Une femme, laïque, vient de déposer sa candidature auprès du nonce apostolique, pour succéder à Philippe Barbarin, l’archevêque de Lyon démissionnaire. C’est une première et une situation inédite.
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Anne Souba a la foi. Postuler à la charge d’évêque et même d’archevêque, c’est du jamais vu en France et inédit dans l’Eglise catholique qui interdit l’accès des femmes à la prêtrise, au diaconat et aux décisions des synodes.
Un droit canon que cette fervente catholique juge misogyne et qu’elle réprouve. Alors quoi de plus emblématique que la prochaine nomination au poste d’archevêque de Lyon* pour postuler et bousculer la tradition catholique ?
Je me suis dit, on va recommencer comme avant. Même si le successeur est honnête et rigoureux, il n’y a pas de rénovation possible. Pourquoi toujours le même visage d’un homme, âgé, célibataire à la tête d’un Diocèse ?
Une croyante secouée par les affaires de pédophilie dans l’Eglise
Anne Souba, écrivaine, bibliste, explique que sa décision de se lancer dans cette aventure ecclésiale a mûri pendant le confinement. Les récents conflits dans l’Episcopat sur l’utilité de rouvrir ou non les lieux de cultes l’ont passablement agacée. "Des petites querelles déplacées au regard des enjeux de l’Eglise" dit-elle. Au-delà de cela, ce sont les affaires de pédophilie qui ont durablement terni l’image de l’Eglise catholique, plus particulièrement le diocèse de Lyon (et conduit à la démission de Philippe Barbarin en mars dernier) qui ont amené Anne Souba à franchir le pas.«Le traitement de ce fléau a été une vraie faillite de l’institution. A Lyon, 4 archevêques successifs n’ont pas vu ou pas voulu voir le drame. Cela prouve que les schémas mentaux de l’Eglise ne sont pas à l’unisson du pays. Il faut rénover».
L’archevêché de Lyon n’était pas informé de cette candidature spontanée fraîchement déposée. Rien de plus normal, ce n’est pas le Diocèse qui décide de la nomination de ses prélats. Au téléphone, Emmanuel Gobillard ne semble pas non plus connaitre le nom de cette théologienne pourtant formée à la fac catholique de Lyon. L’évêque auxiliaire ne comprend pas. Il pense même que la candidature porte sur «le poste de directrice générale de l’évêché car une femme est déjà en poste». Quand nous lui expliquons qu’une femme laïque souhaite prendre la charge de Philippe Barbarin, il précise : «Je n’ai rien à en penser. Ce n’est pas nous qui décidons». Fermer le ban.
Secouer le landerneau religieux
Il faut dire qu’Anne Souba n’a pas son pareil pour tenter de «secouer» l’Eglise catholique. Cette septuagénaire parisienne est à la tête d’une petite association de 300 membres joliment baptisé «Le comité de la jupe». Un collectif crée à la suite d’un dépôt de plainte suite aux propos de l’archevêque de Paris, André XXIII, envers les femmes. Parmi ses autres faits d’armes, un «conclave parallèle» organisé au moment de la passation de pouvoir entre les papes Benoît XVI et François.Pour cette candidature épiscopale, c’est au nonce apostolique qu’Anne Souba a adressé son CV. Elle ne sait s’il lui répondra. Et quand on lui demande si elle envisage d’envoyer un courrier au Pape, sa réponse tombe, fataliste : «Je peux toujours tenter de le faire. Mais les intermédiaires sont si nombreux qu’on n’obtient jamais de réponse».
Cela a le mérite d’être clair.
* Aucune date n’est arrêtée pour la nomination du successeur de Philippe Barbarin. Pour l’heure, Michel Dubost assure la fonction d’administrateur apostolique.