Arthur N., un jeune homme de 23 ans, explique avoir eu 9 dents cassées lors de brutalités policières subies en marge de la manifestation du mardi 10 décembre. Après un simple sourire aux CRS.
Place Bellecour à Lyon, mardi 10 décembre, 14 heures. La manifestation lyonnaise contre la réforme des retraites se termine au son des tirs de bombes lacrymogènes et des cris hostiles des manifestants. C'est dans ce contexte qu'un jeune homme, Arthur N., subit des coups violents, notamment à la mâchoire, et se retrouve, en quelques secondes, avec 9 dents cassées. Il accuse les policiers de l'avoir agressé sans motifs. Des images montrent en partie la scène.
Attrapé et roué de coups
Un témoin, Bastien Doudaine, photographe amateur, a transmis ses clichés aux médias. On y voit le jeune homme se faire attraper par des agents de police. On aperçoit ensuite la victime à terre, et des CRS qui semblent lutter pour le maîtriser. D'autres photos montrent ensuite le jeune homme la bouche en sang, des dents cassées. La victime affirme avoir 9 dents cassées et une partie de la mâchoire supérieure touchée par un coup de matraque d'un policier. 5 clichés successifs témoignent - partiellement - du déroulé des faits :
Des heurts entre policiers et manifestants
Contacté, Arthur N. affirme être "tombé sur la manifestation par hasard, puis l'avoir suivie". Alors que le cortège arrive place Bellecour, il se trouve à proximité d'un petit groupe de syndicalistes de la CGT, juste après des tirs de lacrymogène qui émaillent la fin de manifestation. Des policiers et des syndicalistes s'invectivent alors verbalement. Cette altercation a été rapportée par nos confrères du Progrès lors de son suivi de la manifestation, qui évoquent alors "un groupe qui provoque". L'incident a déclenché des heurts entre manifestants et policiers.La police utilise les lacrymogènes place Bellecour pour faire reculer le groupe qui provoque. pic.twitter.com/nUHAIHXwOq
— Le Progrès Rhône (@leprogresrhone) December 10, 2019
"J'ai vu des jets de pierres et énormément de jets de lacrymo, j'ai voulu m'éloigner. Je me suis retrouvé à un endroit plus calme [de la place Bellecour], aux côtés de membres de la CGT", confirme le jeune homme.
"Une agression gratuite"
"J'ai entendu une réplique d'un syndicaliste envers les CRS, j'ai trouvé ça drôle, j'ai fait un grand sourire", explique Arthur N. "Un policier m'a alors attrapé par la capuche et m'a jeté contre une brigade de CRS. A ce moment-là, je ne comprends pas ce qui m'arrive. Ils me ruent de coups. Je reçois des coups dans les jambes, sur les côtes, et un coup de matraque en plein dans les dents. Puis ils me mettent au sol. Je me rappelle qu'un policier m'a dit "bien fait pour ta gueule". On m'a jeté au milieu de la cage aux lions, c'était une agression gratuite", ajoute-t-il. Le jeune homme relate qu'il a ensuite été laissé à terre par les policiers, avant d'être pris en charge par des "street medics". Il est ensuite emmené par les secours vers l'hôpital HEH de Lyon, qui constate que 9 dents ont été brisées, et que sa mâchoire supérieure a été également touchée.
Une enquête est ouverte
Arthur, qui devait commencer un emploi de saisonnier en station dans les prochains jours, passait par Lyon pour y voir ses proches. Pour l'heure, il reste sur place pour poursuivre les soins nécessaires. Il indique par ailleurs qu'il portera plainte dans la soirée ce mercredi 11 décembre. Contactée, la police confirme qu'il y a bien eu un blessé avec "des dents cassées, des hématomes à la mâchoire et à l'avant-bras". Elle ajoute n'avoir à ce stade aucun élément sur les circonstances de l'intervention. "Actuellement nous n'avons pas connaissance d'une plainte. Tout ce qu'on sait, c'est que ça s'est passé dans un moment confus", explique la DDSP du Rhône. Le parquet de Lyon annonce, ce soir, l'ouverture d'une enquête "suite aux déclarations du jeune homme". Réactions sur les réseaux sociaux
Une vidéo circule sur Facebook. A partir de la 21ème minute, on peut voir la confusion lors de l'interpellation du jeune homme. La scène est cachée par de nombreux CRS qui font face aux manifestants. Quelques minutes plus tard, le cameraman semble lui-même être agressé par un policier, et se plaint de s'être "fait casser le poignet".De son côté, le président de la métropole de Lyon, David Kimelfeld, a réagi sur Twitter. Evoquant le cas d'Arthur et celui d'un autre adolescent touché par un tir de LBD au visage lors de la manifestation du 6 décembre dernier, il a appelé la justice à "faire toute la lumière sur les circonstances" du drame.
Pour autant, les témoignages de ces deux jeunes posent question et la justice doit faire toute la lumière sur les circonstances qui ont conduit à ces blessures. En parallèle, une enquête administrative doit être ouverte. 3/3
— David Kimelfeld (@DavidKimelfeld) December 11, 2019