Michèle Vianès, présidente de Regards de femmes - une ONG pour les droits des femmes créée à Lyon en 1997 - était l'invitée d'Entre-deux, sur France 3 Rhône-Alpes, ce jeudi. Elle est favorable à la pénalisation des certificats de virginité, envisagée par le ministre de l'Intérieur.
Le projet de loi contre le séparatisme, chantier lancé par Emmanuel Macron en février pour lutter contre les communautarismes religieux, pourrait prévoir une pénalisation des certificats de virginité. Cette pratique - un examen mené par certains médecins qui délivrent un document avant un mariage religieux - est déjà condamnée par le Conseil de l'Ordre des médecins.
Depuis la présentation de cette mesure, début septembre, par le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin et la ministre déléguée à la Citoyenneté Marlène Schiappa, des voix se sont élévées, y compris du côté des féministes, pour la remettre en cause. L'argument : pour faire échec au fondamentalisme religeux, l'éducation sexuelle des jeunes gens serait plus efficace qu'une condamnation pénale.
Pour l'association lyonnaise Regards de femmes, active depuis plus de 20 ans et reconnue comme ONG par l'ONU, il est pourtant urgent de poser un interdit face à une pratique archaïque qui porte atteinte aux jeunes filles. Michèle Vianès, sa présidente, était l'invitée d'Entre-deux, sur France 3 Rhône-Alpes, ce jeudi.
Aucune fiabilité scientifique
Pour elle, il faut d'abord rappeler que le fait d'examiner l'état de l'hymen d'une femme ne permet pas de dire si elle est vierge ou non. "C'est quelque chose qui n'est absolument pas scientifique", explique-t-elle. "Toutes les femmes ne sont pas faites de la même manière et toutes n'ont pas le même hymen. Il s'agit d'une simple membrane, plus ou moins épaisse. Et souvent, elle a pû être rompue, au cours de la vie quotidienne, par des pratiques sportives, par exemple, et sans aucune action sexuelle à proprement parler."Mais ce qui scandalise particulièrement Michèle Vianès, c'est que cette pratique constitue une discrimination envers les femmes. "Est-ce qu'on demande la même chose aux garçons ?", interroge-t-elle, non sans ironie. "Parce que, dans un pays où toutes les politiques publiques tendent vers l'égalité femme/hommes, si on demande quelque chose aux jeunes filles, on doit aussi le demander aux garçons !"
Trouble à l'ordre public
Pour la militante féministe, on ne peut laisser perdurer des coutumes néfastes. Même si elles restent marginales (de la part de pratiquants d'un islam rigoriste ou de certaines familles roms), elles violent des droits individuels : le respect de l'intimité, la dignité et la liberté des filles qui les subissent. Il s'agit d'une violence physique autant que psychologique.Si une loi s'impose, c'est qu'il y a trouble à l'ordre public : "Le certificat de virginité est demandé par les parents, pour des filles souvent mineures, afin de pouvoir prouver qu'elles sont vierges au moment du mariage... Ce mariage religieux, on peut se demander s'il est consenti", remarque Michèle Vianès. Un texte punissant cet acte dissuaderait les familles et les médecins, et permettrait aux jeunes filles de s'opposer plus facilement à leurs parents, selon elle.
Priorité à l'éducation
Face aux gynécologues qui estiment que punir ces pratiques est une fausse bonne idée, Michèle Vianès convient que la priorité reste à l'éducation sexuelle des jeunes, filles et garçons, afin de lutter contre l'ignorance et la désinformation.
Mais elle estime que les médecins qui signent des certificats de virginité pour "rendre service" aux futures mariées, sans leur faire subir un examen, font fausse route. Ils leur évitent une forme d'agression, mais légitiment la demande des parents et permettent à ces pratiques de perdurer.
Concernant les peines qui seraient encourues, Michèle Vianès envisage des amendes à l'encontre des parents comme des médecins, mais aussi des condamnations à des journées de sensibilisation afin de faire évoluer les mentalités.