Perchée sur le toit d'une tour à près de 130 mètres d'altitude, la grue du chantier Silex, dans le quartier de la Part Dieu à Lyon, est la plus haute de la métropole. Deux grutiers se relaient au quotidien pour assurer des missions hors normes. 

6h30. Il fait encore nuit, et Carlos est déjà assis dans le ciel. On va le rejoindre. 
 

La montée au ciel

On s'engouffre dans le chantier de la future tour "Silex 2". Aux côtés d'un premier immeuble de bureaux appelé Silex 1, ce chantier consiste à rénover, agrandir et élever l'ancienne tour EDF. En quelques minutes, un monte-charges temporaire nous emmène sur le toit de l'ancien immeuble EDF. Déjà, la vue est imprenable. Nous voilà au pied de la grue, posée là on ne sait comment. Restent 30 mètres d'échelle à grimper, avec pause obligatoire à chaque palier. Les barreaux sont glissants, légèrement givrés. Mais finalement, le vertige s'estompe. Sous nos pieds, le toit de l'immeuble réduit la sensation de hauteur. En 7 minutes, on est en haut. Un sas s'ouvre. Carlos nous accueille... En chaussettes. On est dans son bureau, à 130 mètres de haut. 

 

Conduite à l'aveugle

"Il n'y a personne avec moi. Même pas un ami pour m'apporter un café," rigole Carlos quand on lui demande s'il ne se sent pas trop seul. Personne d'autre dans sa cabine de moins de 3 mètres carrés. Mais il est en contact permanent avec ses collègues au sol. Maillon essentiel du chantier, il est sollicité par toutes les équipes qui ont besoin de déplacer des charges utiles à la construction.

Il passe son temps les yeux rivés sur un écran. De là-haut, c'est grâce à une caméra, fixée sur le bras de la grue, qu'il peut voir où se dirige son crochet. En quelques minutes, le brouillard tombe sur la cabine. Cette fois, le grutier est guidé à l'aveugle, par la radio du chef de manœuvre au sol. "Il faut avoir une confiance totale", explique Carlos. Grutier depuis 13 ans, il n'a jamais connu d'incident avec les charges qu'il soulève.
 

Quand la grue penche

Pourtant, celles-ci sont parfois énormes. La grue déplace des poutrelles métalliques de près de 10 mètres de long, qui seront la structure de la tour accolée à l'immeuble EDF. A manier tout en douceur, au centimètre près. Elle peut soulever des charges pesant jusqu'à 12 tonnes. Au-delà, un système d'alerte arrêterait automatiquement la manoeuvre. Lorsque la charge est levée, la grue penche de façon inquiétante. "C'est normal, explique le conducteur. Les grues sont souples, elles peuvent parfois pencher de plus d'un mètre. Sinon, elles plieraient !" Lorsque soufflent de forts vents, la grue est à l'arrêt, mais elle reste mobile. Elle tourne comme une girouette, pour diminuer sa prise au vent. Et elle tient bon...
 
 

Grandes hauteurs

Carlos travaille sur ce chantier en binôme avec Majid. Les 2 grutiers se relaient toutes les 4 heures. Ils sont tous les deux affectés sur ce chantier jusqu'à septembre 2020. C'est la première fois que chacun d'eux conduit une grue à une telle hauteur. "J'aime le vide, explique Majid, adepte des grandes hauteurs, et du parapente. Je me suis habitué à voir l'horizon. L'horizon c'est quelque chose qui me manque quand je pars en vacances et que je suis pas à des points assez élevés." Ce n'est pas le cas de tout le monde. Majid raconte qu'un jour, il a dû descendre de sa grue pour aider un collègue resté immobilisé à mi-chemin. "Il était tétanisé, accroupi, il ne pouvait plus bouger !"  
 

Une empreinte sur la ville

Majid exerce depuis 20 ans, Carlos depuis 13 ans. Tous deux étaient d'abord ouvriers spécialisés avant d'être tentés par les grandes hauteurs. Une formation rapide de conducteur d'engins, en reconversion, CAP ou en Bac professionnel, est nécessaire avant de se lancer. "La première fois, ça fait peur, avoue Carlos. Et la deuxième fois aussi !" Puis on s'habitue, et les chantiers s'enchaînent, jusqu'à celui-là.

"Je tenais à être dans cette grue, conclut Majid. Dans la construction on laisse des empreintes sur la ville, et des empreintes sur la ville de Lyon j'en ai laissées beaucoup." A l'achèvement de sa construction en 2021, Silex 2 sera la troisième tour la plus haute de Lyon, juste avant d'être repoussée à la quatrième place par une autre tour, la To-Lyon, qui sortira à son tour de terre en 2023. Dans la course aux nuages, To-Lyon dépassera Silex pour culminer à 170 mètres de haut. Rendez-vous est pris pour monter dans sa grue. 

 
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