Une découverte scientifique « exceptionnelle » vient d’être réalisée en partie par un enseignant chercheur de l’Université Clermont Auvergne. Il a codirigé une expédition en mer près du volcan Santorin, en Grèce. Des forages en eau profonde ont permis d’en savoir plus sur le passé méconnu de ce volcan.
Le laboratoire Magmas et Volcans de Clermont-Ferrand à l’honneur ! Tim Druitt, un de ses enseignants chercheurs a participé à une expédition internationale qui publie ce lundi 15 janvier ses premiers résultats dans la prestigieuse revue Nature Communications Earth & Environment. Les travaux scientifiques menés en eau profonde dans et autour du champ volcanique de Christiana-Santorini-Kolumbo en Grèce ont permis de révéler l'une des plus grandes éruptions enregistrées sur l'arc hellénique méridional. Tim Druitt explique cette expédition qu’il a codirigée : « C’était une expédition de l’IODP (International Ocean Discovery Program). Elle a eu lieu du 11 décembre 2022 jusqu’au 10 février 2023. L’IODP mène un grand programme de forage profond en mer, depuis des décennies. Sur un navire de 140 m de long, le JOIDES Resolution, il y avait environ 120 personnes à bord, dont 60 personnels d’équipage, 32 scientifiques de 9 pays différents et 30 personnels techniques. Il s’agit d’un laboratoire flottant ».
Un projet né il y a 7 ans
Les scientifiques ont réalisé des forages au fond de la mer, dans les sédiments. Ils ont percé jusqu’à 900 mètres sous le fond de la mer. Des carottes ont été récupérées et analysées à bord du navire. Cette expédition a été préparée pendant 7 ans. Tim Druitt détaille ce qu’il a étudié : « Nous étions autour du volcan Santorin, à une centaine de kilomètres au nord de la Crête, sur un arc de volcans, qui s’appelle l’arc hellénique, étalé entre la Grèce et la Turquie. Les objectifs de cette expédition étaient larges. On a étudié le Santorin qui est un volcan emblématique. L’enregistrement d’éruptions de ce volcan en termes de couches de ponce (roche volcanique, NDLR) et de cendre sur terre est forcément incomplet. Chaque fois qu’il y a une éruption de ce volcan, les produits sont envolés en mer et s’accumulent dans les sédiments au fond de la mer. On peut remonter jusqu’à 5 millions d’années, ce qui est plus long que l’enregistrement sur l’île elle-même ».
Un niveau de ponce et de cendres très épais
Le scientifique explique ce qu’il a découvert avec les autres chercheurs : « Le Santorin est aujourd’hui un volcan émergé mais il était purement sous-marin dans le passé. Les éruptions explosives sous-marines sont très étudiées maintenant, suite à l’éruption du Hunga Tonga, en 2022, dans le Pacifique. Parmi les nombreuses choses qu’on a trouvées, on a découvert que tout autour du Santorin, il y a un niveau de ponce et de cendres au fond de la mer très épais, très volumineux. Cela représente 90 km3, alors que Hunga Tonga c’était 6 km3. Le dépôt de ponce et de cendres va jusqu’à 150 m en épaisseur. Cette éruption a eu lieu il y a un demi million d’années, quand le volcan était encore sous-marin ».
L'éruption du volcan Hunga Tonga était spectaculaire.
Un événement massif qui vient d'exploser un record, et une nouvelle preuve de la puissance des volcans... Retour sur l'éruption du #HungaTunga.#explosion #volcan #eruption pic.twitter.com/yZEzo14QZk
— Le Blob (@leblob_) November 12, 2022
Une éruption majeure
Tim Druitt insiste sur le caractère majeur de cette étude : « C’est une découverte importante car cela montre que des éruptions sous-marines plus puissantes que Hunga Tonga ont eu lieu dans le passé. Cela nous donne des idées sur le fonctionnement de ce volcan par le passé. Il y a très peu de dépôts laissés par ceette ancienne éruption sur les îles. Cela nous montre l’importance en mer profonde ». Pour lui, cette découverte est exceptionnelle : « C’est une des éruptions les plus grandes qu’il n’y a jamais eu sur cet arc volcanique et pour le volcan Santorin. Cette découverte nous montre un exemple beaucoup plus grand que Hunga Tonga d’éruption explosive sous-marine, qui était jusque-là l’éruption la plus violente jamais enregistrée. A Santorin, on a un exemple 15 fois plus grand ». L’expédition internationale comptait 3 scientifiques français. « On va retourner à Santorin en avril, mais pas en mer. On a mis 7 ans pour organiser une telle expédition. On ne fait pas cela tous les jours » conclut en riant Tim Druitt.