Les rumeurs vont bon train autour de l’état de santé de Kate Middleton et du cancer du roi Charles III. Photo retouchée, théorie de divorce, voire de décès, un historien décrypte l’emballement médiatique autour de la famille royale anglaise.
Les rumeurs et théories se multiplient autour de la famille royale britannique. L’opération, puis la convalescence de Kate Middleton, l’annonce du cancer du roi Charles... Pour beaucoup d’internautes, il s’agit de l’arbre qui cache la forêt. Après la diffusion d’une photo retouchée de la princesse avec ses enfants, internet s’emballe. Infidélité, divorce, décès, toutes les théories sont mises sur la table. Johan Picot, historien près de Clermont-Ferrand, qui étudie de près la famille royale, calme le jeu : “Le temps long nous donne toujours des leçons de morale. Arrêtons tomber dans les travers de notre époque, c'est à dire l'injonction à l'immédiateté qui nous crée des tas de rumeurs. C'est beaucoup de bruit pour rien. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a rien de vrai.”
"On nous donne des informations capitales"
Pour lui, Buckingham ne dissimule aucune information importante. C’est même le contraire : “Qu'il s'agisse de la princesse ou du souverain actuel, on a une étape qui est quand même assez intéressante historiquement, c'est que Buckingham a communiqué sur leur état de santé en amont. Ils l'ont annoncé, ce qui est une petite révolution dans l'histoire de la monarchie et une petite révolution dans le monde de la politique au sens large. Rappelons-nous, quand la Reine est décédée, avant 14 heures et une dépêche AFP, on ne le savait pas. Pour le cas français, si on veut comparer avec des hommes d'État, que ce soit le décès de Pompidou ou Mitterrand, on s'est retrouvé devant le fait accompli. On n'avait pas de bulletin de santé. Il y a une révolution de communication. On nous donne des informations capitales. L'une est malade, elle est en convalescence. L’autre, le souverain, est malade, il a un cancer qui est pris en charge, point. Je ne sais pas ce que les gens veulent de plus.”
"Est-ce qu'il est bien utile et légitime qu'on en sache plus ?"
Pour lui, les explications données par la famille sont suffisantes : “Kate a disparu ? Oui, mais on a été prévenu ! Ils nous ont prévenu qu'elle était malade, elle s'est fait opérer. Est-ce qu'il est bien utile et légitime qu'on en sache plus ? C'est une princesse, elle se fait opérer de quelque chose. De quoi, est-on censé savoir ? Je ne suis pas sûr. Est-ce que ce n'est pas du voyeurisme ? Elle donne des signes de vie, je ne sais pas ce qu'on aimerait savoir de plus. J'ai l'impression que les populations attendent toujours plus. Dans ce cas, ce serait la localisation de l'intervention pour l'une et de la maladie pour l'autre”, indique Johan Picot. Selon cet historien, c’est les passions que déchaîne la famille royale, qui expliquent en partie cet emballement : “Le peuple se sent concerné parce que c'est la famille royale anglaise. Elle a une particularité par rapport à d'autres monarchies, c'est qu'elle est extrêmement adulée, appréciée, adorée. On voit bien que la réaction populaire collective est dans l'émotion, elle n'est pas dans la raison.”
Une photo retouchée
Mais alors, pourquoi diffuser une photo retouchée si l’on n’a rien à cacher ? Là aussi, Johan Picot a une explication, qui se veut plus rationnelle : “Vraisemblablement, Kate a fait une photo pour répondre à une attente. Elle l’a mal fait. Elle s'en est excusée. Depuis, elle a été aperçue, elle est bien en vie. Je crois qu'il faut arrêter là ce petit emballement médiatique. Le problème vers lequel on va aujourd'hui, c'est que très vite, on va commencer à dériver vers des théories conspirationnistes. La rumeur appelle le doute, le doute, la méfiance, la méfiance, le complot. Ce que nous dit la raison, c’est qu’on a une femme qui est malade, qui vraisemblablement sent une pression et publie une photo pour rassurer les gens. Elle n'a peut-être pas envie de mettre une photo d'elle où elle parait malade, avec des cernes et je ne sais quoi. Pas de chance, la retouche est grossière.”
Des retouches historiques
D’ailleurs, Johan Picot présente un fait étonnant. La princesse ne serait pas la première figure de la royauté à retoucher les photos transmises à la presse, contrairement à ce qui a pu être dit : “Il y a un précédent. Les photos trafiquées, ce n'est pas la première fois dans l'histoire de la monarchie. La spécialiste de la photo retouchée et trafiquée, qui a inventé le Photoshop avant l'heure, c'est la reine Victoria. La reine d'Angleterre, qui est née en 1837 et a connu l'invention de la photographie, se faisait tirer le portrait tout au long de sa vie. On a des dizaines, des centaines de photos d'elle et elle faisait retoucher les plaques de verre et les négatifs pour se faire amincir le corps, amincir le double menton... Elle faisait recorriger les négatifs avant que les portraits officiels soient imprimés.”
Concomitance de faits majeurs
Johan Picot comprend néanmoins les doutes autour de ces faits : "On craint qu'il y ait un effet d'annonce parce qu'il y a, peut être sur le coup du hasard, la concomitance de faits majeurs. On a un monarque qui est malade et qui annonce sa maladie alors qu'il vient à peine de prendre la charge. Mais ce n'est pas un jeune monarque, c'est un homme âgé. Il est jeune pour être l'incarnation de la couronne, parce que ça fait un an qu'il règne, mais c'est un homme qui a plus de 70 ans, donc il n'y a rien d'exceptionnel. On a une princesse royale qui est malade et qui se fait opérer quelque chose, avec une convalescence de 2 à 3 mois. Rien d’anormal non plus.” Ce serait donc, selon lui, l’annonce de nouvelles importantes en peu de temps qui intriguerait les gens.
Un "choc" après le décès de la reine
La monarchie a été très fortement ébranlée par le décès de la Reine Élisabeth, qui était l'incarnation du continuum de la monarchie, avec un règne jamais égalé dans la durée. Pour Johan Picot, c’est l’origine de la crise actuelle : “Elle incarnait la constance. On est un peu comme un canard sans tête. On est dans le changement, on a un souverain qui arrive, qui est âgé... Je pense que ça perturbe les gens. En plus, il est malade en même temps que la princesse de cœur, l'épouse de William, qui est adorée de tout le monde. Et n'oublions pas la querelle qui n'en finit plus, avec les 2 princes, c'est le choc. C'est 3 générations qui ont vécu dans une constance et là, d'un coup, en 2 ans, une famille qui se disloque, un prince qui s’en va, un nouveau roi, une princesse qui est malade, un roi qui est malade. Ils ont l'impression que c'est la fin du monde. Ce sont 3 générations qui sont nées sous Élisabeth !”
"Pour les Anglais, c'est normal"
Pour lui, notre point de vue outre-Manche ne doit pas être pris pour argent comptant. Il prend ainsi l’exemple de la succession : “Charles III a l'air d'être un roi parfaitement adapté à la situation. Il y a 25 ans qu’il milite pour l'écologie, pour la planète. Il est très en avance sur plein de choses. Les Français ne peuvent pas regarder et comprendre. Quand Charles III a accédé au trône, il a eu une adhésion intégrale du côté anglais, les Anglais n'ont absolument pas douté de ses capacités. Il n’y a qu'en France que les médias se sont interrogés : sera-t-il capable, va-t-il rester ? Mais à aucun moment Charles III n'a envisagé d'abdiquer pour son fils. Dans sa tête, c'est normal. Pour les Anglais, c'est normal. C'est dans la continuité. Il n’y a bien que les Français pour ne pas comprendre le concept de monarchie !” plaisante l’historien.
Plus de transparence
Pour lui, donc, il n’y a pas de raison de s’attendre, plus qu’avant, à des annonces importantes : “Ce que je viens de vous dire n'exclut pas qu'il y ait des bouleversements, mais pour moi, ce ne sont pas des gages des garanties d'annonce pour autant. Buckingham a été plus transparent que jamais en fait. Ce qui nous manque, c'est la localisation de l'opération pour l'une et du cancer pour l'autre.” La clinique londonienne où la princesse Kate a été opérée en janvier enquête depuis mercredi sur le fait qu’au moins un membre du personnel de cette clinique huppée aurait été surpris en train d'essayer d'accéder au dossier de Kate. L'organisme de surveillance et de protection des données, l'Information Commissioner's Office, a dit avoir "reçu un rapport de violation" et être "en train d'évaluer les informations fournies". Selon des médias britanniques, Kate ne devrait pas reprendre ses fonctions publiques avant la mi-avril.