Depuis le mois de novembre 2023, la Compagnie Nationale du Rhône construit une passe à poissons sur la petite chute d’eau de la Feyssine-Saint Clair à Villeurbanne. À terme cet ouvrage permettra la restauration de l’axe migratoire des poissons dans le Rhône. Un exemple en matière d’engagement sur la biodiversité.
Il est des migrations que l’on encourage. Celle de plusieurs espèces de poissons migrateurs, sandre, brochet, hotu, barbeau, venus de la Saône voisine pour rejoindre notamment des zones de reproduction en amont.
L’ouvrage en construction est constitué de 11 bassins successifs, munis de fentes verticales, bordés de petites chutes d’une dizaine de centimètres, qui permettront aux passagers de passer l’écueil des 1, 50 mètres de la chute d’eau progressivement. Les dimensions de cette passe à poissons : 160 mètres de long et 10 mètres de large.
"La construction en est à mi-chemin", explique Said Herrouch, chef du projet à la Compagnie Nationale du Rhône. "On termine la phase géotechnique, le terrassement. Et nous allons commencer la construction d'un canal de 10 mètres de large et de 160 mètres de long qui va en fait contourner la chute d'eau."
La chute d'eau, un obstacle infranchissable pour les poissons et qui empêche la migration
Said Herrouch, chef de projet de la passe à poissons à la CNR
Le seuil de la Feyssine, cette chute d'1m50 sur le Rhône a été construit aux débuts des années 90 au moment de l'édification de la Cité internationale et la construction du Périphérique pour sécuriser l'alimentation en eau potable de la ville de Lyon. Il est donc toujours dispensable et quasi impossible à éliminer.
Le "mètre étalon" c'est l'apron
Pour calculer la forme et les dimensions de l'ouvrage, la CNR a pris les dimensions du plus petit poisson vivant dans ces eaux, l'apron "une espèce endémique qui vit au fond du Rhône", selon Said Herrouch. "Ce poisson ne peut pas faire des sauts de plus de 15 cm. Il y aura donc des mini-chutes de cette hauteur. Mais après les chutes, il a besoin de se reposer, d'avoir un endroit où il peut rester un peu à plat." D'où l'objectif des bassins. Du sur-mesure !
Pour se mettre à la place des poissons, voici l'animation 3D proposée par la Compagnie Nationale du Rhône. Comme si vous y étiez !
114 km de voie rapide à poissons
Le projet de passe à poissons est le dernier maillon sur le Rhône et la chute d'eau le dernier verrou qui va sauter. La circulation piscicole a été rétablie sur 100 Kkms entre le barrage de Pierre-Bénite et celui de Champagneux dans l'Ain. L'ouvrage va donc ajouter 14 km de plus sur le Rhône.
Et pour financer cette “voie rapide” à poissons sur 114 km, la Compagnie Nationale du Rhône et l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse ont investi près de 6 millions d’euros.
Des poissons pilotes géo-pucés
Un ouvrage qui permettra dès 2025 à 200 000 poissons de franchir l’obstacle soit 25 espèces différentes, estime la CNR. Une population qui sera surveillée par la technique de la radio-identification RFID. "On va pêcher un panel de poissons représentatifs et leur greffer une puce électronique, totalement inoffensive pour eux, poursuit Said Herrouch. "Et ils déclencheront une sorte de balise dans la passe. Un dispositif inédit qui permettra de suivre les poissons, de mesure leur temps de franchissement de la passe, bref de développer des connaissances sur leur comportement."
L'ouvrage sera mis en service en décembre 2024. Pas de conflit d'usage avec les kayakistes qui pourront continuer leur navigation sans gêner les poissons.