Justice. Des avocats, greffiers et magistrats de Lyon assignent l'Etat pour ses manquements

Pointant des délais de procédure qui "explosent" et un manque de personnel criant, une association d'avocats, greffiers et magistrats lyonnais a annoncé, ce mercredi 18 novembre, avoir assigné l'Etat pour ses manquements en matière de ressources allouées à la justice.

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"Bien que régulièrement condamné pour dysfonctionnements de la justice, à commencer par ses délais excessifs de procédure, l'État s'acquitte des multiples condamnations prononcées à son encontre, sans remédier à la cause principale: le manque de moyens", dénonce dans un communiqué l'Association des défenseurs de la justice (ADJ), qui regroupe professionnels et syndicats du secteur.

L'association annonce avoir assigné l'État français devant le Tribunal judiciaire de Lyon pour demander "sa condamnation pour faute lourde", s'appuyant sur l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'Homme et l'article L141-1 du Code de l'organisation judiciaire, selon lequel "l'État est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice".

Pour un budget équivalent aux autres pays européens

Pour "contraindre l'État à prendre ses responsabilités", l'ADJ demande qu'il lui soit ordonné d'allouer à la justice un budget "au moins équivalent" à un groupe d'homologues européens dont la moyenne est de 143,9 euros par habitant (contre 77 euros/hab en France), "sous astreinte de 10 millions d'euros par semestre de retard".

Présenté comme l'un des grands gagnants du projet de loi de Finances 2021, le budget de la Justice verra ses ressources gonfler de 607 millions d'euros (+8%) l'année prochaine.

Un budget présenté comme "exceptionnel et historique" par le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti. Mais les syndicats professionnels, -ceux des magistrats en tête-, ont accueilli fraîchement ce budget, qui selon eux reste très en deçà des besoins.

"Ça fait tellement d'années que le budget a été insuffisant. L'année prochaine, on va récupérer (en France) 50 magistrats et 130 greffiers, c'est un effort réel mais le point de départ est complètement catastrophique donc c'est nettement insuffisant", explique la présidente de l'ADJ Sofia Soula-Michal, avocate en droit du travail.

La "clochardisation" de la justice

L'ADJ soutient que la "clochardisation" de la justice entraîne "des délais de procédure qui explosent", des peines parfois exécutées "plus de sept années après le jugement correctionnel", un fonctionnement au rabais et une aide juridictionnelle insuffisante qui contraint les avocats au "quasi-bénévolat" et constitue selon l'ADJ "un frein à l'accès au droit et à la justice pour les plus démunis".

"Les greffes sont asphyxiés par le manque de personnel et le manque de matériel" et "les magistrats croulent sous les dossiers" avec comme conséquence "une notion de qualité de la justice rendue réduite au nombre de décisions rendues", ajoute l'ADJ.

Aujourd'hui à Lyon "il faut cinq ou six ans pour juger une affaire prudhommale. Et depuis le début de l'année, les dossiers de droit du travail devant la Cour d'appel sont fixés en 2023, ce n'est pas tenable", dénonce encore Mme Soula-Michal.

Selon l'ADJ, la France dispose de 13 magistrats et 47 personnels judiciaires pour 100.000 habitants, lorsque la médiane européenne est de 31 magistrats et 105 personnels judiciaires.

 
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