C'est un message pour rétablir l'honneur de Myriam Sakhri, gendarme retrouvée morte en septembre 2011 dans sa caserne de Lyon. Jusqu'ici, pour la justice, il s'agit d'un suicide. 12 ans après son décès, la famille a choisi d'interpeller Emmanuel Macron et de relever les zones d'ombres persistantes dans cette affaire.
La vidéo, postée sur le réseau social X, anciennement Twitter, dure deux minutes. La jeune sœur de Myriam, Nadira tient des pancartes, pleines de questions. Dans un silence assourdissant, elle souligne ainsi les zones d'ombre qui entourent la mort de Myriam Sakhri, retrouvée morte dans son logement de fonction à Lyon, le 24 septembre 2011. Avec une grande sobriété, les sœurs de Myriam Sakhri veulent défendre l'honneur de la disparue."Il y a des zones d’ombre dans l’enquête sur la mort de Myriam, dit Zineb Harzallah, proche de la famille. Cette vidéo résume le combat d’une famille qui n’obtient toujours pas aujourd’hui les réponses demandées, ni de la part de la justice, ni de la part de la gendarmerie."
L’IGGN, l’inspection générale de la gendarmerie nationale, a été désignée en 2011, dans le cadre de la procédure pour enquêter sur le décès de Myriam. L’enquête sur les circonstances de la mort de Myriam s’est faite sous deux angles, explique l'amie de la famille Sakhri.
Harcèlement et discrimination
En 2011, Myriam s'est comportée, selon sa famille, comme une lanceuse d’alerte. Elle avait dénoncé des collègues auprès de sa hiérarchie, auteurs de propos discriminatoires à l’encontre des usagers de la gendarmerie qui appelaient. Myriam s'en était ouverte dans un courrier à son colonel. Les termes de "Boukak" et "Youpin" auraient été employés de manière récurrente.
Dans un deuxième temps, les propos discriminatoires vont s’adresser à Myriam. C’est ce que révèle l’enquête qui a eu lieu en 2020. "Aujourd’hui, précise Zineb, nous avons des gendarmes qui témoignent, attestent avoir été témoins de propos racistes, portés à l’encontre de Myriam."
"Emmanuel Macron, en tant que chef de l’État, est également chef des armées, rappelle Zineb. La famille souhaite sortir de ce carcan dans laquelle elle a été mise par la justice lyonnaise et parce qu’aujourd’hui, il y a suffisamment d’éléments entre les mains des sœurs et de leurs avocats pour dire que Myriam a été victime de harcèlement et de propos discriminatoires."
Rétablir l'honneur de Myriam
Depuis un non-lieu et le classement de l'affaire, la famille de Myriam se bat pour apporter de nouveaux éléments permettant la réouverture de l’enquête judiciaire avec les avocats Maître Vincent Brengarth et Maître William Bourdon. En 2015, la Cour de cassation a rejeté leur pourvoi. Mais la famille a obtenu la réouverture de l’information judiciaire.
En revanche, la Chambre de l'instruction à Lyon a restreint, de manière très stricte, le champ des nouvelles investigations. Par cette décision, la famille estime qu’il y a tout un pan de l’affaire qui est occulté. "On n'a pas le droit de parler des scellés. C’est une réouverture judiciaire, mais le champ a été tellement restreint que cela ne constitue pas une réelle ouverture", s'insurge Zineb et les sœurs de Myriam.
Aujourd’hui, les scellés que sont les vêtements, les ordinateurs portables, les documents laissés par Myriam n’ont pas été réexaminés. Et restent la propriété de l’État. "On a demandé la restitution, mais il n’y a pas eu de réponse positive. Le Parquet a proposé de restituer une partie des scellés, pas la totalité et il a choisi quels étaient les scellés à rendre," déplore Zineb.Pour la famille, ce qui est choquant, c’est de ne pas pouvoir récupérer les vêtements de Myriam. Pour les sœurs de la victime, il n’y a aucune raison de ne pas être transparent. Or, elles estiment que cette affaire est tout, sauf transparente.
Les sœurs de Myriam demandent à Emmanuel Macron que tous les moyens soient donnés pour que justice se fasse.Par cette affaire, elles souhaitent aussi attirer l’attention sur la nécessité de mettre en place un corps indépendant pour instruire les affaires de harcèlement et de discrimination au sein de la gendarmerie.
Le 19 septembre prochain, à 11h, se tiendra l'audience devant la Chambre de l'instruction à Lyon. Cette dernière devra décider ce qu'elle entend faire de l'enquête menée en 2022-2023.