"Nous avons un petit "tigre" en France, qui risque de disparaître" : dans les volcans d'Auvergne, l'ADN des chats forestiers à l'étude

Ils ne sont pas très connus, car ils sont très discrets. Ces chats sauvages vivent dans les forêts françaises et sont aujourd'hui menacés. Pour mieux les connaître, la réserve naturelle de Chastreix-Sancy (Puy-de-Dôme) a installé des pièges à poils.

Il pourrait passer pour un gros chat domestique, mais n'espérez pas le caresser, le chat forestier est même très difficile à observer.

Ses traits distincts : un pelage marron, une queue touffue avec des anneaux noirs, une raie qui lui parcoure le dos et trois traits noirs sur la nuque.

Dernière différence notable : il chasse en journée, quand votre chat de salon préfère la nuit.  

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Un chat forestier attiré par un piège à poils. ©Réserve naturelle de Chastreix-Sancy

Difficile à observer 

Ces félins très peu connus sont une espèce protégée qui vit, entre autres, en Auvergne. On ne connaît pas le nombre d'individus qui vivent dans notre région. La réserve naturelle de Chastreix-Sancy, dans le Parc naturel régional des volcans d'Auvergne, a donc décidé de les étudier de plus près.

"Cette espèce était connue, explique Camille Thomas, garde chargée d'études, mais on avait très peu d'observation."  

Des chatons forestiers 

En 2016, des pièges photos ont été installés dans la réserve. Les appareils, qui se déclenchent quand il y a du mouvement, ont alors pris en photo : des chats forestiers. 

Bonne nouvelle supplémentaire, il y a de la reproduction. "On a observé un couple de chats, puis une femelle gestante et enfin une femelle avec un petit". 

Avec ces photos, les gardes ont du mal à différencier les chats, pour les comptabiliser. "Par rapport à la surface, on peut estimer qu'il y a au moins un ou deux mâles", avance Camille Thomas

Avec l'aide de l'Association pour les félins et la biodiversité, le parc naturel a décidé d'approfondir l'observation, en passant par l'ADN.

Des pièges à poils

Depuis octobre, les gardes de la réserve ont donc installé quatre pièges à poils.

Le système est simple : une brosse en métal, saupoudrée de racine de valériane, qui donne envie aux chats de se frotter pour marquer leur territoire. 

Un piège photo est également installé pour vérifier si c'est bien un chat forestier qui a bien laissé ses poils. 

"Ça nous permet de récolter du matériel génétique, sans capture ou pose de collier GPS.", précise Camille Thomas. 

Deux échantillons récoltés

Idéalement, il faudrait une vingtaine d'échantillons, mais pour le moment, deux chats ont laissé des poils. "Le dispositif est assez simple à mettre en place, mais il faut être patient : toutes les populations de chats forestiers ne sont pas aussi sensibles à la valériane "

Les échantillons récoltés ont été envoyés à un laboratoire de Liège, en Belgique, où les informations ADN vont être extraites du bulbe des poils.

Des informations dans l'ADN

"On peut connaître leur sexe, leur diversité génétique, leurs liens de famille, détaille Johan Michaux, directeur de recherche au Fond national de la recherche scientifique, spécialisé en génétique de la conservation des espèces. On peut même trouver s’ils ont été en contact avec des polluants."

Le laboratoire étudie aussi les crottes des chats : "ça nous permet d'étudier leur régime alimentaire, d'analyser leurs proies. Il y a des différences de régime alimentaire selon les régions."

Menacés d'hybridation

Les chats forestiers sont des espèces protégées, menacés par la destruction de leur milieu de vie : la forêt. Un nouveau risque pèse sur les félins : l'hybridation. Ils se croisent avec les chats domestiques. 

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Vidéo d'un chat forestier ©Réserve naturelle de Chastreix-Sancy

"En Occitanie, on a fait une grosse étude dans la Montagne Noire : 60 % des chats étudiés étaient hybridés. Il y a beaucoup de petits villages, les gens laissent leur chat se promener, et il y a les touristes qui abandonnent leurs chats" Johan Michaux

Nous avons notre petit tigre en France, un animal extraordinaire, qui risque de disparaître.

Johan Michaux, chercheur

Du nord de l'Espagne au Luxembourg

"Il vit depuis des milliers d'années sans être domestiqué, explique le chercheur. C'est note irréductible chat gaulois." Un chat plutôt européen, précise le chercheur, que l'on trouve du nord de l'Espagne au nord-ouest de l'Europe.

Le laboratoire a ainsi analysé 500 échantillons de poils en provenance du Luxembourg. 

Chaînon manquant 

En France, il y a une importante population de chats forestiers dans le nord-est, qui au fur et à mesure se déplace vers le sud. Une bonne nouvelle pour le chercheur. "Génétiquement, ils sont un peu différents des chats du sud-ouest, leur croisement va permettre d'éviter la consanguinité".

À mi-chemin, il y a le Massif central. Les chats forestiers qui y vivent sont moins nombreux, mais pourraient être "le chaînon manquant". L'analyse de leur ADN permettra de savoir si la rencontre s'est faite entre les chats du sud et du nord. 

Préservation

Sur la réserve, il y a d'autres espèces méconnues comme la musaraigne aquatique et le campagnol des neiges. Dans les prochaines années, des études plus précises sont prévues.

Bien que ces espèces soient fascinantes, pour ne pas déranger la faune et la flore, les gardes rappellent aux usagers de bien rester sur les sentiers dans la réserve naturelle. 

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