Lors de son conseil communautaire du 14 décembre 2020, les élus de la Métropole de Lyon ont adopté le principe d'un service de l'eau en régie publique. "Un choix philosophique et économique... Un choix clair, réfléchi, assumé", s'est justifié Bruno Bernard, afin de préserver la ressource. 

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Le débit minimal du fleuve Rhône pourrait chuter de 20% à 50% à l’horizon 2065, selon des projections scientifiques. Préserver cette ressource, indispensable à la vie, est donc devenu un enjeu majeur, y compris dans la métropole de Lyon. Résultat : la présidence écologiste de la collectivité a soumis au vote, ce 14 décembre 2020, une délibération de principe, pour un passage du service de l'eau en régie publique. Sur les 140 votants, 82 élus communautaires ont voté pour et 39 contre.

Un choix philosophique et économique

Bruno Bernard, le président de la Métropole de Lyon, a souhaité cette régie car elle permet "d’avoir une vision à long terme, où l’intérêt général prime sur les intérêts privés". Autre argument : le système devrait permettre de récupérer les marges faites par les groupes privés, mais aussi de mieux préserver la ressource, tout en responsabilisant ses consommateurs tels que les agriculteurs. Enfin, la régie publique permettra de mettre en place "une tarification sociale, solidaire en faveur des plus démunis", a indiqué Bruno Bernard, en préambule de l'examen de ce dossier par les élus communautaires.

Je veux que les premiers m3 d’eau utilisés par les habitants les plus pauvres de notre territoire soient gratuits, et que la tarification que nous allons mettre en place soit progressive afin de faire payer plus à ceux qui consomment beaucoup, et moins à ceux qui, par choix ou en raison de leur situation personnelle, consomment le moins.

Bruno Bernard, président de la Métropole de Lyon

 

Lors du débat communautaire du 14 décembre 2020, nombre d'élus ont salué une date historique. Mais certains ont émis des voeux supplémentaires : pourquoi pas "une écologie incitative et inclusive sur la base d'une réduction du prix de l'eau en fonction de la baisse de la consommation" ?

L'opposition s'interroge 

"Nous ne sommes pas contre une régie publique, mais nous ne pouvons pas accepter que ce soit le seul scénario mis sur la table", s'insurge Louis Pelaez. L'élu du groupe Inventer la Métropole de demain a poussé un "coup de gueule" lors du débat du jour. Il s'est indigné après la présentation de cette délibération qualifiée "de lunaire", ne comprenant aucun chiffre, aucune évaluation concrète liée à ce changement de mode de gestion. "Ce qui est proposé, c'est un saut vers l'inconnu, sans parachute", a déclaré Louis Pelaez, qui a déposé un amendement afin de revoir notamment la composition du groupe de travail sur ce dossier.

Corinne Cardona, au nom du groupe Synergies Métropole, estime le choix d'une régie publique "risqué", sans possibilité de faire marche arrière. L'élue souligne également n'avoir, à travers cette délibération, aucune garantie d'un service de meilleure qualité.
"Déléguer n'est ni céder ou reculer", a déclaré pour sa part, Laurence Croizier. Le groupe Rassemblement de la droite regrette, lui aussi, l'absence d'étude comparative sur les différents modes de gestion possibles.

Avantages de la régie publique, selon la majorité

Entre septembre et octobre 2020, un groupe de travail s'est penché sur les enjeux et avantages d'une telle reprise de contrôle du service de l'eau. Sous la direction d’Anne Grosperrin, le groupe a échangé sur le fond et la forme de ce passage en régie publique.

Le passage en régie publique au-delà d’un choix politique, est une véritable opportunité pour la collectivité de gérer l’ensemble du cycle de l’eau au service des habitants du territoire.

Anne Grosperrin, vice-présidente déléguée à l’eau et à l’assainissement

Trois lignes directrices ont conduit le groupe de travail à quelques préconisations. Concernant le statut, a été retenu le principe d'une régie à autonomie financière et personnalité morale, présentant trois avantages : "elle permet d’associer les usagers et associations environnementales à la décision à travers leur participation au conseil d’administration. Elle offre plus de souplesse et de réactivité car la chaîne de décision est plus courte. Et enfin, elle permet d’intégrer à la Régie, les 280 salariés du délégataire actuel, dans de meilleures conditions".

"Préserver, diversifier, être solidaire"

Afin de mieux protéger sa ressource en eau, la Métropole de Lyon entend, grâce à sa régie publique, mener à bien "une politique foncière d’acquisition des terres, situées autour de la zone de captage, et sur laquelle les eaux ruissellent, s’infiltrent, et contribuent à alimenter la nappe". Sur ces mêmes terrains, la collectivité milite pour une aide à la conversion des agriculteurs vers l’agro-écologie. Objectif ?  "Atteindre 100% des surfaces en bio sur l’aire d’alimentation des captages".

Aujourd’hui l’alimentation en eau potable de 90% de la population de la Métropole dépend d’un seul champ captant, celui de Crépieux-Charmy. "En cas de pollution, une rupture massive d’approvisionnement pourrait survenir". D'où cette idée, de points d'approvsionnements diversifiés. "Des champs captants périphériques, dans les eaux de la Saône et les eaux du lac de Miribel" vont ainsi être étudiés.

Autre enjeu : la tarification. L’exécutif métropolitain la souhaite différenciée, "à la fois sociale et progressive". L'idée, c'est d'avoir un tarif de l'eau plus bas pour les foyers les plus modestes, et plus haut pour les foyers les plus aisés. Quant à la tarification progressive, elle permettrait d'envisager la gratuité des premiers m3 d'eau consommés pour les habitants les plus modestes, et une sur-tarification à partir d’un certain volume consommé.


Exit Véolia... en 2023

Voici le calendrier prévu par la Métropole de Lyon : la collectivité reprendra la gestion de la production et de la distribution de l’eau en régie à compter du 1er janvier 2023, date à laquelle le contrat passé avec Veolia arrivera à échéance.

Pour préparer ce passage de témoin, début janvier 2021, une assistance à maîtrise d’ouvrage technique, juridique et financière viendra accompagner  la collectivité. "18 mois apparaissent en effet nécessaires pour garantir une reprise effective de la production et de la distribution de l’eau par la régie, et ce, sans dégradation du service". L’objectif est d'arriver à un vote au deuxième trimestre 2021, pour ensuite engager la mise en œuvre.

La perte de ce contrat est forte de symbole pour Veolia car son ancêtre, la Compagnie générale des eaux, a été formée par décret impérial en 1853, précisément pour alimenter Lyon en eau.

L'eau, en chiffres, dans la Métropole de Lyon

 

  • 1 325 000 habitants desservis
  • 360 000 abonnés
  • 62 réservoirs ou châteaux d’eau
  • 4 045 km de réseaux
  • 210 000 m³ consommés par jour
  • 90 millions de m³ distribués par an
  • 1 litre d’eau potable coûte 0,0031 €
     
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