Sandra est infirmière libérale à Vénissieux, près de Lyon "On est au front et rien pour nous protéger." Elle vient de recevoir 50 masques chirurgicaux : "Nous n'avons même pas de FPP2, pas de surblouse, pas de gel, pas de gants". Elle doit, du coup, faire des choix quand elle visite ses patients.
Sandra a passé des années à travailler comme infirmière dans des hôpitaux lyonnais avant de s'installer comme infirmière libérale à Vénissieux. "Cela fait 15 ans que je suis installée à Vénissieux, j'adore mon métier mais là ce n'est plus possible de travailler correctement dans ces conditions."
Des infirmières épuisée et surtout en colère
Comme beaucoup d'infirmières, Sandra continue à visiter ses patients, d'autant plus angoissés en cette période d'épidémie de Coronavirus. "J'avais un stock de masques FFP2, de gants et de gel, que j'utilisais au minimum en attendant d'en recevoir." Elle a pris soin de porter un masque pour sa tournée du matin et un pour sa tournée du soir, alors qu'elle doit en changer toutes les 4 heures "sinon ils ne sont plus efficaces."Sandra, comme ses collègues, est dépitée et commence sérieusement à s'agacer. "Dans le colis, il n'y avait ni gants, ni gel, ni surblouse, que des masques chirurgicaux, même pas des FPP2." Aujourd'hui, il est connu que seuls les masques FPP2 sont efficaces. "Ce n'est pas seulement pour nous protéger, mais c'est aussi pour protéger nos patients.""J'étais soulagée de savoir que mes masques étaient arrivés, et là je découvre que j'ai reçu 50 masques chirurgicaux! J'en fais quoi?"
"Je suis obligée de faire des choix, et d'utiliser mes gants pour les patients les plus atteints."
Dans sa galère, Sandra a de la chance, ses patients, ses voisins, son entourage, lui apporte les gants que chacun a chez lui. "Certains patients m'en proposent quand j'arrive chez eux, même ma concierge m'a proposé ses gants de ménage. Ce n'est pas normal !"
Sandra et ses collègues ont le sentiment d'être sacrifiés "On est 120 000 infirmiers en France pour soigner 1 million de Français. On ne demande pas de reconnaissance en cette période d'épidémie, on demande à travailler sérieusement. Nous aussi, on a des familles.""Si nous ne sommes pas protéger correctement, on refusera de prendre en charge les malades du coronavirus. On fera valoir notre droit de retrait."
Cette infirmière libérale a le sentiment d'aller à l'abattoir tous les jours. "Je continuerai parce que je tiens à mes patients. Maintenant si je dois être un danger pour mon entourage, j'arrêterais. A moi seul dans ces conditions, je suis en mesure de contaminer 30 personnes par jour, si on ajoute à ça leur famille, c'est énorme."
Le comble pour cette infirmière libérale engagée dans un combat de tous les jours, c'est que sa fille qui travaille comme caissière dans un supermarché, à elle été dotée d'un masque FPP2 "Je suis évidemment contente pour ma fille, mais je me demande si tout cela est bien sérieux. On marche sur la tête."
La crainte du braquage et pas de présence policière
Cette Infirmière libérale fait sa tournée à Vénissieux, même si elle n'exerce pas forcément dans les quartiers les plus sensibles de cette banlieue lyonnaise, elle a peur. "Je suis obligée de monter avec tous mes sacs chez mes patients car j'ai peur de me faire braquer." C'est malheureusement déjà arrivé pour certains de ses collègues. "Les gens pensent que nous avons des masques et du gel plein nos valises, s'ils savaient."Lorsqu'elle fait sa tournée, elle n'en revient pas de voir des jeunes regroupés à ne rien faire, sans aucune présence policière pour faire respecter les règles de confinement."Je suis obligée d'enlever mon caducée."
Sandra n'en revient pas, même si elle n'a pas peur parce qu'elle connaît parfaitement son quartier, elle est scandalisée. "Les gens ne sont pas disciplinés.""Je croise des voitures, des jeunes en groupe sans masques bien sur. Aucun policier pour les rappeler à l'ordre."
Malheureusement, comme elle le dit, "il faut la présence de la police et de l'armée, seule la peur du gendarme fait que les gens respectent les consignes du confinement."