Le MAC lance une souscription pour acquérir "River of no Return", signée Sylvie Selig. La peinture de 140 mètres de long sera installée dans le musée lyonnais. La souscription est ouverte du 16 octobre au 26 novembre.
River of no Return de Sylvie Selig. C'est une gigantesque toile que le Musée d'Art Contemporain de Lyon, installé à la Cité Internationale, veut acquérir grâce au lancement d'une souscription. Le tableau représente " une odyssée sur une rivière de trois personnages, deux garçons et une fille, et leurs rencontres avec l'art contemporain ", explique l'artiste née à Nice au début des années 40. Si le récit symbolise le déroulement de la vie, l'aventure des trois personnages se déroule le temps d'une journée.
Une toile au long cours : 140 mètres de long
De février 2012 à janvier 2015. Trois ans de travail et à l'arrivée, une huile d'une taille impressionnante : 140 mètres de long et 2,20 mètres de hauteur. "J'ai commencé à écrire un petit scénario, mais qui changeait au fur et à mesure de mes rencontres" avec l'art contemporain, avec certaines œuvres, j'ajoutai des choses. Je ne savais pas que ça allait faire 140 mètres, je savais que ça serait long, mais pas 140 mètres", explique Sylvie Selig.
C'est un conte qui se passe sur une rivière avec 3 protagonistes et leur rencontre avec l'art contemporain. C'est une peinture sur laquelle est écrite une histoire. La peinture suit le texte et l'histoire.
Sylvie SeligIllustratrice, artiste peintre
La toile fourmille de références à l'art, mais aussi à l'architecture, au design ou encore à la danse. Une sorte de résumé sélectif de l'histoire de l'art contemporain. "Son travail m'évoque un monde fantastique, mais aussi le cinéma... elle scénarise ses peintures, elle les écrit d'abord, comme on écrit un scénario. Le croisement des disciplines, c'est ce qu'on retrouve dans l'œuvre de Sylvie Selig", explique Nathalie Perrin-Gilbert, adjointe à la Culture de la Ville de Lyon.
La toile n'a jamais été assemblée jusqu'à présent. L'artiste ne l'a même jamais vu dans son intégralité. Elle a travaillé "par rouleaux de 10 mètres". Sylvie Selig réalise généralement ses grandes peintures par parties. Elle fait construire une structure métallique qui lui permet de travailler sur une portion de toile à la fois, la toile s'enroulant ensuite derrière. L'artiste photographie son travail, au fur et à mesure. L'ensemble des photographies, bout à bout, constituent aussi un rouleau de papier et une vidéo. Si elle entre dans les collections du MAC de Lyon, ce sera la première fois que cette toile sera entièrement déroulée et montrée au public.
Crowdfunding : quand la toile se dévoile
Sylvie Selig était le coup de cœur des commissaires du public de l'édition 2022 de la Biennale d'Art Contemporain de Lyon. Aujourd'hui, le MAC souhaite acquérir "River of no Return". La toile pourrait ainsi rejoindre les 1600 œuvres de l'institution culturelle lyonnaise.
140 000 euros pour les 140 mètres de long. C'est un prix qui a été revu à la baisse par l'artiste. "C'est une œuvre qui vaut beaucoup plus, l'artiste a accepté de faire un prix. C'est un clin d'œil. Mais c'est l'œuvre de tout le monde, chacun avec son apport aura aidé à participer à cette aventure et sera partie prenante de cette immense toile", assure Isabelle Bertolotti, directrice du Musée d'Art Contemporain. Cette création de Sylvie Selig intégrera ainsi le patrimoine français.
La ville de Lyon va mettre la main à la poche à hauteur de 40 000 euros. Sur KissKissBankBank, une souscription publique a été lancée pour que le MAC de Lyon puisse acquérir cette toile monumentale. Le but est de compléter le financement de l’acquisition de "River of no Return", à hauteur de 100 000 euros. Le MAC avait déjà lancé avec succès une souscription en 2017 pour acheter "Rainforest" de David Tudor.
Comment sera présentée la toile au public au sein du MAC ? "Ce sera une forme de labyrinthe suspendu dans lequel le visiteur sera amené à pénétrer et à suivre le cours même de la toile, pour arriver à faire partie de l'histoire. On est dans une odyssée (...) On sera vraiment dedans, c'est une expérience incroyable" prévient Isabelle Bertolotti, directrice du musée lyonnais. En fait, le MAC entend dévoiler la toile progressivement, au fur et à mesure de l'avancée des dons.
La place des femmes
L'artiste, âgée de 82 ans, vit et travaille à Paris après avoir beaucoup voyagé. Elle a installé son atelier dans le quartier Pigalle depuis 28 ans. Ses œuvres sont restées longtemps ignorées des grands circuits habituels de l’art. L'achat de cette toile de très grand format par l'institution culturelle lyonnaise est plus qu'un symbole.
"Nous avons souhaité redonner leur juste place, aux femmes artistes, aux créatrices, aux intellectuelles. Dans un musée d'Art Contemporain, ça se traduit par l'acquisition d'œuvres réalisées par des femmes. Nous avons du retard, il s'agit de rattraper cette injustice et ce retard. Cette œuvre de 140 mètres de long, de plus de 2 mètres de hauteur, va occuper tout un étage du musée, ce sera en 2024. Nous voulons montrer que les femmes font des belles et grandes choses. Sylvie Selig en est une belle illustration", explique Nathalie Perrin-Gilbert, adjointe à la Culture de la Ville de Lyon.
Sylvie Selig a été repérée sur Instagram par les commissaires de la dernière Biennale de Lyon. Ils lui ont proposé d’exposer aux Usines Fagor la grande huile sur toile Stateless et les 28 personnages qui composent la Weird Family.