COVID. "On est fier d'avoir tenu plus de 600 jours !" : l'obligation vaccinale suspendue par décret

Près de deux ans après avoir été suspendus de leurs fonctions pour avoir refusé le vaccin contre la Covid, quelques milliers de soignants et personnels vont pouvoir reprendre le chemin de l'hôpital, des Ehpad ou des établissements de santé. Un décret gouvernemental a été publié ce dimanche 14 mai. Insuffisant pour certains.

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Le gouvernement a publié ce dimanche 14 mai au Journal Officiel le décret permettant le retour en poste des personnels non-vaccinés contre la Covid. Médecins, pompiers, infirmiers, ambulanciers, étudiants en médecine, aides à domicile, aides-soignantes, personnels hospitaliers et de maisons de retraites… À l'été 2021, le gouvernement avait imposé une obligation vaccinale à près de 2,7 millions de personnes, en contact direct ou indirect avec les personnes vulnérables. Une obligation prévue par l'article 12 de la loi du 5 août 2021. Les réfractaires avaient été contraints de quitter leur fonction.

Réintégration possible à partir du 15 mai 

Le 13 mai 2023, le gouvernement a choisi de suspendre - plutôt que d'abroger - cette obligation vaccinale par décret. Le retour à leur poste de ces personnels est possible à partir de ce lundi 15 mai.

Les employeurs sont tenus de proposer une réintégration "au plus tôt et si possible dans les deux semaines après la date de publication du décret pour ce qui concerne les établissements publics". Elsa Ruillère est agent administratif à Montélimar et représentante syndicale. Elle fait sa rentrée ce mardi 16 mai après plusieurs mois de suspension, interrompus par une courte période d'activité possible suite à une contamination par la Covid. Soulagée sans doute, mais surtout fière d'avoir tenu bon. Son retour à l'hôpital, Elsa Ruillère ne l'appréhende pas. 

Une abrogation, plutôt qu'une suspension

Ce décret est-il le bienvenu ? "Mieux vaut tard que jamais !", s'exclame la représentante syndicale. Si ce "premier pas" est un début, le texte officiel est encore loin d'être satisfaisant pour les personnels exclus des établissements de santé durant plus de 600 jours faute de vaccination. Dans un tweet, les collectifs UNIS s'interrogent : "l'obligation vaccinale est suspendue, mais pour combien de temps ?" Pour eux, l'épée de Damoclès est toujours au-dessus de leur tête. Ces associations en appellent aujourd'hui au Sénat pour abroger définitivement l'obligation vaccinale contre la Covid. 

Le 4 mai dernier, une proposition de loi a été votée par l'Assemblée Nationale, à l'initiative du groupe PCF. Elle abrogerait l'obligation de vaccination contre la Covid. La proposition n'a pas encore été examinée par le Sénat.  

Quelle est la crainte des non-vaccinés ? Si une pandémie repartait, le gouvernement aurait alors la possibilité de suspendre à nouveau les personnels, et de faire revivre ce même "cauchemar". Aujourd'hui, la confiance n'y est plus. 

"Interdits d'exercer leur métier"

En mars dernier, le ministère de la Santé estimait "qu'autour de 0,3% des agents hospitaliers avaient été suspendus pour avoir refusé l'obligation vaccinale". Soit moins de 4000 personnes.

Pour la représentante syndicale, on est loin du compte. Combien de personnes ont été suspendues ? Elsa Ruillère corrige. "Ces professionnels n'ont pas simplement été "suspendus". Ils ont été interdits d'exercer leur métier. Ils ont lâché leur vocation sous la pression. La nuance est importante", souligne-t-elle. Un mot lourd de sens pour la représentante syndicale. Car derrière les paroles, il y a une réalité matérielle. La loi du 5 août 2021 ayant prévu la suspension, sans salaire, des personnels non-vaccinés. 

Difficile aujourd'hui encore de donner un chiffre des personnels impactés par l'obligation vaccinale. Elle avance tout au plus une large fourchette comprise entre 20.000 et 40.000 personnes. "Il faut aussi compter les associations et les entreprises privées. Mais il est impossible de donner un chiffre exact sans lever le secret médical", explique-t-elle.

Sur le site Collectifs Unis, une carte collaborative permet aux personnes impactées par l'obligation vaccinale de se signaler. Une manière pour les associations de mettre en avant l'ampleur du problème. "Mais cette carte n'est pas exhaustive," explique Elsa Ruillère, "certains ne veulent pas se manifester". Trop lourd à porter.

Préjudice et réparations

Privée de salaire, Elsa Ruillère a travaillé à mi-temps dans une entreprise privée. Des cagnottes ont également été lancées. Mais certains se sont retrouvés dans des situations dramatiques et parfois humiliantes. "C'est destructeur ! Certaines personnes disent être venues récupérer leurs affaires dans des sacs-poubelles, sans pouvoir accéder à leur casier", raconte-t-elle. "D'autres ont définitivement fait le choix d'abandonner leur profession, doivent vendre leur maison", ajoute-t-elle. La crise laissera des traces et aura un coût humain difficile à mesurer aujourd'hui. Mais reste une satisfaction pour la Drômoise, plus que jamais attachée à ses convictions : "c'est une grande fierté d'avoir tenu plus de 600 jours". 

Quid des dédommagements espérés par les personnels "empêchés de travailler" pendant presque deux ans ? "Il y a un préjudice moral et financier. On souhaite tous récupérer les arriérés de salaire. Mais il y a aussi les trimestres de retraite", ajoute-t-elle. 

 Après avoir été déboutée une première fois en septembre 2021, Elsa Ruillère a lancé deux autres recours devant la justice administrative.

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