L’amende est salée : 21.000 euros pour une propriétaire du 2e arrondissement de Lyon qui louait sans être dans les règles un appartement sur Airbnb et Booking. C’est la première condamnation en province, et elle est sévère.

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Attention, louer votre appartement peut vous coûter cher si vous ne respectez pas les règles ! Le tribunal judiciaire de Lyon vient de sanctionner une propriétaire. Si, à Paris les dossiers Airbnb sont jugés depuis quelques années, c’est la première condamnation en province. La propriétaire de ce 67 mètres carrés cours Suchet avait été prévenue par la ville de Lyon qu’elle devait se mettre en règle. Mais, pendant un an et demi, elle a continué à louer cet appartement alors qu’il lui était interdit de le faire. Elle est aujourd’hui condamnée à 21.000 euros d’amende. Le juge a calculé le profit à 120 euros la nuit et l’a comparé au montant d’un loyer mensuel avec un bail classique. 

Une SCI hors la loi

Cette propriétaire monte une SCI et achète début 2017 un appartement derrière Perrache qu’elle loue uniquement sur des plateformes de courte durée du type AirBnB ou Booking. Elle déclare son activité de «meublé de tourisme» mais ça ne suffit pas. Car à la fin de l’année 2017, la ville de Lyon change ses règles. Elles sont applicables au 1er février 2018.

Il faut désormais deux choses quand on loue un appartement en courte durée plus de 120 jours par an :

  1. obtenir l’autorisation de changement d’usage de l’appartement, de local d’habitation à local commercial.
  2. compenser cet appartement réservé à de la location courte durée par l’achat d’un autre appartement dans l’hypercentre de taille équivalente et réservé à de l’habitat avec bail classique et loyer mensuel. La Ville veut ainsi préserver son hyper centre d’une trop grande offre d’appartements type AirBnB au détriment des offres de location meilleur marché pour les habitants.

Cette propriétaire, gérante de la SCI, n’a jamais compensé cet appartement par un autre et, son dossier étant incomplet, la ville de Lyon lui stipule le 10 janvier 2019 qu’elle n’a plus le droit de louer son bien en location courte durée. La propriétaire ne conteste pas le courrier de la municipalité. Elle accepte donc de fait cette interdiction. Sauf qu’elle va continuer à louer son appartement sur des plateformes de location, ce qui lui vaut aujourd’hui d’être lourdement sanctionnée.

Une sanction pour l'exemple ?

Maitre Xavier Demeuzoy est l'avocat de la gérante lyonnaise de SCI. Il défend également 150 propriétaires d’appartements Airbnb à Paris. Et selon lui, dans la capitale, les juges regardent les circonstances atténuantes de chaque dossier, ce qui n’a pas été le cas pour sa cliente à Lyon. «Son mari est gravement malade et elle avait besoin des revenus de cet appartement du Cours Suchet. Elle avait commencé les démarches de régularisation mais les règles sont compliquées, elles ont changé et ma cliente en toute bonne foi pensait avoir du temps devant elle. Elle n’imaginait pas que la ville pourrait la sanctionner. Et preuve d’ailleurs de sa bonne foi, elle a remis son appartement dans le parc locatif classique et l’a loué pour trois ans. »

En produisant un bail de trois ans, la propriétaire n’a fait que devancer le tribunal qui, dans son jugement, l’oblige à remettre dans le parc locatif classique son appartement, en plus de payer à la ville de Lyon les 21.000 euros d’amende.  

À Lyon, une centaine de logements dans le collimateur

Pour l’avocat de la ville de Lyon, Maitre Vincent Lacroix, «l’objectif est atteint par la Ville de Lyon. Le logement revient bien aujourd’hui dans l’offre des biens en location longue durée et l’amende permet simplement de sanctionner et de peut-être alerter un peu les propriétaires qui exercent cette activité sur les conséquences qu’il y a à effectuer de la location meublée courte durée sans autorisation préalable».

A Lyon, une centaine de logements hors-la-loi ont été repérés et sont dans le collimateur. De grandes villes comme Marseille pourraient bien suivre le mouvement lyonnais pour protéger leur centre. La Cour de Justice de l’Union Européenne a jugé le 22 septembre 2020 que : «l’activité de location de locaux meublés de courte durée a un effet inflationniste significatif sur le niveau des loyers en particulier à Paris, mais également dans d’autres villes françaises (…) il y a lieu de considérer qu’une réglementation (…) est justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général».

Reste que pour toute action en justice, il faut pouvoir prouver qu’il y a changement d’usage (puisque le logement loué plus de 120 jours par an sur une plateforme en ligne devient une activité commerciale). Selon l’article L.631-7 du Code de la Construction et de l’Habitation : «Le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile constitue un changement d’usage». Pour cela, il faut retrouver le document qui atteste que le logement est déclaré en logement d’habitation au 1er janvier 1970. Or il est parfois difficile de retrouver ce document. Et donc de poursuivre en justice le propriétaire ou la personne morale dans le cas d’une SCI.

L’avocat parisien et sa cliente lyonnaise n’ont pas encore décidé de faire appel de ce premier jugement "Airbnb" du tribunal judiciaire de Lyon.

A Paris, des règles encore plus sévères qu’à Lyon

Quels sont les critères de recevabilité de la compensation (articles 2 et 3 du règlement municipal) ? Pour être recevables, les locaux proposés en compensation doivent :

  • être à un autre usage que l’habitation au regard de la réglementation
  • ne pas être déjà revenus à l’habitation au moment du dépôt de votre demande (règle de la concomitance)
  • correspondre à des unités de logement
  • respecter des critères de surface et de localisation qui varient selon le lieu et l’activité exercée dans votre local :

Cas 1 : votre local est situé hors du secteur de compensation renforcée (voir lien ci-dessous)

  • Critère de surface : les locaux proposés en compensation doivent avoir une surface au moins égale à celle de votre local.
  • Critère de localisation : les locaux proposés en compensation doivent être situés dans le même arrondissement que votre local.

Cas 2 : votre local est situé dans le secteur de compensation renforcée (voir lien ci-dessous)

  • Critère de surface : vous devez apporter une compensation de 2 m2 pour 1 m2 de logement supprimé, sauf si les locaux proposés en compensation sont transformés en logements sociaux, auquel cas la compensation est de 1 m2 pour 1 m2.
  • Critère de localisation : les locaux proposés en compensation doivent être situés dans le même arrondissement que votre bien s’il s’agit de logements privés. S’il s’agit de logements sociaux, ils peuvent être situés en dehors de l’arrondissement, dans les limites du secteur de compensation renforcée. Attention ! Si votre local est situé dans les 1er, 2e, 4e, 5e, 6e 7e, 8e ou 9e arrondissements dans lesquels le déficit de logements par rapport à l’activité est particulièrement marqué, 50 % au plus de la surface de votre local pourra être compensée en dehors de l’arrondissement de votre local.

Particularité de la compensation pour la location meublée de courte durée : Si vous souhaitez obtenir une autorisation de changement d’usage en vue de faire de la location meublée de courte durée, la compensation doit être proposée dans le même quartier administratif que votre local, qu’il s’agisse de logements privés ou de logements sociaux (article 3 du règlement municipal).

Pour savoir si votre local se situe ou non dans le secteur de compensation renforcée, consultez la carte des zonages réglementaires du changement d’usage.

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