Quand les élections vous dépriment : les conseils pour garder le moral

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Depuis l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale et la tenue d’élections législatives, vous êtes peut-être angoissés. Avec une issue politique incertaine, rassurez-vous, vous n’êtes pas les seuls à être stressés. Un psychiatre nous donne quelques clés pour affronter un contexte anxiogène pour certains.

Si vous avez du mal à trouver le sommeil depuis l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale, rassurez-vous, vous ne faites pas figure d’exception. La perspective des élections peut générer du stress, voire un épisode dépressif dans les cas les plus graves. Le Pr Georges Brousse, psychiatre addictologue au CHU de Clermont-Ferrand, explique les raisons de cette anxiété générale : "Je pense que l’époque dans laquelle nous sommes génère de l'anxiété chez un bon nombre de concitoyens. Il faut quand même reconnaître que les temps sont incertains et anxiogènes depuis un certain moment. C'est-à-dire que la situation actuelle agit comme un révélateur que cristallise peut-être l'anxiété qui existe depuis un certain temps pour les personnes notamment : on l'a vu lors de la crise du COVID, de la guerre en Ukraine ou de façon conjoncturelle. Il y a un sentiment d’angoisse chez bon nombre des concitoyens. De façon plus structurelle, ce sont des crises répétées comme la crise des Gilets jaunes, la crise des agriculteurs. On voit que globalement, il y a des événements qui peuvent être très anxiogènes pour l'ensemble de la population. On voit que cela s’autoalimente, c'est-à-dire, plus on a des événements anxiogènes, plus on est anxieux, plus on a besoin de se rassurer et de nouvelles certitudes. Et donc l'angoisse appelle l'angoisse. Bon nombre de gens sont perdus ou sont en recherche de nouveaux sens “.

Faire le bien

Face à cette chape de plomb qui nous frappe, il existe des solutions : “La seule chose qu'on a à faire pour se sentir bien mieux, c'est de faire le bien. Saint-Augustin disait : ”Les temps sont durs, soyons bons”. Les temps seront bons dans des moments de crise quand tout est dur. Être bon envers autrui, c'est une façon aussi d'être bon envers soi-même. Il y a de ça 20 ans, la personne préférée des Français, c'était l'abbé Pierre ou Coluche. C’était des gens qui passaient pour être des personnes qui faisaient le bien. Et en fait, on perd ça de vue. Mais dans nos activités quotidiennes, dans les informations, lorsqu'on regarde la télé, ce n'est pas forcément le bien qui est mis en valeur, parce que c'est peut-être vendeur aussi. Ceci dit, le film d'Artus, “Un p’tit truc en plus” est le contre-exemple. La bienveillance envers autrui est un point important auquel les gens sont quand même globalement sensibles. C'est une façon aussi de sortir de la crise et d'être bienveillant les uns envers les autres”.

Écouter les autres

Autre conseil livré par le psychiatre, être une oreille attentive : “Je pense qu’il faut être à l'écoute de l'autre. Il est difficile de l’être, dans ces temps où on sent que les gens sont en difficulté, en détresse. Peut-être qu'ils ont du mal à entendre les autres. Il faut prendre le temps de s'écouter, prendre le temps d'échanger, de parler : c'est vraiment important. Mais après, on peut comprendre que quand ces personnes sont dans une situation de grande détresse et de grandes tensions, où qu'elles soient, sur l'échiquier politique, elles ont l'impression que les autres ne les écoutent pas. C'est vraiment probablement un des éléments importants qui se joue aujourd'hui. Convaincre les gens de s'écouter les uns les autres, de prendre du temps avec les proches, sont des clés.”

L'action comme bouée de sauvetage

Cependant, il met en garde : “Je ne suis pas sociologue ni politologue mais je crois en ces vertus-là. Je peux aussi conseiller de prendre du recul, de vivre les temps comme ils se présentent à nous. Se battre pour ses idées est important aussi, dans le respect et l'écoute de l'autre. Il faut encore une fois s'écouter et faire le bien. C'est ce que dit Marc-Aurèle. Je pense que c'est ça qui est important. Être dans l'action, c'est aussi une clé. On l'a vu à travers l'Histoire : s'engager est une façon de porter un message, de porter des valeurs. L'engagement, évidemment, constitue une façon aussi de ne pas subir les événements et de combattre l’anxiété. C'est une façon de reprendre la main sur les événements qu'on subit; il vaut mieux agir que subir. Je cite Kant, avec un but d'universalité".

Le modèle de la tragédie grecque

Le médecin avance d’autres explications pour définir cette angoisse qui nous frappe : “Il ne faut pas oublier quand même que ce qui se passe aujourd'hui, même si c'est anxiogène, c'est l'aboutissement de différents phénomènes, de couches successives. Ce qu'on a vu dans les urnes est une recherche d'opportunités par la crise, de sortir de leur propre anxiété. Quand les gens disent qu'on va renverser la table, il y a chez eux probablement aussi une volonté de répondre par la crise. On voit bien en psychiatrie qu’il s’agit d'une façon de résoudre des situations dont on ne sort pas. À bon ou mauvais escient. C'est comme la tragédie grecque. Par définition à la fin, il va y avoir une solution. Il y a des gens qui meurent, c'est terrible, c'est horrible, mais on trouve une solution. C'est toute la force du tragique”.

Des addictions comme mauvais rempart

Le Pr Georges Brousse souligne que ces angoisses sont liées aux crises que nous traversons. Elles peuvent même nous conduire à nous rabattre vers des addictions, plus ou moins dangereuses pour notre santé  : “On peut citer Antonio Gramsci, le politique italien : il parlait de cette idée, que dans la crise, il y avait toujours la nature de trouver des solutions qui permettaient de générer du nouveau. Et peut-être les gens pensent ça à tort ou à raison. On sent qu'on vit. Dans l'histoire de France, on a eu des moments où les gens ont fait le choix d'aller vers une crise et de confirmer peut-être leur souhait de renverser la table. Donc on ne sait pas ce qui arrivera, mais en tout cas c'est anxiogène. En situation d'anxiété, de tension et d'angoisse, on va chercher évidemment des choses. Des choses qui nous rassurent dans la nourriture et dans l'alimentation : ce sont clairement, des substances sucrées, les substances un peu grasses, qui rassurent. Ou parfois aussi, évidemment, les substances psychoactives, l'alcool, la cigarette, le cannabis par exemple. On a tendance évidemment à rechercher des produits qui vont rassurer et qui vont nous décontracter, afin de nous donner du plaisir. Un plaisir d'ailleurs qui peut être modéré avec le sucre. C'est un petit plaisir qui permet de soulager les tensions”.

Parler, s’écouter, dialoguer et agir : autant de pistes pour tenir bon face aux incertitudes à venir. Si vous avez besoin de davantage de soutien de la part de professionnels, vous pouvez contacter un psychologue ou même un psychiatre.

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