Biodiversité en danger : "Environ 26 000 espèces disparaissent de la planète chaque année", alerte Hugues Mouret, de l'association Arthropologia (PODCAST)

La nature est une question d'équilibre. Face à des millions d'espèces différentes présente sur terre, le comportement d'une seule menace l'ensemble : l'homme. Avec son association, Hugues Mouret tente de sensibiliser et d'initier à un retour au bon sens fondamental, en respectant les éco-systèmes, et notamment les insectes. Il s'en explique dans "Vous êtes formidables" sur France 3 auvergne Rhône Alpes.

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« Faire connaître les insectes et respecter la biodiversité » est l’objectif de l’association « Arthropologia », dont Hugues Mouret, naturaliste est le directeur scientifique. En résumé, il s’appuie sur des réalités scientifiques pour démontrer à quel point l’homme serait en train de scier la branche sur laquelle il est assis.


Son jardin est implanté à Saint-Pierre-la-Palud (Rhône), où l’on trouve aussi une ancienne mine et un musée qui lui est consacré. Un jardin qui a grandement évolué. « J’ai laissé le temps et la place à la nature pour qu’elle fasse un boulot qu’elle fait bien plus efficacement que nous », commente ce passionné. « En 10 ans, les arbres ont dépassé la hauteur de la maison. Pour peu qu’on laisse la nature s’exprimer dans les bonnes conditions, on obtient d’elle des services très intéressants. Il n’y a plus de soleil sur la maison, qui, auparavant, étant orientée au sud, était une vraie fournaise. Et le jardin produit aujourd’hui de façon assez conséquente. »


La passion pour la protection de la nature, il l’a embrassée dès son plus jeune âge. « J’ai grandi sur les contreforts de la Dombe, pas très loin de Ars-sur-Formans et Sainte-Euphémie. J’ai baigné dans la nature autant que possible. Je passais le temps que je pouvais à regarder les petites bêtes, les plantes… les insectes manger, butiner… », résume-t-il. « Aujourd’hui c’est à la fois mon loisir et mon métier. Et probablement une forme de sacerdoce aussi. »

Un jardin sauvage à la Tour de Salavagny


Hugues est autodidacte. Au fil des années, il a nourri cette passion par lui-même en étudiant l’environnement, jusqu’à créer une association. L’écocentre du lyonnais « Arthropologia » est installé depuis 2001 à la tour de Salvagny. « Nous sommes implantés dans un ancien site de maraichage bio, étendu sur deux hectares. On les a rendus, pour une part, à la nature. On a planté 2200 arbres, creusé trois mares, installé des jardins à thèmes, avec des végétaux de conservation… C’est un vrai jardin sauvage » décrit notre interlocuteur.


L’association se veut être une association naturaliste, qui milite pour la protection de la nature et le changement des pratiques en menant des actions concrètes en faveur de la biodiversité, notamment des insectes (auxiliaires, pollinisateurs, décomposeurs), des plantes et de leurs milieux de vie. « Ce sont des éléments qui s’empilent et qui dépendent les uns des autres. »

On peut compenser ce que l’on a détruit. Mais jamais à hauteur de ce qui a disparu


L’idée de mettre en avant des insectes est originale. « Il y a vingt ans, pratiquement personne ne s’en préoccupait. C’est l’une des voies que l’on a ouvertes, en essayant à la fois de sensibiliser, de mener des études, d’accompagner les agriculteurs et le changement de vision de notre société, et des collectivités. »


Ses membres interviennent de diverses façons. « Nous organisons des animations, des sorties de découverte-nature autour de thèmes. On propose aussi des conférences grand public. Cela peut aussi être de la formation professionnelle, dans un cadre un peu plus institutionnel, auprès des agriculteurs et des services d’espaces verts. » Il est également question de prendre en compte le respect de l’existant. « On peut compenser ce que l’on a détruit. Mais jamais à hauteur de ce qui a disparu. Donc la priorité, c’est tout de même de conserver ce qui est fonctionnel, en commençant par les gros arbres. »

Un ensemble de systèmes biologiques


Arthropologia se bat en faveur de la diversité biologique. « Quand on parle du vivant, pour la plupart des gens, on pense aux petites fleurs, les oiseaux, les champignons, soit des organismes. » Mais la réalité est plus complexe. « En amont, on a la diversité génétique, qui est le moteur de l’évolution. C’est à l’intérieur de leurs cellules, dans le patrimoine de ces organismes, donc on ne le voit pas. » Sans oublier d’autres niveaux : « La diversité des écosystèmes, et celle des cycles de l’eau, du carbone… Bref tout ce qui fait que les organismes fonctionnent, sous l’effet de leurs gênes, dans l’écosystème. On les appelle des services éco systémiques.»


Très vite, on aborde des sujets d’ordre scientifiques, qui peuvent paraître plus abstraits. « Mais il est important d’insister sur ces notions parce que l’effondrement de la biodiversité, ce n’est pas uniquement la disparition des oiseaux et des plantes. C’est plutôt la fin de la capacité de la nature à s’adapter, et de l’ensemble des systèmes cités précédemment » , annonce notre passionné.

26 000 espèces disparaissent chaque année


Clairement menacée, la biodiversité peut-elle se chiffrer ? « On connait environ 2.4 millions espèces vivantes sur toute la planète, alors qu’il y a probablement 10 fois plus… Si on revient à la France, on dénombre 43 amphibiens, 38 reptiles, 156 mammifères, 578 espèces d’oiseaux » énumère-t-il de tête, concernant les vertébrés. « A leur côté, on a 1000 espèces d’abeilles, 6500 mouches, 5600 papillons, 11 000 coléoptères… ça foisonne de vie. Cela représente 100 000 espèces de vie en France » ajoute-t-il.

S’agissant de l’agriculture, pas moins de 75% de notre alimentation dépendent de ces insectes


Et… une seule espèce humaine, la seule et même sur toute la planète. Cette espèce unique fait du tort à la biodiversité. « Sur les millions d’espèces connues, plus de la moitié sont des insectes. On mesure un niveau de disparition 1000 fois supérieur à la normale. On considère qu’environ 26 000 espèces disparaissent de la planète chaque année. Mais c’est probablement bien davantage. »


Ce qui n’est pas anodin. Les insectes jouent un rôle essentiel dans notre système. « Prenons l’exemple des abeilles. Il en existe 1000 espèces différentes. Des petites, des grosses, des jaunes, des noires, des poilues… On en a domestiqué une espèce, dans les ruches… mais, en fait, c’est l’ensemble de ces 1000 espèces qui va assurer la pollinisation des plantes. 9 plantes sur 10 sont polonisées par des insectes. S’agissant de l’agriculture, pas moins de 75% de notre alimentation dépendent de ces insectes », explique Hugues Mouret.

Réinstaller la biodiversité


Le danger, selon notre expert, est unique : l’action de l’homme. « Pour la nature, tout est question d’équilibre. Les causes de l’effondrement de la biodiversité sont connues. En premier lieu, ce sont les pollutions, puis la destruction des habitats et, derrière, l’embrasement climatique. » Le réchauffement climatique étant une conséquence des deux premiers fléaux. « Et si on veut lutter contre cet embrasement climatique, il va falloir s’attaquer frontalement à la réinstallation de la biodiversité. Car c’est grâce à elle qu’on a de l’ombrage, de l’évapotranspiration, ou même l’arrêt naturel des pandémies. »

on a des gestes qui sont assez simples à faire. Notamment, laisser une place à la nature partout où on l’on peut


Pour organiser ce retour, les solutions sont diverses. « Il faut commencer par la réduction du gaspillage énergétique. On ne parle pas la pollution lumineuse, due à l’éclairage nocturne. C’est une cause majeure de la disparition des insectes, car la majorité vit la nuit », propose Hugues. « Plus généralement, on a des gestes qui sont assez simples à faire. Notamment, laisser une place à la nature partout où on l’on peut : dans un jardin privé, sur les bords de route, dans les parcs publics, les campus, les hôpitaux, les casernes… Ce sont des milliers d’hectares gérés de façon conventionnelle, alors que cela pourrait servir de support de vie, de nourrissage. Et notamment les arbres, qui produisent de la matière organique. C’est majeur. Quand elle tombe et pénètre dans les sols, cela devient le plus gros puits de carbone de la biosphère continentale, en dehors de la mer. »

Remettre des zones humides


Concernant l’agriculture, notre expert dénonce la technique du remembrement des sols, qui perdure. On détruit des haies pour créer de grandes surfaces agricoles. « C’est une véritable catastrophe. C’est lié à cette marchandisation du vivant. On veut des tracteurs de plus en plus gros, et qui sont gênés, notamment, par ces haies, les talus. En 100 ans, on a coupé près de 2 millions de kilomètres de haies, soit 50 fois le tour de la terre.»

Ce sont les biotops les plus riches, dans les zones tempérées. Et pourtant, on en a déjà drainé 70% !


Les zones humides, pourtant, ne sont pas anodines dans l’équilibre général. « Ce sont les biotops les plus riches, dans les zones tempérées. Et pourtant, on en a déjà drainé 70% ! » Ces lacs, étangs ou prairies jouent un rôle fondamental. Bien éloigné, en réalité de l’image négative qu’on leur attribue en raison de la présence de moustiques…« Dans ces zones humides, il y a suffisamment de prédateurs pour chasser les moustiques. Dans un étang vivant, il y a généralement très peu de moustiques qui émergent. La cause de leur prolifération est plutôt liée à nos modes de vie. Ce sont les bidons de récupération d’eau, les chenaux mal débouchés, les coupelles sous les fleurs en plastique, remplies d’eau dans les cimetières… C’est là que se font les cycles des moustiques sans qu’aucun prédateur n’intervienne. La chaleur fait le reste…», rectifie notre interlocuteur.

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Face à Alain Fauritte ©france tv


Une belle occasion de conseiller, pour commencer, à chaque particulier détenant son propre jardin de creuser une mare. « Cela va capter les moustiques et tout un tas d’insectes vont sortir pour les chasser. A l’inverse des idées reçues, c’est une protection contre ces moustiques ! »

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