"C'est l'usine du futur", une "giga-usine" de piles à hydrogène inaugurée à Saint-Fons, près de Lyon

Inaugurée en grande pompe avec des ministres et les PDG de Michelin et Stellantis, la gigafactory de Saint-Fons (métropole de Lyon) a pour ambition d'écrire l'avenir de la mobilité hydrogène. Le site emploie 750 salariés. Objectif, permettre la production de 16.000 véhicules actuellement chaque année à 50.000 d'ici 2030.

Oubliez le mot "moteur". Dans cette usine qui suit la mode disruptive, on parle de "systèmes" ou de "modules". Ici, à Saint-Fons, vient d'être inaugurée la "gigafactory" de Symbio. Objectif, devenir un leader européen et mondial de la pile à hydrogène.

"C'est l'usine du futur ! s'enthousiasme Philippe Rosier, PDG de Symbio. C'est l'usine de la mobilité hydrogène donc c'est l'usine qui nous permet d'industrialiser cette technologie." L'usine vise à produire 16.000 systèmes à hydrogène en 2024, puis monter à 50.000 par an d'ici 2026.

Bébé industriel imaginé par Michelin et Faurecia, ce projet de première usine européenne de piles à hydrogène a été lancé il y a trois ans. Le nouveau PDG est fier aujourd'hui de présenter son site aux ministres de la Transition énergétique et de l'Industrie. "C'est vraiment l'accomplissement de trois ans de travail de toutes les équipes de Symbio pour industrialiser cette technologie en France, grâce aux pouvoirs publics et aux actionnaires" s'émeut Philippe Rosier.

Une usine poussée par les pouvoirs publics

En effet, lors de cette visite matinale, ils sont nombreux derrière le directeur de Symbio. Les ministres donc, le président de la Région Laurent Wauquiez, le président de la Métropole de Lyon Bruno Bernard, le maire de Saint-Fons et des poids lourds de l'industrie automobile, les PDG de Michelin et Stellantis (3e groupe automobile mondial après Volkswagen et Toyota). Ils ont tous travaillé de concert pour faire naître "SymphonHy" (comme Saint-Fons-Hydrogène), le nom de baptême de cette usine.

En février 2020, l'hydrogène décarboné est considéré comme prioritaire par l'Etat. 7 milliards d'euros d'investissement sur 10 ans sont prévus. L'usine de Saint-Fons est alors soutenue à hauteur de 600 millions d'euros. "Aujourd'hui, on voit sortir de terre des gigafactory. Aujourd'hui, il y a des gigafactory de batteries. On nous disait que c'était impossible, on l'a fait ! se félicite la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher. Et maintenant, cette filière hydrogène, ici en Auvergne-Rhône-Alpes. Et on voit que c'est possible!"

La pile à hydrogène, comment ça marche

Attentive, la ministre se laisse expliquer le fonctionnement de la pile à hydrogène par Philippe Rosier. "C'est une membrane catalysée. L'hydrogène se transforme en électron qui part dans le circuit, et le proton traverse la membrane pour rencontrer l'oxygène et faire de l'eau qui part dans le pot d'échappement. C'est pour ça qu'on dit que c'est une énergie propre, puisqu'elle n'émet que de la vapeur d'eau". Si vous demandez à Jamy, ça donne ça:

Une pile à hydrogène est constituée de plaques et membranes dans lesquelles a lieu une réaction électrochimique produisant de l'électricité, ainsi que de la chaleur et de l'eau. 
Elle alimente le moteur électrique, avec une autonomie et un temps de recharge proche des véhicules thermiques. "Une pile à hydrogène, c'est fabriquer de l'électricité à l'intérieur d'un véhicule. Ça permet d'augmenter son autonomie par rapport à un pack de batteries qui stocke l'électricité. Et puis c'est très simple de refaire le plein. Vous referez un plein d'hydrogène comme vous faites un plein d'essence" nous explique le PDG de Michelin Florent Menegaux.

Cette technologie, très onéreuse, coûte deux à trois fois plus cher qu'un véhicule électrique classique. Les systèmes qui sortiront de cette usine seront donc dédiés à des véhicules professionnels, de l'utilitaire au poids lourd. 

"C'est un investissement très important qui va nous permettre de monter en compétences, estime Agnès Pannier-Runacher. Ça va nous permettre de baisser les gaz à effet de serre dans les transports. C'est très concret et ça arrive maintenant. C'est une solution qui montre que la transition écologique et énergétique, ça crée de l'emploi, de la richesse et ce sont des solutions qu'on peut déployer."

Un écosystème régional de l'hydrogène

En France, 80% des acteurs de la filière hydrogène sont en Auvergne-Rhône-Alpes. Dans la vallée de la chimie, au sud de Lyon, c'est un écosystème qui se crée. Ainsi, la CNR (compagnie nationale du Rhône), produira de l'hydrogène par électrolyse de l'eau du fleuve. Elle alimentera ensuite, grâce à des pipelines, plusieurs sites de la vallée, dont Symbio.

L'accélérateur Stellantis

Il y a six mois, l'arrivée du géant Stellantis au capital de Symbio donne des ambitions mondiales à la gigafactory. Stellantis, leader des utilitaires en Europe, a livré fin 2021 ses premiers véhicules équipés de systèmes hydrogène, assemblés en Allemagne.

Avoir un client comme Stellantis, c'était très important pour assurer les volumes.

Florent Menegaux, PDG de Michelin

Stellantis croit à la maîtrise technologique de ses deux partenaires et Stellantis croit à la qualité d'éducation scientifique que nous avons en France.

Carlos Tavares, PDG de Stellantis

Une camionnette Opel emmène par exemple 4,4 kilos d'hydrogène pour 400 kilomètres d'autonomie. Son tarif dépasse encore pour le moment les 100.000 euros à l'achat, avec une offre de location à 400 euros par mois.

Le constructeur compte réduire ce tarif avec sa nouvelle gamme d'utilitaires Peugeot, Opel ou Citroën à hydrogène, qui doivent être assemblés à Hordain (Nord). "Les utilitaires d'abord parce que les temps de charges sont beaucoup plus court que l'électricité, que le poids est plus faible et donc l'autonomie et la charge utile plus fortes" nous explique Carlos Tavares.

Selon le patron de Forvia, Patrick Koller, le système hydrogène sera moins cher que la batterie électrique à horizon 2030.
Cette phase de lancement devra être soutenue par les Etats européens pour réussir, a prévenu le directeur général de Stellantis, Carlos Tavares: "pour les cinq prochaines années, nous allons avoir besoin d'un soutien à l'achat" d'au moins 30.000 euros par véhicule, a-t-il souligné, "pour lancer les volumes et ensuite réduire les coûts". 

Reste à déployer des stations de recharge, et trouver de l'hydrogène produit à partir d'énergies décarbonées. D'ici à 2030, l’investissement de l'Etat devrait permettre d'atteindre 600 kilotonnes de production par an.

D'autres projets de giga-usines

Symbio prévoit également d'ouvrir début 2024 une usine en Alsace pour fabriquer des plaques bipolaires, un élément essentiel des piles à combustible, et envisage une deuxième gigafactory en France en 2028.
L'entreprise songe également à construire une gigafactory en Californie, pour fournir le marché américain des utilitaires et des poids lourds. 
Les marques de Stellantis comme Ram comptent en profiter pour faire passer leurs pick-up à l'hydrogène à partir de 2026-2027.

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