La chambre de l'instruction a entendu mardi le procureur de la République de Lyon qui réclame une instruction plus poussée sur l'accident mortel du cours Vitton. L'avocat général a requis à son tour un supplément d'information qui pourrait aboutir à de nouvelles mises en cause dans cette affaire.
C'est un débat feutré qui s'est tenu à huis clos ce mardi midi devant la chambre de l'instruction à Lyon. Et pour cause...La justice doit arbitrer le bras de fer entre un juge d'instruction et le procureur de la République sur les poursuites dans l'accident mortel du cours Vitton. Une collision dans laquelle une jeune femme a été tuée et une autre griévement blessée. L'affaire avait suscité une immense émotion en octobre 2016 car le chauffard, qui roulait trop vite et sans permis, avait pris la fuite sans même se soucier du sort de ses victimes.
Identifié après plusieurs mois d'une enquête approfondie, l'homme a finalement été apprehendé et mis en examen pour "homicide involontaire" avec "circonstances aggravantes". Il est aujourd'hui en prison. Le juge d'instruction n'a donc retenu que la seule responsabilité du chauffeur, ignorant de fait les circonstances particulières de l'accident.
Le véhicule, qui contenait de la drogue et de l'alcool, avait grillé plusieurs feux rouges à plus de cent kilomètres heure au cours d'une soirée trop arrosée. Après la terrible collision, le chauffeur, qui conduisait pieds nus, avait pris la fuite avec l'un des autres passagers. Les deux autres étaient restés sans réaction sur le trottoir, sans davantage porter assistance aux victimes. Quant à la compagne du chauffard, elle avait fourni un alibi en mentant aux policiers. Et elle lui avait prêté son véhicule en sachant pertinemment qu'il roulait sans permis et sans assurance.
Une jurisprudence favorable aux parties civiles
C'est donc dans ce contexte que le procureur de la République avait introduit un réquisitoire supplétif, réclamant au juge une instruction plus poussée, élargie aux autres protagonistes de l'accident. Une démarche rejetée par le juge, qui nécessitait donc l' arbitrage de la chambre de l'instruction.
De leur côté, les parents d'Anne Laure Moreno, la jeune femme tuée dans l'accident, réclament des peines exemplaires, non seulement pour "l'assassin de leur fille", mais aussi pour tous ceux qui, à un titre ou un autre, ont contribué à sa mort. Me Laurent Bohé, leur avocat, s'est appuyé sur une jurisprudence récente où dans les mêmes conditions, l'auteur d'un accident mortel a écopé d'une peine de prison ferme alourdie (4 ans). Ses deux passagers ont été condamnés à un an de prison ferme par la cour d' Appel de Lyon, pour défaut d'assistance à la victime, précisément.
Dans le débat judiciaire qui s'est ouvert, l'avocat général a pris la mesure des arguments opposés au juge et requis un supplément d'information élargi aux autres occupants du véhicule. Si la chambre d'instruction en décidait ainsi, on pourrait s'orienter dans cette affaire vers de nouvelles mises en cause. Les passagers du véhicule seraient entendus à leur tour pour avoir omis de porter secours aux victimes et pourraient dès lors s'exposer à des poursuites .
La décision a été mise en délibéré au 16 janvier 2018.
Me Bohé, conseil de la famille Moreno, et partie civile dans cette affaire, s'explique sur le débat judiciaire en cours.