100 ans après, parler de l'usine Tase à Vaux-en-Velin, c'est ouvrir un chapitre de l'histoire de ses habitants

L'usine TASE fait partie de l'histoire de Vaux-en-Velin. Cette ancienne usine de textile du bien nommé quartier Carré de soie, a employé jusqu'à 3000 salariés. De 1924 à 1980, l'usine Tase a rythmé le quotidien et même les loisirs des habitants.

Parler de l'usine Tase à Vaux-en-Velin, c'est ouvrir un chapitre de l'histoire des habitants du Carré de soie. Durant 56 ans, la vie du quartier tourne autour de l'usine de textile. Spécialisée dans la transformation de cellulose en viscose ou soie artificielle, la présence de l'usine Tase est liée aux souvenirs des Vaudais et à l'urbanisme de la commune.

De bons souvenirs

La boule en soie en est une illustration. Depuis des lustres, ce bar cantine fait face à l'ancienne usine. C'est ici que se retrouvaient les ouvriers.

Aujourd'hui, Michel Larrivé dresse le couvert, exactement comme l'a fait sa mère pendant des décennies. Son père travaillait, lui, de l'autre côté de la rue, dans les ateliers de la Tase construite en 1924.

À l’origine de l'usine Tase, il y a une famille lyonnaise : les Gillet. À l’époque, la soie naturelle tire sa révérence, la viscose lui succède. Les Gillet se lancent dans les textiles artificiels, un marché très porteur à l’époque. L'usine constitue un fleuron, qui portera plusieurs noms, mais c’est l’acronyme Tase, pour Textile artificiel du Sud-Est, qui restera.

Michel a grandi à deux pas de l'usine.

"Les familles et tout, c’était le top, se souvient-il nostalgique, on s’amusait nous, on n’avait pas grand-chose mais on s’amusait bien, c’était bien, on avait des colonies de vacances, c’était sympa", dit-il avec le sourire sous les moustaches.

Juste derrière le café-restaurant de Michel, s'étirait la petite cité. Autour de l'immense usine c'est tout un quartier qui va voir le jour. La Tase, c’est l’archétype de la cité ouvrière. Il y a l’usine et la petite cité, des pavillons aux toits pentus ceints d'un bandeau coloré. Une cité-jardin que les patrons de l'usine, ont fait construire pour loger les contremaitres, les cadres.

À quelques minutes à pied, c'était la grande cité. Des appartements avec jardins pour les ouvriers car au plus fort de l'activité dans les années 60 jusqu'à 3 000 personnes travaillent dans ces immenses ateliers. Dont les parents de Franck et de Lydia. Leurs souvenirs sont encore vivaces.

"Mon père n’a jamais voulu que je rentre dans l’usine, raconte Franc Breysse. Il n’a jamais voulu que j’y travaille, je pense qu’il devait y avoir tellement d'émanations de produits qu'il a dû avoir peur. Il y avait trois cheminées, elles crachaient une fumée noire et quand c’était le cas ma mère disait "vite, vite il faut rentrer le linge et elle courait ramasser le linge".

Pour Lydia Pena, cette époque est synonyme de joie de vivre ensemble. "Vivre avec toutes ces nationalités, dit-elle, c’était vraiment un bon souvenir, je me souviens dans mon immeuble, il y avait des Turcs, Albanais, Polonais, Hongrois, Italiens, Espagnols."

Un employeur omniprésent

Logements, jardins, école, église, aires de jeux, tout est créé, géré par les propriétaires de l'usine qui trouvent là, le moyen de garder la main-d’œuvre sous la main.

Le père de Didier Bouillot a fait toute sa carrière d'instituteur à l'école de la Tase. Sa mère y est aussi restée quelques années. À présent, il raconte ce système symbole d'une époque.

"Tout appartient au patron, les loyers sont prélevés sur les salaires. Quand quelque chose est payé par l'usine, c’est ensuite prélevé sur les salaires. Rien n'est gratuit, rien n'est donné. C’est ça le côté paternaliste, c’est que finalement le patron garde le contrôle y compris sur les loisirs de sa main-d’œuvre", décrit Didier Bouillot.

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100 ans après, parler de l'usine Tase à Vaux-en-Velin, c'est ouvrir un chapitre de l'histoire de ses habitants ©France Télévisions
L'usine et le quartier de nos jours...

La Tase a définitivement baissé le rideau en 1980. La cité ouvrière a quelque peu changé. Certains pavillons ont été racheté au moment de la fermeture  par des salariés. Les immeubles de la grande cité, où vivaient les ouvriers ont été rachetés par un bailleur. Ce dernier a démoli certains bâtiments et lancé des réhabilitations dans les années 90.

Quant à l'usine, sa démolition a été envisagée,  mais des associations se sont mobilisées pour la sauver.

En 2011, les façades sud et ouest, restaurées, ont été classées “monument historique”, et, une première partie de l’usine a été réhabilitée en 2013. Elle abrite aujourd’hui la société Technip. Et l’autre aile, à l’abandon, fait l'objet d'un projet de réhabilitation avec bureaux et commerces. 

Aujourd'hui on a coutume de dire que la Tase avec ses ouvriers cosmopolites dont beaucoup avaient fui les persécutions dans leur pays, a été le creuset de la population de Vaulx-en-Velin.

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