La lutte contre les LGBTIphobies durement éprouvée par une année de restrictions sanitaires liée au Covid19

L'association SOS homophobie publie son bilan annuel à l'occasion de la journée mondiale contre les LGBTIphobies. A la délégation de Lyon, comme ailleurs, le constat est alarmant. La crise sanitaire a accentué les aggressions et les rejets, tout en freinant les actions de sensibilisation. 

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Victor est retourné vivre au sein du foyer familial dans la région lyonnaise pendant le confinement. Ses parents sont catholiques et militants de La "Manif pour tous". Ils ont découvert son homosexualité par hasard quelques années auparavant en tombant sur son traitement PrEP (traitement préventif délivré par l'Assurance maladie pour se prémunir du HIV). Ce coming out, non décidé, s’est très mal passé.

Aujourd’hui, en temps de crise sanitaire, cette cohabitation est particulièrement difficile, plus particulièrement avec sa sœur qui l’insulte de "pédé, suceur de bites", le harcèle, le menace d’outing auprès des grands-parents. C'est le type de témoignage que rapporte SOS homophobie, à l'occasion de la journée mondiale contre les LGBTIphobies, et la sortie du rapport 2021 sur l’homophobie.

Un rejet accentué par les mesures de restrictions sanitaires

La crise sanitaire n'a pas été sans conséquence sur les actes LGBTIphobes, selon un rapport publié ce matin par SOS homophobie, qui pointe du doigt les effets désastreux "des mesures de confinement, de couvre-feu, le développement du télétravail, la fermeture des établissements scolaires, des lieux de culture et de convivialité (...) laissant peu d’échappatoires aux victimes de violences."

L'association a constaté que la réduction des interactions sociales a été propice "au développement de violences dans le voisinage et au sein des familles, auxquelles les jeunes LGBTI sont particulièrement exposés".

Suite à la mise en place des mesures sanitaires, la plupart des activités de prévention et d’information (interventions en milieux scolaire et professionnel, événements festifs, rencontres,etc.) ont été interrompues durant de longs mois et n’ont repris que de façon partielle depuis un an. Les canaux numériques ont souvent été les seuls moyens de faire connaître les missions de soutien auprès de celles et ceux qui en auraient besoin. C'est notamment le cas du Refuge, à Lyon, qui a du fermer son local d'accueil depuis un an.

Prière aux homos de quitter la copropriété et de ne pas ramener le covid

En 2020, SOS homophobie a encore reçu 1 815 témoignages de violences LGBTIphobes, malgré une baisse drastique de la circulation des personnes et des activités. En 2020, les signalements dans les contextes "Voisinage et Famille/entourage proche" ont augmenté: 13 % dans chaque contexte, contre 8 % pour "Voisinage" et 10 % pour "Famille" en 2019. Les agressions se sont parfois retrouvées affichées dans des halls d'immeubles et totalement décomplexées : "Prière aux homos de quitter la copropriété et de ne pas ramener le covid" a-t-on pu lire, par exemple.

En 2020, le nombre de cas de LGBTIphobies dans le contexte de voisinage est en hausse avec 184 cas contre 155 en 2019, croissance qui s’explique probablement par l’augmentation du temps passé par chacun à son domicile du fait des confinements.

Des situations de harcèlement à domicile

Fait marquant de l’année 2020, le harcèlement ressort dans un quart des cas de LGBTIphobies reçus (contre 18 % en 2019). La réorientation des violences vers les espaces privés (la famille, le voisinage) a été propice au développement ou l’aggravation de violences récurrentes de la part de personnes que l’on croise quotidiennement, parfois des êtres chers. Ce sont des insultes de la part d’une sœur, des menaces venant de voisins, des coups donnés par un père, etc

L'association, à travers sa ligne d'écoute anonyme (01.48.06.42.41), constate avec gravité la mise en danger de la jeunesse. "Près d’un témoin sur dix a moins de 18 ans, et dénonce le plus souvent la biphobie (22%) et la transphobie (20%) de leurs agresseurs ou agresseuses." est-il dénoncé.

Sensibiliser contre la transphobie

LGBTI est un sigle anglophone pour désigner les personnes homosexuelles, bisexuelles, transgenres ou intersexes. Ce groupe s'adresse donc à toutes les personnes qui n'ont pas uniquement des relations hétérosexuelles. 

Près d’un individu sur 2 000 ne rentre pas dans la définition classique de l’homme ou de la femme en raison de différences anatomiques, que ce soit au niveau des organes génitaux, reproducteurs ou des chromosomes. Ces personnes sont dites « intersexes » — d’où la lettre « I » de LGBTI — et elles peuvent se considérer de sexe masculin, féminin ou indéfini.

Tout comme les lesbiennes, les gays, les bisexuels et les transgenres, les personnes intersexes ont souvent du mal à être reconnues, traitées avec égalité et à faire valoir leurs droits humains.

Dans son bilan annuel, SOS homophobie met particulièrement l'accent sur le rejet des personnes trans, et rappelle que "la fin de l’année a été également marquée par les suicides tragiques de plusieurs jeunes personnes trans dont Luna/Avril, lycéenne à Lille et Doona, étudiante à Montpellier. Des actes dramatiques qui auraient pu être évités si les parcours de transidentité n’étaient semés d’embuches et de transphobie. Il est indispensable que les pouvoirs publics s’emparent de ces sujets et que tous les fonctionnaires soient sensibilisés à la transidentité" dénonce l'association.

Un plan national d'actions 2020/2023

Pour lutter contre les discriminations LGBTIphobes, la ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances, Élisabeth Moreno, a présenté en octobre un Plan national d’actions pour l’égalité des droits contre la haine et les discriminations anti-LGBT+(2020-2023). "SOS homophobie est aujourd’hui dans l’attente de la mise en place de ces actions pour protéger les personnes LGBTI des discriminations qu’elles subissent et sera intransigeante quant à l’application de ce plan" souligne Lucile JOMAT, présidente de SOS homophobie.

Comment agir concrêtement?

L'association, qui milite depuis 1994, appelle les pouvoirs publics à intervenir dans trois domaines : 

- Les moyens financiers : . Sans moyens financiers et/ou humains, SOS homophobie estime que tout plan gouvernemental, aussi « stratégique » soit-il, ne peut être mis en œuvre et reste donc immanquablement sans effets. "Nous demandons aux pouvoirs de s’engager vraiment dans ces actions, en collaborant avec ces associations spécialistes".

- La formation : qui doit être au cœur de ces investissements. Elle doit concerner toute la population, et en priorité le personnel de la fonction publique, et particulièrement les enseignants et toute personne en contact avec les jeunes. "Toutes doivent être en mesure d’accueillir la parole de manière toujours bienveillante et sans jugement". Le monde de la Justice est aussi concerné. "Les représentants des forces de l’ordre doivent mieux prendre en compte les plaintes pour LGBTIphobies, et être plus sensibilisés aux violences intra-familiales, au harcèlement dans le voisinage, etc."

- Améliorer la communication : Il est nécessaire d’engager l’ensemble de la société dans la lutte contre les discriminations LGBTIphobes, à un niveau sociétal notamment. "Des communications positives, montrant la diversité de nos identités, sortant d’une logique de victimisation serviront à construire une société inclusive. Des campagnes rappelant que l’agresseur (ou l’agresseuse) ne restera jamais impuni contribueront à ce que les victimes se sentent plus en sécurité dans leur quotidien"

A Lyon, un rassemblement contre les LGBTIphobies est programmé ce lundi 17 mai place de la Comédie, Lyon 1er, à 17h30.

 

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