"Ces gens agissent en toute impunité", des dizaines de militants de l'ultra-droite ont pris pour cible une conférence sur la Palestine à Lyon

Trois personnes assistant à une conférence sur la situation à Gaza, organisée par le collectif Palestine 69, ont été légèrement blessées ce samedi 11 novembre. Elles se trouvaient à la Maison des passages dans le Vieux Lyon quand des dizaines de membres de l'ultra-droite ont violemment attaqué le local. Le parquet de Lyon a ouvert une enquête.

"Cette conférence était prévue depuis plusieurs semaines pour entendre le récit de la vie sous blocus à Gaza par Christophe Oberlin, chirurgien qui a fait de nombreuses missions en Palestine.", explique Jérôme Faÿnel, président du Collectif 69 de soutien pour la Palestine.

L'évènement, rendu public sur internet et sur les réseaux sociaux, se déroulait à la Maison des passages dans le quartier Saint-Georges à Lyon depuis 18h. Une conférence qui, hasard du calendrier, se déroulait le même jour qu'une manifestation contre l'extrême-droite et le racisme à Lyon. 

Une violence inouïe

Vers 18h30, la discussion démarre avec, dans le public, plus d'une centaine de participants de tous âges. Puis, vers 19h10, Jérôme Faÿnel, assis en tribune, perçoit de l'agitation au fond de salle. "Je vois les gens se lever vers cette porte de secours au fond à gauche de la salle, puis on a vite compris que c'était une attaque contre cette conférence", affirme-t-il. 

Des gens du fond de la salle se sont d'abord interposés pour empêcher l'intrusion des agresseurs. Ils ont réussi à mettre des chaises pour bloquer la porte et se protéger. Ensuite, on a plus rien entendu pendant dix minutes, on pensait que c'était terminé.

Jérôme Faÿnel

président du Collectif 69 de soutien au peuple Palestinien

Finalement, une deuxième tentative d'intrusion a lieu. "Là il y avait plus de monde selon les personnes qui assuraient la sécurité dehors, cela a duré une vingtaine de minutes avec des tirs de mortier, c'était d'une grande violence.", poursuit Jérôme Faÿnel encore incrédule face à cette attaque, à laquelle personne ne s'attendait au sein du collectif. 

D'après des témoins rencontrés par l'AFP, une cinquantaine de personnes encagoulées ou masquées ont tenté de s’introduire vers 19h, dans le local du 5e arrondissement. Ils ont fait usage de la force en utilisant des bâtons pour enfoncer la porte de la salle, sans parvenir à rentrer.

Des enfants et des personnes âgées se trouvaient à l'intérieur, comme on peut le voir sur plusieurs vidéos publiées le 11 novembre au soir.

Trois personnes, "légèrement blessées", ont été prises en charge par les secours et un individu a été interpellé, selon les services de la préfète de la région Auvergne-Rhône-Alpes.

Le président de l'association de soutien à la Palestine, lui dénombre six blessés légers, dont trois ont en effet été transportés à l'hôpital.

Ce dimanche 12 novembre, il dénonce avec colère "l'impunité" des agresseurs."On peut se promener à Lyon avec des barres de fer en agressant une salle pacifiste en plein de coeur de la ville", s'insurge Jérôme Faÿnel. Il refuse de se laisser intimider : "il n'existe pas de terres réservées à l'extrême-droite même si tout le monde sait ce qu'il se passe dans le Vieux Lyon". Il a déposé plainte ce dimanche 12 novembre matin. 

De son côté, la préfète de région Fabienne Buccio, a assuré que "la police nationale était rapidement intervenue". L’appel au 17 a été passé à 19h15 et les premiers équipages sont arrivés à 19h28, selon ses services. À l’inverse, des témoins ont assuré à l'AFP que la police aurait mis plus d'une vingtaine de minutes à arriver sur place.

Une attaque inacceptable

Ce matin, les membres de la Maison des passages constatent les dégâts. Des vitres cassées, une porte forcée et des débris de verre. "La Maison des passages est un espace ouvert à tous les publics, gratuit et qui incarne la liberté de parole et la démocratie, nous sommes sidérés.", affirme Nadine Chopin, responsable du lieu. L'espace culturel n'était pas organisateur de l'évènement mais partenaire. 

"Quand on entend hurler dans la rue, "La France nous appartient", c'est totalement contre nos valeurs !", s'indigne la responsable qui promet de continuer à résister contre la pression des groupes d'extrême-droite. 

Le maire de Lyon, Grégory Doucet, a dénoncé l'attaque sur le réseau social X et a annoncé porter plainte : "la Maison des passages a été une nouvelle fois la cible d’un groupe d’extrême droite. Ces attaques organisées par des groupuscules ultra-violents sont inacceptables. Je veux dire mon soutien aux victimes. Nous saisissons la justice."

"Nous ne parvenons pas à mettre fin à l'ultra-droite dans notre ville malheureusement", se désole ce 12 novembre Grégory Doucet. "J'attends aujourd'hui une réponse très ferme du gouvernement sur ce groupuscule qui a de nouveau démontré qu'il était très violent", poursuit le maire. L'élu écologiste rappelle qu'il avait écrit il y a un an à Gérald Darmanin pour demander la dissolution des "Remparts", ce groupe d'extrême-droite soupçonné d'être derrière plusieurs agressions. 

"Des mois que nous alertons Gérald Darmanin pour qu'il agisse à Lyon contre l'extrême droite, et les actes de violence se répètent sans fin", a renchéri sur X, la députée écologiste du Rhône Marie-Charlotte Garin. 

Ce 12 novembre au matin, le ministère de l'Intérieur a fermement condamné les violences commises à Lyon, affirmant qu'une enquête est en cours "avec d'importants moyens mobilisés pour interpeller les auteurs". 

Le parquet ouvre une enquête

Dans l'après-midi ce 11 novembre, près de 1 200 personnes ont défilé à Lyon contre l'extrême droite et "contre le racisme et l'antisémitisme", à l'appel d'un collectif soutenu notamment par la France insoumise et des mouvements antifascistes.

Les manifestants ont marché dans le calme derrière des banderoles "Non à l'extrême droite, ses idées, ses violences", mais aussi avec des pancartes en soutien à la Palestine, en scandant "Justice pour Gaza".

Sur un groupe de messagerie Telegram, des membres de l'ultradroite locale ont revendiqué leur attaque de la conférence "pro-Palestine" à la suite de la manifestation antiraciste de l'après-midi. Selon eux, cette attaque se justifiait par la présence d'une vingtaine de membres supposés du Groupe Antifasciste Lyon et Environs (GALE), que le Conseil d'Etat a, par ailleurs, annoncé dissoudre le 9 novembre dernier.

"Ces faits ont donné lieu à l’ouverture d’une enquête des chefs de violences aggravées, dégradations en réunion, participation à un groupement en vue de la préparation de violences ou de dégradations", indique le parquet de Lyon ce 12 novembre. 

L'enquête a été confiée à la Direction départementale de la sécurité publique (DDSP). Un individu, interpellé à proximité du lieu des faits, se trouve toujours en garde à vue selon les informations du parquet. Les investigations se poursuivent. 

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