Son nom scientifique, c'est l'anosmie. La perte totale de l'odorat est un symptôme de la maladie Covid-19. Dans un laboratoire du CNRS Lyon, des chercheurs ont lancé, depuis mars, une étude nationale sur l'anosmie. Et pour cause, ne plus rien sentir peut avoir bien des effets sur la qualité de vie.
Anosmie. Le terme vous était peut-être inconnu il y a peu, jusqu'à ce que vous tombiez malades Covid. L'anosmie, c'est la perte totale de l'odorat. Et c'est l'un des symptômes observés chez nombre de malades, lors de cette épidémie liée au coronavirus. Plus encore, une étude nationale lancée par des chercheurs en neurosciences du CNRS de Lyon tend à montrer que la perte d'odorat est bien présente chez les malades Covid, et que cela joue sur leur qualité de vie.
Camille Ferdenzi fait partie de l'équipe de recherche sur l'anosmie. Et en ce moment, elle est plongée dans l'analyse des données récoltées par le biais d'un questionnaire en ligne, auquel les malades ont librement accès. Le premier jeu d'analyse porte sur les mois d'avril et mai 2020. Et voici, les premiers enseignements.
Une perte d'odorat qui dure avec l'âge
Le docteur Camille Ferdenzi explique que l'analyse a notamment porté sur la durée du trouble. "Et on a pu observer un phénomène persistant, avec des personnes qui traînent à récupérer leur odorat". Pour certaines personnes qui ont répondu au questionnaire, la perte d'odorat dure depuis des semaines, des mois.La durée du trouble varie avec l'âge. Chez les plus jeunes, les 10-30 ans, elle est d'environ 10 jours. Elle atteint 20 jours chez les hommes de plus de 50 ans. Lorsqu'on a perdu l'odorat, c'est plus long à revenir si on est plus âgé, notamment pour un homme de 50 ans.
La perte de l'odorat, un handicap dans la vie quotidienne
Peu de malades, développant l'anosmie, auraient imaginé l'impact que cela pouvait avoir sur leur qualité de vie. C'est le deuxième aspect majeur qui ressort de l'étude en cours : ne plus rien sentir, cela peut faire mal, sous bien des aspects.Impact sur l'état nutritionnel, le comportement alimentaire, les interactions sociales, apparition de symptômes dépressifs... L'anosmie n'est pas anodine.
Perdre l'odorat, cela influence le plaisir alimentaire. Sans odeur, le goût des aliments s'envole. Sans plaisir alimentaire, l'appétit diminue, le plaisir de cuisiner et de manger ensemble se perd. L'anosmie joue sur les interactions sociales : on perd l'odeur de ses proches, c'est important dans la sphère intime. Et puis, autre point important, cela influe sur la détection des dangers : les odeurs sont comme des alarmes pour détecter une fuite de gaz ou un départ de feu. Sans odorat, le risque d'accident domestique augmente.
Une étude pour comprendre et mieux guérir
Dans le laboratoire, l'équipe de chercheurs met des odeurs de menthe, de fraise ou encore de gazon... en flacon. Dr Moustafa Bensafi, directeur de recherche au CNRS Lyon, s'explique : "notre boulot c'est de comprendre tous les mécanismes perceptifs qui conduisent à la perte de l'odorat, et à évaluer les effets sur la qualité de vie. Ensuite, cela nous permet de mettre en place des outils pour améliorer le diagnostic avec des tests olfactifs et de travailler sur des protocoles d'entrainement pour en guérir".L'équipe a ainsi mis au point "des petites cartes olfactives que l'on peut gratter, et qui sont envoyées à nos collègues de l'hôpital pour faire les tests et diagnostiquer l'anosmie".
Le questionnaire d'enquête est toujours en ligne, et l'étude coordonnée par le Centre en Neurosciences de Lyon se poursuit avec la crise sanitaire Covid-19. Il faut dire que le lien entre l'épidémie du coronavirus et l'apparition de ce symptôme de perte totale de l'odorat est avéré, selon le Dr Moustafa Bensafi.
.Depuis que les scientifiques se sont emparés de la question et ont relancé les études sur l'anosmie, il y a beaucoup plus de tests olfactifs. Le résultat, c'est que 50% des malades Covid en France ont une perte odorat. Ils sont 98% en Iran. Avant l'épidémie, 1 à 2 % de la population mondiale souffrait de perte totale de l'odorat. Là, ce pourcentage peut être multiplié par 2, 3, 4 dans certains pays. Ce qui rend ce symptôme assez spécifique, et très prévalant de la maladie Covid-19