Loin des stéréotypes, le métier de bûcheron a bien évolué depuis plusieurs années. Pour le découvrir, nous avons rencontré ces hommes de la forêt, dans le secteur de Thiers, dans le Puy-de-Dôme. Nous avons arpenté les forêts. Et vous allez le voir, ce n’est pas un métier de tout repos.
Avant de partir pour cette nouvelle aventure, j’avais moi aussi quelques clichés sur le métier de bûcheron. On pense tout de suite au bûcheron canadien, avec sa chemise à carreaux, sa barbe et un peu sauvage au fin fond de sa forêt.
Stop ! Arrêtons là les stéréotypes et allons vérifier tout ça directement avec les principaux intéressés. Et nous n’avons même pas besoin d’aller jusqu’au Canada pour ça. Vêtue de ma plus belle chemise à carreaux, d’un bon pantalon et de chaussures adaptées, je me suis rendue à Thiers, dans le Puy-de-Dôme.
Abattage d'un arbre dans le j'ai testé pour vous le métier de bûcheron @F3Auvergne #thiers pic.twitter.com/iVSUkn6K9c
La journée commence tôt dans les forêts. Le soleil se lève doucement. Je me suis équipée d’un casque de protection et d’un gilet jaune. Un équipement obligatoire lorsqu’on est bûcheron.
Bûcheron, un métier en pleine évolution
Nous nous rendons à Arronnes, à quelques kilomètres de Thiers, dans le bois Clémentine, essentiellement composé de Douglas. Une des premières choses que j’ai apprise, c’est à reconnaître le Douglas, grâce à son écorce morcelée et sa couleur rougeâtre. C’est un bois très utilisé dans la construction. On le retrouve essentiellement en Amérique du Nord. Ce bois sera envoyé dans les nombreuses scieries de la région avant d'être exportées en France ou ailleurs.
Très vite, le bruit de la tronçonneuse nous fait revenir à la réalité. Dans la forêt, je retrouve Valentin Defer. À 22 ans, il est bûcheron entrepreneur forestier, à son compte. Il va abattre un Douglas justement. Mais avant, il y a deux trois étapes à respecter. « Je débroussaille autour de l’arbre avant de l’abattre, pour pouvoir partir facilement quand il tombera, m’explique le jeune homme. Après, on doit faire une entaille dans l’arbre pour qu’il tombe dans le sens que l’on a choisi. Dans certains cas, on met aussi des pieux pour l’aider à tomber dans le bon sens ».
C’est maintenant qu’intervient la tronçonneuse. Avec ses 6 kilos, je laisse faire les professionnels et je me mets à l’abri. En quelques secondes, l’arbre tombe… Dans la bonne direction (heureusement pour nous).
« Aujourd’hui, on utilise le métier de bûcheron pour toutes les opérations très techniques tout ce qui est le bûcheronnage manuel pour des abattages sélectifs, naturels, nous explique Nicolas Alizert, responsable de l’agence Auvergne dans la coopérative forestière. On a mis en place des engins que l’on appelle des récolteuses. Ca permet de préserver la santé de nos bûcherons. Il s’agit de les utiliser sur des travaux très haut de gamme ».
Bûcheron, un métier dans l’air du temps
Et pourtant, c’est très difficile de trouver des bûcherons aujourd’hui. Nicolas Alizert me parle de la difficulté du métier. Loin de la manipulation de la tronçonneuse, il faut aujourd’hui savoir manier des outils de plus en plus techniques, comme j’ai pu le constater tout au long de la journée.« L’avantage, c’est que l’on créé des emplois ruraux. Les bois sont présents sur nos massifs et les emplois ne sont pas délocalisables, c’est un rôle important que joue la filière forestière, continue Nicolas Alizert. C’est une filière qui a le vent en poupe. On va avoir énormément besoin de main-d’œuvre, les surfaces boisées n’ont jamais été aussi nombreuses en France et les massifs forestiers arrivent à maturité ».
La technique, on la retrouve dans une autre étape essentielle de la sylviculture : le dégagement d’une parcelle. Il faut savoir que la majorité des parcelles récoltées par la coopérative forestière, appartient à des particuliers. Nous allons justement effectuer une opération de dégagement sur une parcelle de Douglas, à Châteldon. Pour que les jeunes pousses puissent se développer et ne pas être étouffées par la végétation environnante, il faut faire un dégagement. Ce qu’on appelle aussi "débroussailler". Encore une fois, la technologie facilite le travail des nouveaux bûcherons. La mini-pelle permet de couper la végétation. Fabien Butin, aux commandes, veille à ne pas couper les jeunes pousses de Douglas.
Après m’être essayée à la mini-pelle, je passe à la débroussailleuse manuelle… Plus précise, mais plus contraignante, donc moins utilisée. « On essaye de développer des outils pour réduire la pénibilité au travail et donc on développe des moyens mécaniques. Avec ce genre d’engins manuels, on essaye de préserver la santé des salariés », insiste Michel Moulin, directeur technique de la coopérative forestière.
Le porteur ou le débardage la dernière étape pour transporter le bois. J'ai testé pour vous le métier de bûcheron @F3Auvergne pic.twitter.com/W7Twsa1j4E J'ai testé pour vous le métier de bûcheron @F3Auvergne #bucheron #foret #thiers pic.twitter.com/7mpUTeWSxs
Pendant cette journée, j’ai pu également utiliser la récolteuse qui coupe l’arbre et enlève les branches de l’arbre directement. C’est Guillaume Chaize qui est mon instructeur. Comme beaucoup, il a fait un BTS en gestion forestière. Être ingénieur forestier ne lui a pas suffi, il préférait être directement sur le terrain. Aujourd'hui, il conduit la récolteuse comme un pianiste joue du piano.
Plus simple, mais tout aussi technique, le porteur permet de transporter les bois coupés vers les scieries. C’est ce qu’on appelle aussi le débardage. Il y a quelque temps, le débardage se faisait sur un traîneau ou avec des chevaux.
Bûcheron et environnement
Le stéréotype du bûcheron qui abat des arbres sans faire attention à l’environnement et à l’écosystème est à remettre en question. « On se doit d’intégrer au quotidien l’environnement dans toutes les opérations que l’on réalise, évoque Nicolas Alizert. Il faut que la forêt puisse jouer tous les rôles qu’elle doit jouer, à la fois de production de bois, mais surtout de stockage de carbone pour lutter contre le réchauffement climatique. C’est hyper important de revaloriser, exploiter et récolter nos forêts pour faire en sorte que la forêt joue son rôle de stockage de carbone en donnant une deuxième vie aux arbres ».
La fine équipe connaît la forêt comme sa poche et ce sont des passionnés de la nature. Pendant notre journée, justement, Nicolas m’a montré une jeune pousse sur laquelle s’était frotté un chevreuil. « C’est l’ennemi du forestier, mais il n’est pas question qu’ils ne soient plus dans les forêts, il faut une juste mesure. Lorsqu’ils se frottent contre les jeunes pousses, ces dernières peuvent dépérir parce qu’ils se frottent jusqu’à la sève. C’est pour ça que l’on travaille main dans la main avec les chasseurs. Mais il faut un juste équilibre pour que la forêt se régénère ».
Quoiqu’il en soit, à la fin de cette journée, j’ai un autre regard sur le métier de bûcheron ou plutôt de sylviculteur ou encore d’agent forestier. Ce n’est seulement pas abattre un arbre, tout est réfléchi et implique des compétences bien particulières. Et nous sommes bien loin des clichés habituels sur le bûcheron.
Pour devenir bûcheron
Les formations vont du CAP agricole à l’ingénieur forestier en passant par le BTSA.
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