d'hospitalisations, des malades qui sortent de réanimation, d’autres qui rentrent chez eux, qui sont rapatriés dans leur région d'origine, donc on a l'impression que l'activité diminue un peu. On est contents de voir des gens qui vont bien." se félicite Henri Laurichesse. "C'est probablement l'effet du confinement qui a ralenti la transmission du virus." Claire Dupuis fait le même constat : "En termes de nouveaux patients, on a eu des suspicions cette semaine mais finalement il y en a très peu qui sont confirmées. La majorité des patients en ce moment sont des patients qui sont intubés depuis plus de deux semaines et qui sont en cours de sevrage ventilatoire."
 

"Il faudra généraliser le port du masque"

A présent, l’inquiétude du professeur Laurichesse porte plutôt sur l’avenir. Même si leur nombre est plus faible, de nouveaux cas sont encore détectés et le virus ne va pas disparaître en mai. "Il circule moins qu’en région parisienne car on a un habitat qui est dispersé, mais il circule et il va continuer à circuler. Je crois qu'il faut vraiment que les Clermontois et les gens qui vivent dans les milieux urbains, qui utilisent les transports, qui vont retourner au travail se protègent. Si le 11 mai, les personnes ne mettent pas en place les précautions qui leurs sont demandées, à savoir le port du masque généralisé, on va aller à la catastrophe."
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