INSOLITE. A la rencontre d’Ugo, le cycloplombier de Clermont-Ferrand

Depuis quelques mois, Ugo Angileri s'est installé comme plombier à Clermont-Ferrand. Son originalité : il ne se déplace qu'à vélo, alliant sa passion du deux-roues à son métier. Rencontre avec un plombier heureux.

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Casque vissé sur la tête, matériel embarqué, Ugo Angileri se faufile à travers les rues de Clermont-Ferrand. Au guidon de son vélo-cargo à assistance électrique, il ne passe pas inaperçu. Ce jour-là, il arrive sur son chantier de la rue Anatole-France et se gare sans difficulté. Il est artisan plombier et se baptise lui-même « cycloplombier ». Un néologisme qu’il aime utiliser et qui définit bien son métier de plombier à vélo. Agé de 31 ans, il raconte : « J’ai monté mon entreprise en septembre 2020. Avant, j’étais salarié dans l’entreprise familiale pendant 7 ans. J’ai voulu me mettre à mon compte. Je travaillais en famille et à un moment j’ai eu envie de voir autre chose. J’ai lancé cette entreprise à vélo. J’avais vu sur Internet des plombiers à vélo à Paris, à Lyon et dans des grandes villes françaises. Ca m’a bien plu car j’adore le vélo et je suis plombier. J’ai allié les deux, ma passion et mon métier, pour faire de la plomberie à vélo. J’ai vu qu’il était possible de travailler à vélo ».

Il faut une très bonne organisation sinon on est vite dépassé

Ugo se déplace sur l’agglomération clermontoise et ses alentours. « Je peux aller jusqu’à Ceyrat et Orcines. Je vais tester un peu. Je regarde ce qui est possible de faire. Je vais faire un chantier cet été à Châtel-Guyon. Ca va faire une petite trotte. Ca sera le maximum je pense. Je veux faire 10 à 15 km autour d’Aubière, où j’habite », explique-t-il. Avec son vélo, il doit embarquer tout ce dont il a besoin sur le chantier. Ugo indique : « J’ai le minimum vital sur mon vélo et j’en ai même un petit peu plus. Il faut toujours prévoir un peu plus. Je suis capable de faire les dépannages courants. Je pars avec au minimum 30 kg de matériel. Ca tire parfois un peu au niveau des cuisses mais avec les vélos électriques, on ne force pas plus que ça. Ca permet de s’entretenir en même temps. Comme contraintes, il y a le gros matériel bien sûr. C’est assez difficile de prendre beaucoup de matériel à vélo. On peut se débrouiller en se faisant livrer par les fournisseurs. Il faut une très bonne organisation sinon on est vite dépassé, car on a peu de place à vélo. Si on oublie quelque chose ça devient vite compliqué, mais c’est aussi le cas pour la plomberie en voiture finalement. Les plombiers sont un peu des apothicaires car ils ont besoin de beaucoup de raccords, de références. A vélo c’est encore plus dur ».
 

J’essaie de réinventer le métier

Avec ces contraintes, le plombier a dû s’adapter. Il doit faire preuve d’ingéniosité : « A vélo, je simplifie mon métier. J’essaie de prendre l’essentiel. J’ai vu qu’on pouvait parfois simplifier la plomberie. J’essaie de réinventer le métier, même si c’est un bien grand mot. Il y a des choses que je fais que je ne faisais pas avant car je n’ai pas le choix, je dois utiliser d’autres techniques ». Ce passionné de la petite-reine semble ravi d’utiliser ce moyen de transport. Malgré certaines difficultés, il voit quelques avantages à se déplacer à vélo : « Je prends plaisir à faire du vélo, j’adore ça. On est vraiment tranquille même si Clermont-Ferrand n’est pas la ville la plus facile pour faire du vélo. Les pistes cyclables ne sont pas toujours adaptées. Avec ces pistes, on a des circuits plus courts que les voitures. On évite au maximum les embouteillages. On peut se garer dans le centre-ville sans problème, surtout dans le vieux Clermont-Ferrand. On se gare devant le chantier et c’est super. Je ne perds pas de temps ni d’énergie ».

La rudesse de l'hiver

Le trentenaire vient de passer un premier hiver en vélo-cargo. Il concède : « L’hiver à vélo n’est pas rigolo. Quand il commence à faire froid, on voit les vraies personnes qui aiment le vélo. C’est compliqué. Je me suis bien gelé les mains. J’ai aussi eu froid aux pieds. Mais ça c’est bien passé. De toute façon, je n’ai pas le choix. S’il pleut, s’il neige, s’il y a du verglas, il faut que je prenne mon vélo et que j’y aille. Il suffit de s’équiper chaudement ». Le plombier ne pense pas que le vélo soit un argument de choix pour ses clients. Il précise : « Ce n’est pas vraiment le fait d’être plombier à vélo qui fait qu’on est choisi. C’est la personne qui fait la différence, si elle est compétente, si elle inspire confiance. Le fait d’être à vélo apporte un petit plus. Les gens regardent pas mal mon vélo. Ils sont curieux. Des personnes écolos peuvent m’appeler. Je suis aussi content de participer à une cause écologique car je laisse une empreinte carbone moindre que si je travaillais avec une voiture ».

Des artisans qui le chambrent

Sur les chantiers, le plombier à vélo commence à se faire connaître. D’autres artisans n’hésitent pas à le chambrer. Ugo souligne : « Certains se moquent un peu de moi car ils n’y connaissent rien du tout et pense qu’il est impossible de faire mon métier à vélo. On me charrie un petit peu, ce qui est courant dans le bâtiment. Ils ne m’envient pas mais peuvent voir que je suis tranquille, serein. Les questions commencent à venir car je me fais connaître sur les chantiers. Je suis le premier plombier à vélo à Clermont-Ferrand et je pense que je ne serai pas le dernier ». Sergio Marques, électricien présent sur le chantier, avoue : « J’ai d’abord été surpris. C’est innovant, écolo. Ugo n’a pas de problèmes pour se garer et ne paye pas le stationnement. Je pense que dans une métropole urbaine comme Clermont-Ferrand ça peut le faire. Mais je ne me vois pas franchir le pas et prendre un vélo pour travailler. Il y a le matériel à déplacer. Pour le dépannage, c’est peut-être possible mais pour des chantiers, ça risque d’être compliqué ».

J’aimerais par la suite, si ça marche bien, créer une société avec une équipe à vélo

Grâce au réseau de son père, le trentenaire voit que son entreprise commence à fonctionner et forme déjà de grands projets : « J’ai démarré en pleine crise COVID, ce qui n’était pas le top. J’ai du travail. Les gens m’appellent. Je ne me suis pas fixé de but à long terme. L’objectif est déjà de me sortir un salaire qui me convient. Je suis auto-entrepreneur et j’espère passer un jour en société. J’aimerais par la suite, si ça marche bien, créer une société avec une équipe à vélo. Plus il y aura de gens à vélo comme moi, plus la ville se développera en pistes cyclables ». Encouragé par son père, le plombier privilégie les petits chantiers, « vite faits, vite payés ». Et quand il est en repos, ce passionné enfourche à nouveau son vélo en fin de semaine. Il lâche, amusé : « Le week-end je sors aussi mon vélo. J’adore aller faire un petit tour à Gergovie ou au puy de Dôme. Il y a des supers coins à faire à vélo ici. Je pars à VTT ». Ugo espère se faire connaître afin de développer sa structure. Pour cela, il attend avec impatience son nouveau vélo-cargo, qui arborera une signalisation aux couleurs de son entreprise.

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