On ne compte plus les cas de piqûres dans les lieux festifs. Cette nouvelle forme d'agression génère un stress intense chez les victimes. La raison de leur explosion pourrait venir de défis lancés sur les réseaux sociaux.
Les piqures deviennent un véritable problème de société. Des personnes se voient injectées à leur insu des substances via des seringues lors de moments festifs. Le phénomène gagne progressivement tout le territoire. Des challenges de "celui qui pique le plus de monde" lanceraient des paris sur les réseaux sociaux ce qui augure une croissance future de ces agressions.
Des victimes bouleversées
Samedi 7 mai, lors d'un concert électro dans une salle de concert lyonnaise, Julia 20 ans a ressenti une vive douleur avant d'être prise de malaises. "Je n'arrivais plus à tenir sur mes jambes, mes amis m'ont dit qu'ils me parlaient et que je ne répondais pas. J'étais plus là". L'étudiante poursuit sa soirée, entourée de ses amis. Par précaution, une amie la rapproche des agents de sécurité qui ont veillé sur elle.
Le lendemain, Julia voit la plaie sur son avant-bras et comprend qu'elle a reçu une piqure. Elle se rend aux urgences pour des analyses toxicologiques. Un délai malheureusement trop long pour détecter la présence de GHB. La jeune femme a porté plainte "symboliquement" pour ne pas banaliser le phénomène. "De ce que j'ai, lu c'est parfois un amusement, le but étant de piquer un maximum de personnes. On jour clairement avec la vie de certaines personnes. Je n'ai pas les mots. Je ne comprends pas comment on peut faire ça". Julia a choisi d'utiliser son expérience pour alerter les autres victimes potentielles via les réseaux sociaux.
Quentin (nom d'emprunt), lui aussi, piqué lors d'une soirée dans une boite de nuit valentinoise, est encore très marqué par cette agression. Il n'a pas eu de symptômes particuliers mais déplore les conséquences psychologiques. "J'ai dû aller à l'hôpital pour qu'on me donne un traitement anti-VIH pendant un mois. Je dois y retourner dans un mois puis dans trois mois pour un suivi. C'est beaucoup de stress pour au final quelque chose qui dure une fraction de seconde". Il n'a pas porté plainte persuadé que la démarche à l'heure actuelle ne sera pas suivie d'effets.
Des professionnels démunis
Lyon, Grenoble, le phénomène des piqures ne touche pas que les grandes villes.
Dans la Drôme, 7 plaintes ont déjà été déposées. Dernière en date, le week-end du 7 et 8 mai, dans une boîte de nuit, où trois jeunes hommes ont été piqués.
Véronique Tenneroni, la gérante, ne sait plus quoi faire pour repérer les "piqueurs" qui échappent aux caméras de surveillance. Elle a déjà pris des mesures : obliger ses clients à déposer leurs sacs au vestiaire, interdire les pulls à capuches mais ne se dit incapable d'organiser une fouilles systématique. "Même en les fouillant, imaginiez ils ont une aiguille. Moi je la mettrais dans la coque de mon téléphone - j'ai essayé d'y penser un peu - je ne peux pas démonter tous les téléphones ! C'est impossible. J'ai 11 portiers, je ne peux pas en mettre derrière chaque client". Elle encourage ses clients à l'alerter s'ils constatent des "challenges piqure" sur les réseaux sociaux, persuadée que c'est un de meilleurs moyens d'endiguer le phénomène.
Regardez sur TikTok et Snapchat, et faites moi remonter les challenges. Il y a une police pour internet
Véronique Tenneroni, gérante de boîte de nuit
L'ampleur du phénomène des piqures, accompagné ou non de soumission chimique, laissent les professionnels de la nuit complètement démunis. Fabien Hyvernaud, directeur général du Ninkasi, travaille avec une association de bénévoles lors des soirées festives. Ces brigades qui travaillent sur la réduction des risques en général, (alcool, drogue, frotteurs...) va devoir élargir son champs de compétences pour s'adapter au phénomène.
"Leur job c'est d'ouvrir les yeux et d'être nos médiateurs pendant la soirée. Une personne qui ne se sent pas bien, une personne qui voit un comportement abusif, va aller les voir. C'est une maraude qui travaille avec notre service de sécurité qui a la responsabilité d'intervenir en cas de problématique".
Les professionnels de la nuit craignent une psychose qui risque de faire tanguer leurs établissements déjà fragilisées par le covid.