Mardi 14 février, une conférence de presse s’est tenue à Clermont-Ferrand, en préfecture, au lendemain de coups de feu dans le quartier de la Gauthière, sur fond de trafic de drogue. La procureure de la République a rappelé la mobilisation de ses services : « Si on continue, on peut gagner la guerre ».
Mardi 14 février, au lendemain d’une fusillade qui a fait trois blessés, le quartier de la Gauthière de Clermont-Ferrand a, à nouveau, été le théâtre de coups de feu. Le parquet de Clermont-Ferrand indique : « Les coups de feu ont eu lieu vers 11h30, au même endroit qu’hier, rue de l’Aiguillade. Un homme, né en 2002, a été blessé et conduit vers le CHU. L’enquête a été confiée à la police judiciaire ». Quelques heures plus tôt, une conférence de presse était organisée en préfecture du Puy-de-Dôme, en présence du préfet du Puy-de-Dôme, de la procureure de la République et du maire de Clermont-Ferrand. Philippe Chopin, préfet du Puy-de-Dôme, rappelle les premiers effets du combat contre le trafic de drogue dans ce quartier : « Il s’agit d’une action de long terme, qui ne peut pas avoir de résultats immédiatement. Le ministre de l’Intérieur et la nouvelle préfète de Région nous ont accordé des forces qui sont venues du 23 au 26 janvier et du 1er au 3 février : des CRS qui ont fait de la sécurisation. C’est ce qu’on appelle de la police administrative. Plus de 31 interpellations ont eu lieu au cours de ces interventions dans les quartiers nord ».
Rendre la tranquillité aux habitants de ce quartier
Philippe Chopin, préfet du Puy-de-Dôme
Il insiste : « Ce quartier n’est pas abandonné. Il fait l’objet de toutes les attentions de la République ». Le préfet du Puy-de-Dôme détaille la mobilisation policière à la Gauthière : « Cette nuit, deux sections de CRS sont venues nous renforcer et elles resteront encore la nuit prochaine. C’est important pour rassurer la population et pour appuyer nos services de police. Ce sont des actions qui sont visibles mais tous les mois, toutes les semaines, tous les jours, il y a des opérations plus discrètes ou moins discrètes, avec des contrôles d’identité, qui ont lieu dans ces quartiers ». Cela représente une trentaine d’hommes. Philippe Chopin explique la nécessité de lutter contre les trafiquants : « Notre idée est de rendre la tranquillité aux habitants de ce quartier, qui le méritent bien. Visiblement on dérange. C’est ce qui est frustrant : plus on agit, plus on a des réactions violentes parce qu’on dérange le trafic ».
Dominique Puechmaille, procureure de la République de Clermont-Ferrand, indique qu’elle a été frappée par l’importance du trafic de drogue lors de sa prise de fonction : « La lutte contre le trafic de stupéfiants est depuis plusieurs années une priorité nationale. A mon arrivée à Clermont-Ferrand, j’ai été assez surprise de voir l’ampleur que pouvait prendre cette délinquance sur l’ensemble du département et plus particulièrement sur la métropole, notamment sur certains quartiers de Clermont-Ferrand qui ne sont pas cloisonnés ». La majeure partie est du trafic de cannabis. Elle rappelle la spécificité de la délinquance dans le quartier de la Gauthière : « Il y a aussi la circulation d’armes particulièrement dangereuses entre les mains d’individus souvent très jeunes. Cela donne lieu à ce que l’on peut qualifier avec une certaine vraisemblance à des règlements de compte. Tout le trafic ne se passe pas à la Gauthière. Il y a des stupéfiants en centre-ville, à Saint-Jacques et dans d’autres quartiers. On voit qu’il y a des interconnections entre les quartiers. La spécificité de la Gauthière est l’usage d’armes ». Dominique Puechmaille indique que la justice est mobilisée : « A mon arrivée, j’ai donné un certain nombre d’instructions pour que la réponse pénale soit la plus efficace possible, avec beaucoup de comparutions immédiates lorsque l’on a des interpellations, avec la saisie systématique de sommes d’argent lorsqu’on en trouve. Il y a d’autres enquêtes qui sont un travail de bien plus longue haleine. En matière de stupéfiants, on a des strates, avec l’usager, l’usager revendeur, le petit trafiquant, le trafiquant moyen et ceux qui tirent les ficelles. Plus on monte les niveaux, moins on obtient de renseignements car il y a un système de crainte : il est difficile de coincer ces individus mais je ne désespère pas qu’on y arrive assez rapidement ».
Actuellement, on voit que l’on dérange, que l’on a un peu désorganisé ce trafic
Dominique Puechmaille, procureure de la République de Clermont-Ferrand
Par ailleurs, un groupe local de traitement de la délinquance se réunit tous les mois dans le quartier. Dominique Puechmaille insiste : « Je signe tous les jours des réquisitions de contrôles d’identité particulièrement ciblés sur les points de deal identifiés. Cela permet d’interpeller et de déranger. Actuellement, on voit que l’on dérange, que l’on a un peu désorganisé ce trafic. Ces réactions qui sont désagréables pour la population et dangereuses aussi démontrent que le travail que l’on fait n’est pas anodin et que si on continue, on peut gagner la guerre ». La procureure rappelle la banalisation de la consommation de drogue, qui est confirmée notamment lors des contrôles routiers : « Beaucoup de personnes ont oublié que l’usage des stupéfiants est rigoureusement interdit. Le cannabis est banalisé actuellement et c’est très grave »
Il ne faut pas laisser à des délinquants la maîtrise de l’espace public
Olivier Bianchi, maire (PS) de Clermont-Ferrand
Olivier Bianchi, maire (PS) de Clermont-Ferrand, indique qu’il faut mener une lutte de longue haleine contre le trafic de stupéfiants : « La lutte contre la drogue est une urgence absolue, mais pas seulement à Clermont-Ferrand. Les pouvoirs publics que nous représentons prennent très au sérieux cette situation. Ce n’est pas une anecdote de fait divers. On a structurellement une déstabilisation par les stupéfiants d’un grand nombre de quartiers de la ville, en particulier à la Gauthière. On a conscience que le travail va être long et qu’il va demander de notre part une organisation déterminée et collective ». Il ajoute : « Pour le maire que je suis, il est insupportable que des habitants de certains quartiers puissent avoir le sentiment qu’on les abandonne et que la République n’est pas présente dans ces quartiers. Il ne faut pas laisser à des délinquants la maîtrise de l’espace public ». Plus de 190 agents de la Ville et de la Métropole travaillent dans ce territoire. Le maire de Clermont-Ferrand évoque la question de la crèche de la Gauthière et se sa situation particulière : « La crèche est au cœur du trafic. Les enfants assistent à tout. S’il y a une balle perdue, elle peut être pour les enfants. En lien avec les familles et les agents, nous avons décidé de répartir, depuis 10 jours, l’ensemble des 30 enfants dans d’autres établissements de la Ville de Clermont-Ferrand ». Une grille de protection sera mise en place pour cette crèche. L’élu socialiste dénonce lui aussi la banalisation de la consommation de drogue au sein de notre société, qui encourage le trafic : « La question centrale est la consommation de drogue qui a progressé sans commune mesure. Il faut qu’il y ait un sursaut collectif ». Des caméras supplémentaires de vidéosurveillance vont prochainement être installées à la Gauthière et à Saint-Jacques.