DOCUMENTAIRE. "Il y a des jours où c'est à pleurer" : "La fabrique du soin" ou comment faire coexister humanité et contraintes budgétaires à l'hôpital public

C'est une immersion totale au sein du CHU de Clermont-Ferrand que propose le film de Marion Angelosanto. Tourné en 2021, "La fabrique du soin" nous plonge dans les entrailles de l'hôpital, des sous-sols au dernier étage à la rencontre des personnels et de leur direction. Un film choral qui décrit un hôpital-entreprise coincé entre injonctions économiques et fabrication du soin. Ce film a obtenu le prix "Autrement vu" 2022 au FIGRA (festival international du grand reportage d'actualité).

Que dire de plus sur l'hôpital public que nous ne savons déjà ? Les contraintes budgétaires portées par l'économie libérale ? Le manque de personnels ? Le manque de lits ? La surchauffe des services de réanimation en plein Covid ? Les piquets de grève ? 

Tout cela a été montré et raconté des centaines de fois. Mais ce qui n'a jamais été fait, c'est filmer l'hôpital comme une société au travail. Et c'est tout le propos du film de Marion Angelosanto. En pleine crise sanitaire et politique, le CHU de Clermont-Ferrand lui a ouvert ses portes, toutes ses portes. Ici l'hôpital se raconte à la première personne dans la voix de Daniel Pennac et s'incarne dans les visages de Laëtitia, cadre de santé, de Christophe délégué CGT, de Benoît chirurgien, de Mathieu pédiatre-réanimateur, de Didier directeur général et de bien d'autres encore.

10% du personnel soignant est en arrêt maladie et seulement un personnel sur deux est remplacé.

" Pour diriger un hôpital public, il faut vraiment avoir la foi. Il y a des jours où c'est à pleurer."

Le directeur du CHU

" Pour diriger un hôpital public, il faut vraiment avoir la foi. Il y a des jours où c'est à pleurer. C'est vraiment très dur. C'est comme tenir un front avec un seul régiment alors qu'on a besoin de 18 divisions. Pourtant on tient le front et une fois encore on va s'épuiser à le tenir"  confie le directeur général du CHU.

De l'épuisement, il y en a beaucoup. Tout comme de la débrouille, du renoncement et de la souplesse. Beaucoup de souplesse même, chez les soignants.

Parce que le miracle est là, dans cette petite phrase de Laëtitia, cadre de santé en chirurgie digestive. Elle passe une partie de ses journées à courir après les lits : " Prendre soin des gens, c'est une énergie folle. Nos patients ne sont pas des boites de petits pois ! Mais on y arrive toujours..."

Dans l'hôpital d'aujourd'hui, il faut produire du soin à la chaine et sur mesure. Pour opérer il "faut prendre un ticket à la régulation du bloc et attendre qu'il y ait une place" comme dit Benoît professeur en chirurgie.

Malgré toutes les tensions, les négociations, les revendications, ce qui se vit au milieu de tout ça, ce sont  l'humanité, la fierté, "l'amour du métier et la solidarité parce que nous sommes une équipe" dit Rose-Marie, cadre de santé, s'arrachant la tête dans ses plannings.

Rappeler que le cœur de métier de l'hôpital public est de soigner du premier au dernier souffle, de former les nouvelles générations de soignants et de trouver les moyens de les garder. Montrer de près une réalité où l'humanité tente de coexister avec les injonctions contradictoires des politiques de santé publique. "La fabrique du soin" est tout cela. Un film utile et remarquable.

"La fabrique du soin" un film de Marion Angelosanto (coproduction Crestar/La clairière ouest/ Francetv), le jeudi 6 avril à 22H45 sur france3 Auvergne-Rhône-Alpes dans la case documentaire La France en vrai et déjà disponible en replay sur france·tv

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