Le Sommet de l'élevage, dont la 27e édition se tient à Cournon-d'Auvergne (Puy-de-Dôme) du 3 au 5 octobre, nourrit l'ambition de dénouer le blocage des exportations de bovins vers la Turquie, sur fonds de montée des tensions avec les mouvements anti-viande les plus radicaux.
Le 27e sommet, qui draine 1.500 exposants de 32 pays et surtout quelque 2.000 animaux d'élevage bichonnés, brossés et manucurés, a désigné la Turquie comme invité d'honneur, dans l'espoir de relancer les exportations vers ce pays, premier importateur d'animaux en provenance de l'Union européenne, acheteur de broutards, des jeunes veaux mâles à engraisser.
"L'enjeu important pour notre filière est de parvenir à assouplir les réglementations qui régissent la commercialisation des animaux vivants vers la Turquie, car des blocages persistent depuis près de quatre ans" a déclaré à l'AFP le commissaire général du salon, Fabrice Berthon.
La menace de la FCO
Formellement, la Turquie a rouvert en novembre dernier son marché aux exportations de bovins vifs français, après avoir mis en place un embargo en septembre 2015 à la suite de la découverte du sérotype 8 du virus de la fièvre catarrhale ovine (FCO) ou maladie de la langue bleue.Cependant, les conditions sanitaires demandées par les autorités turques pour exporter sont restées très strictes. La Turquie demandait notamment des moustiquaires dans les étables pour protéger les animaux des insectes vecteurs de la maladie, ce qui est impossible à mettre en oeuvre dans les grandes prairies d'élevage du Massif Central, où les bêtes vivent à l'air libre.
La FCO est une maladie virale, transmise par des moucherons (culicoïdes) aux ruminants domestiques (ovins, bovins, caprins) et sauvages. Deux sérotypes du virus (le numéro 8 et, tout récemment, le numéro 4) sévissent en France continentale.
Cette maladie est strictement animale et n'a aucune incidence sur la sécurité sanitaire des denrées (viande, lait, etc.) Difficile d'accès pendant de longues années, le marché turc s'était fermé après la reconnaissance par la France du génocide arménien en décembre 2011. Il avait brièvement rouvert en 2015.
De janvier à septembre 2015, la France avait expédié 70.000 animaux en Turquie et les éleveurs français espéraient alors pouvoir exporter dans ce pays jusqu'à 200.000 bovins (vifs) annuellement.
Mobilisation d'anti-spécistes
Au vu de conditions sanitaires imposées par la Turquie, très peu d'exportations de bovins vifs ont eu lieu vers la Turquie cette année, hormis quelques convois acceptés au compte-goutte sur une base individuelle, l'été dernier notamment.Ces convois ont d'ailleurs donné lieu à des protestations d'associations et ONG militant pour le bien-être animal, comme CIWF, Welfare Foundation et Eyes on Animals, car le transport s'est effectué sous la canicule et les animaux ont subi de "très longs temps d'attente aux frontières et aux douanes" pouvant durer plusieurs jours.
Devant la montée des revendications pour le bien-être animal, le salon a d'ailleurs décidé de s'emparer de la question cette année. "La profession essaie de répondre à une demande sociétale de plus en plus forte", a concédé M. Berthon.
Des mouvements "radicaux" selon la FNSEA
Nouveaux concepts de bétaillères pour un transport plus confortable ou niches à veaux isolant aussi bien du froid et du chaud seront ainsi exposés. Des défenseurs de la cause animale "anti-spécistes", opposés à l'élevage et à la consommation de viande, ont néanmoins promis qu'ils tenteraient de bloquer le sommet.Alors qu'un abattoir a été incendié le jeudi 27 septembre dans l'Ain et que nombre de bouchers subissent des dégradations de leurs commerces revendiqués par des militants radicaux anti-viande depuis plusieurs mois, les éleveurs attendent le rendez-vous avec quelque appréhension.
La présidente du syndicat agricole FNSEA Christiane Lambert a estimé dimanche 30 septembre sur Europe 1 que les "plus hautes autorités de l'Etat" avaient été "trop laxistes" en "laissant se développer un discours d'une grande violence, d'une grande radicalité" contre la viande et les professions liées.
"Quand on entend les comparaisons avec l'Holocauste, (...) parler des camions de déportation ou des camps de la mort (...) je pense qu'on a affaire à des mouvements radicalisés, sectaires", a lancé Mme Lambert, en demandant la dissolution de certains d'entre eux et en espérant que les "forces de police" protègeront le salon.